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THE DO @ Zénith (27/03/15)

Consacré aux dernières “Victoires De La Musique”, le duo franco-finlandais continue de tout ravager sur son passage avec un troisième album aussi dévastateur, artistiquement que commercialement parlant. Point culminant d’une tournée l’ayant récemment emmené à Londres notamment, le duo s’offre un Zénith De Paris sold out en cette fin de mois de mars.

A 20h10, ce sont les Français de LAS AVES qui débarquent sur la (trop ?) grande scène du Zénith dans l’optique de chauffer un public pas encore tout à fait présent. Le groupe, emmené par une chanteuse, propose un électro rock qui n’est pas sans rappeler la formule récemment adoptée par la tête d’affiche de ce soir. Ca joue bien, mais il n’y a pas ce petit grain de folie qui peut faire qu’une première partie enthousiasme véritablement une audience. La chanteuse ne communique pas énormément si ce n’est pour remercier les spectateurs entre chaque chanson, qui se ressemblent un peu toutes par ailleurs. Nul doute que les musiciens ont un fort potentiel, ils savent jouer, les compositions sont catchy à souhait, mais il manque un poil de mégalomanie à leur musique pour pouvoir envisager de conquérir un Zénith. Rien de grave, Las Aves aura d’autres opportunités pour envoyer un message plus fort. Trente petites minutes de set et puis s’en va, Las Aves laisse une impression positive mais qui ne pèsera malheureusement pas bien lourd face à ce qui suit.

Le Zénith se remplit petit à petit et la population reste assez hétérogène, même si la prédominance des bobos parisiens trentenaires prime avant tout. 21h10, les lumières s’éteignent, et il en est de même pour la musique assez… spéciale qui passait depuis le début de la soirée.

“Omen”, morceau de clôture, totalement instrumental du dernier album de THE DO raisonne soudain dans le Zénith. Digne d’un mantra électronique, l’ambiance posée met tout de suite la salle sous tension pendant que les musiciens entrent sur scène, accompagnés d’applaudissements assez timides. Disposés en cercle autour d’un micro central, chaque musicien est entouré par diverses percussions électroniques, claviers ou autres guitares et basse. La coordination des musiciens sur les passages de percussions sera d’ailleurs l’un des gros points forts de la soirée. C’est en toute logique que l’hyper charismatique Olivia fait son entrée par le fond de la scène sur les boucles d’intro de “Mess Like This”, chanson toute douce reprenant les notes de “Omen”. Surprenante entrée de scène de la part des Dø que l’on attendait envoyer le pâté de suite. Olivia nous fait admirer sa magnifique voix et son timbre si particulier alors que l’on peut constater la qualité du son ce soir. “Keep Your Lips Sealed” réchauffe l’assemblée qui entonne timidement le refrain. Il existe un décalage assez énorme entre ce qui arrive sur scène et ce qu’il se passe dans le reste de la salle. L’assemblée est morte ce soir. Cette déception pourrait laisser penser que la soirée sera moins belle, mais il n’en est rien. Il faut dire que l’armée de tubes composant ce troisième album “Shake Shook Shaken” y est grandement pour quelque chose, certes, mais que la prestation scénique est d’un niveau assez incroyable. C’est millimétré mais emprunt d’une émotion toujours borderline, notamment grâce à la présence si lumineuse d’Olivia. Le reste du combo n’est pas en reste, assurant avec brio toutes les parties assurant à la chanteuse une base solide pour briller. Les chansons sont, pour la plupart, rallongées, non pas dans un but de divertissement du public, mais vraiment comme un extrapolation musicale du travail fait sur CD. Alors s’en vient la question suivante : comment, dans une telle configuration, le groupe va t-il pouvoir s’approprier les morceaux plus vieux de son répertoire bien moins électro. La réponse vient magnifiquement avec un quart d’heure délicieux qui débute par “Too Insistent”. Bien que joviale, cette chanson prend une allure vraiment mélancolique avec les nouveaux arrangements qui n’enlèvent en rien à la sensibilité avec laquelle la frontwoman interprète les paroles, constamment tournée vers Dan, son compère dans cette fabuleuse aventure. C’est d’ailleurs face à face, qu’ils entonneront un “On My Shoulder”, pourtant délaissé sur cette tournée, mais acclamé (attention, on parle ici de quelques applaudissements). Un piano-voix qui va doucement se transformer en trip hallucinogène et désespéré avec l’entrée progressive des autres musiciens dans l’arène. Le jeu de lumière sublime le tout ce soir. Petit à petit, “Slippery Slope” transforme le Zénith en un lieu propice à la transe. L’ovni tribal du second opus de The Dø s’adapte merveilleusement bien au tournant électro prit par la formation et la chanteuse s’éclate à distiller son phrasé presque hip hop sur cette chanson. Si l’auditoire était vivant ce soir, il danserait nu, transcendé par la performance. Dan harangue de plus en plus une foule qui peine à réagir, mais qui déclenchera quand même quelques déhanchés lorsque “Despair, Hangover & Ecstasy” raisonnera dans Paris. Le groupe se détend et prend vraiment du plaisir à jouer avec cette foule qui ne réagit pas. Peu importe, le show se suffit à lui même. Olivia distille une performance délicieuse, nous éclaboussant de sa grâce et de ses mouvements de ninja.

La bande quitte la scène mais, existe t-il plus belle récompense que celle d’un public qui se réveille pour rappeler les musiciens sur scène ? Vingt minutes de rappel, dont dix juste pour “Dust If Off” qui prend des allures de messe sacrée ce soir. La formation envoie le bois une dernière fois, les lumières se déchainent et l’on termine ce concert le souffle coupé. Le Zénith ne s’est jamais battu contre son groupe, il a concédé un K.O. dès les premières minutes et s’est laissé entraîné dans les méandres de la discographie de The Dø pour une soirée dont on ressort hypnotisé, enchanté, des flashs pleins les yeux, des mélodies pleins les oreilles et ce n’est pas cet ultime rappel sur “Nature Will Remain” qui changera quoique ce soit à cette soirée.

Ce soir Paris ne méritait pas The Dø. La contre partie d’un groupe estampillé “Victoire De La Musique” est qu’il peut remplir un Zénith, offrir un show digne des plus grands et ne pas susciter plus d’enthousiasme que cela. Et ce n’est pas minimiser l’activité du public ce soir qui n’existait pas. Mais peu importe. Les vrais savent. Et ce soir le vaisseau spatial et spécial The Dø a simplement tout ravagé sur son passage.

Setlist :

Omen
A Mess Like This
Keep Your Lips Sealed
Miracles (Back In Time)
Sparks
Trustful Hands
Opposite Ways
Too Insistent
On My Shoulders
Slippery Slope
Aha
Going Through Walls
Despair, Hangover & Ecstasy
—-
Dust It Off
Anita No!
Lick My Wounds
—-
Nature Will Remain

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN