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THE LIBERTINES @ Zénith (30/09/14)

Après un concert de retour en grandes pompes à Hyde Park début juillet et une série de trois dates à l’Alexandra Palace de Londres, les Libertines, à nouveau réunis, ont fait une halte mardi au Zénith De Paris. What became of the likely lads?

19h20, dans la salle encore vide, le noir ne se fait même pas complètement pour PAUL LEIF NOUVET. Le jeune français, accompagné d’une demoiselle, se présente en duo minimaliste. Une seule guitare et une boite à rythmes prééminente se mêlent à une parodie vocale de Pete Doherty, entre langueur appuyée et coups de speed rageurs. Un titre hip hop conclue un set très court : juste dix petites minutes et puis s’en vont.

 

 

Dix minutes plus tard, place au groove moelleux de CUCKOOLANDER. Sous leur logo, quatre anglais égrainent des titres plutôt élaborés, aux accents asiatiques ou fifties. Cheveux bicolores, la chanteuse à la voix grave part aussi dans des aigüs, un peu comme Florence And The Machine ou La Roux. Comparaison appuyée par un dernier titre synthpop bouclant vingt cinq minutes d’une prestation honorable.

 

 

Encore une pause de vingt minutes et c’est au tour des madrilènes de DEERS. Groupe exclusivement féminin, situé quelque part entre les L7 (en moins sauvage !) et les groupes de filles des 50’s. Interventions enfantines, voix acidulées, tambour militaire et arpèges en réverb’, la prestation est rafraîchissante mais pas inoubliable.

 

 

A ce stade, si une nouvelle première partie se présente encore, ça va être l’émeute. La fosse s’est remplie complètement, les gradins, bâchés sur les côtés, sont pleins aux trois quarts.

Il est 21h30 lorsque retentit “We’ll Meet Again” de Vera Lynn. L’intro est un peu longue, et les quelques plaintes qui s’élèvent attestent que certains se demandent encore si le concert aura bien lieu. Devant un simple tissu noir en guise de backdrop, sous un écran panoramique, THE LIBERTINES entrent. Carl Barât qui arbore la fameuse veste militaire rouge est au milieu, Pete Doherty en costume et chapeau est à gauche, John Hassall à la basse est sur la même ligne à droite, tandis que Gary Powell et sa batterie sont surélevés. Dès les premières notes du trépignant “The Delaney”, le public réagit : tout le monde s’est levé dans les étages et un pogo secoue les premiers rangs. Sur l’écran, se succèdent des images d’archives et d’autres prises en direct. Le tissu noir laisse place à un grand drapeau Libertines, puis il tombe à son tour au profit d’énormes spots de cinéma. Plein phare au niveau des lights pour une prestation électrique, fougueuse et bordélique. Les fins sont brouillonnes mais les morceaux sont envoyés comme des balles. Entre deux compositions, Pete et Carl gratouillent face à face ce qui ressemble à des impros (parfois dysharmoniques), ou se rassemblent en conciliabules avec leur batteur au sujet du prochain titre. Parfois, au lieu d’un duo, Pete laisse son acolyte chanter seul, d’autres fois ils partagent le même micro. Deux cartes à jouer coincées dans son chapeau, Pete ondule, Carl tape des Converses, et Gary ferraille. John lui, est un peu à part : hors de toute marque d’affection ou de connivence des trois autres, sérieux, carré, il assure parfaitement sa partie. Voici le très attendu “What Katie Did” où les arpèges acides de Pete contrastent avec la voix de crooner nonchalante de Carl. Bien sûr, les deux compères s’essayent au français : “Vive le saucisson !” s’écrit Pete qui, visiblement, vient d’en recevoir, ou “c’est les garçons dans le grûpe” annonce Carl avant d’entamer “Boys In The Band”. L’ambiance est bonne, le show est fiévreux et foutraque, peut être un peu trop. Deux passages sortent du lot : “Can’t Stand Me Now” beau, efficace, et émouvant, et la version acoustique de “Fuck Forever” qui claque comme jamais. 22h55, Pete ramasse son pardessus et sa mallette de Docteur de campagne : sortie.

Rappel. John le bassiste revient et prend sa place, seul pendant de longues secondes qui semblent incongrues, avant que les trois autres n’arrivent en se tenant par les épaules. Le Zénith gronde, “What Became Of The Likely Lads”, le plancher tremble. “Up The Bracket” s’enchaine à “What A Waster” dans un vrombissement. Puis “I Get Along” où Pete lance sa guitare au roadie, fait valser son pied micro d’un grand coup de pied, et saute sur le dos de Carl qui tombe en arrière, renversant la batterie. Ils finiront par se relever pour terminer les dernières notes du morceau. C’est fini, il est presque 23h15, le public est en sueur.

 

 

Certes, les deux frères ennemis ont écrit de bonnes chansons, mais ce soir, si on ne connaissait pas leur discographie, difficile de suivre tout à fait le lyrisme irrévérencieux des lads.