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LES FOUDRES @ Bataclan (09/10/25)

Le projet avait été présenté en conférence de presse en juillet dernier. Ce 9 octobre, le Bataclan accueillait une cérémonie particulière : la première du genre exclusivement dédiée à récompenser le metal français. Dans la continuité des Flammes (cérémonie hip hop lancée en 2023), Les Foudres ont vu les choses en grand pour inaugurer cette première édition avec un show total, rythmé par des remises de prix et des prestations live. Alors, simple entre-soi anecdotique ou véritable événement qui fera date ? Un camion de France TV garé devant la mythique salle apporte un début de réponse. Car oui, ce soir, la cérémonie sera retransmise à la télévision.

Avant l’orage

Difficile d’établir un portrait-robot de la salle et de ceux qui la composent. Et pour cause, professionnels, nominés et fans de plusieurs générations se mélangent. Les badges presse côtoient les patchs brodés dans une ambiance bon enfant. 20h. Avec une demi-heure de retard, l’humoriste Thomas VDB arrive sur scène avec le rôle difficile de lancer Les Foudres. “On va célébrer le metal… C’est énorme le metal français ! C’est carrément un chenil“, annonce l’ex-rédacteur en chef de Rock Sound (le vrai). Entre timing serré à respecter, vannes au cordeau, et tacle politique en référence à l’actualité, le maître de cérémonie réussit un vrai numéro d’équilibriste. L’ambiance, légèrement désinvolte, n’a pas la raideur d’un gala télé : plus familiale et parfois même foutraque. Il en ressort une forme de spontanéité, à mettre sur le compte de la première édition. Seule ombre au tableau : les conversations persistantes pendant les discours.

Des prix attendus

Car qui dit cérémonie, dit récompenses. À ce jeu-là, Les Foudres enchaînent quelques évidences assumées (et parfois méritées). Le Hellfest et Gojira remportent respectivement l’événement et la performance live de l’année. En fin de soirée, Gojira transforme l’essai avec la Foudre d’honneur, qui récompense la trajectoire unique des Landais. Mais ils ne sont pas les seuls à réussir un doublé ce soir : les Marseillais de LANDMVRKS remportent successivement Artiste de l’Année et Album de l’Année, hissant haut les couleurs du metalcore au panthéon hexagonal. Sans grande surprise, le livre Children Of The Sabbath remporte, lui, le prix du projet éditorial. Après la tragique disparition d’Ozzy Osbourne, cette récompense a une résonance toute particulière. Si cette première moitié de trophées consolide une cartographie déjà lisible du metal, elle n’en reste pas moins importante.

Et des surprises salutaires

C’est quand on quitte les catégories reines que la soirée assied sa nécessité. Car dans le metal, “il y a toutes les personnes qui œuvrent aussi dans l’ombre“, explique la twitcheuse Trinity, venue remettre le prix de l’Artwork de l’année, qui revient à Yoann Lossel pour la pochette d’Alcest, Les Chants de l’Aurore. La création audiovisuelle distingue Hotu et Vithia pour Neo Paris de Rise Of The Northstar, un monde stylisé jusqu’à l’obsession qui transpose la rage dans une esthétique manga et béton brut. Côté éthique, l’engagement sociétal et environnemental salue More Women On Stage, remis par Grandma’s Ashes juste après son set. L’intervention d’Ultra Vomit, qui décroche le trophée du plus gros vendeur metal de l’année, fait redescendre le niveau… mais pas le mérite. Au fil des remises, des visages familiers se succèdent pour ouvrir les enveloppes : Norbert “Nono” Krief (Trust), Jean-Michel Labadie et Christian Andreu (Gojira), deux membres de Mass Hysteria et même l’acteur Pio Marmaï en final pour la Foudre d’honneur.

Quatre prestations foudroyantes

Le problème des cérémonies ? On voit défiler des gens, on écoute des discours mais, finalement, l’ennui pointe vite son nez. Les Foudres ont été clairvoyants en intercalant quatre prestations d’une dizaine de minutes entre les remises de prix. Le mérite va plus loin tant chaque groupe donne à voir un visage différent du metal français. Gravekvlt ouvre lourdement la soirée avec un doom teinté de punk. Ray-Ban, jean slim, l’attitude autant que la musique trouvent un écho de l’autre côté de la fosse, avec un circle pit timide qui se forme. Le trio féminin Grandma’s Ashes prend le relais avec un goth rock teinté de stoner qui contraste avec les autres groupes. Aussi dynamique que maîtrisée, c’est certainement la prestation la plus mémorable de la soirée. L’occasion de rappeler que cette scène appartient aussi aux femmes !

REVNOIR, seul groupe récompensé à jouer ce soir, confirme ensuite son statut de révélation du metalcore français. Les refrains hurlés à la sueur et les breaks millimétrés font incroyablement mouche, complétés par une présence scénique plus que rodée. Enfin, Carpenter Brut clôt la soirée en transformant le Bataclan en vidéoclub infernal. Synthés carnassiers, riffs-tronçonneuses, strobe à la sulfateuse, tous les codes du genre sont servis. C’est peut-être le plus beau symbole de cette soirée : le metal est un genre ouvert, hybride et aux nombreux sous-genres. Alors, quand il croise la dark synth sans demander la permission, on danse ou on headbang, c’est au choix !

Verdict final

Après presque trois heures de cérémonie (entractes incluses), le Bataclan doit revenir à la réalité. Si l’on pourra reprocher un léger retard et quelques aléas inhérents aux conditions du direct, cette première édition des Foudres est une réussite. Nécessaire, elle a permis de mettre en lumière un genre, moins marginal qu’on le croit, en récompensant ses artistes mais aussi tous les acteurs qui le font vivre. Après la consécration progressive du Hellfest, la performance mondialement remarquée de Gojira aux Jeux olympiques de Paris, clamons le sans vergogne : en ce 9 octobre, Les Foudres ont apporté leur pierre à l’édifice dans la longue reconnaissance du metal tricolore. À l’année prochaine pour une deuxième édition !

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