
Indochine a posé ses valises pour quatre soirs à guichet fermé à l’Accor Arena. Pour cette soirée d’ouverture de l’Arena Tour, le groupe français signe un show total, entre transe collective et machine à souvenirs. Pendant plus de 2h30, l’Accor Arena a vibré au rythme d’un spectacle aussi immersif que généreux.
Hinds
Ce sont quatre musiciennes madrilènes qui ouvrent la soirée : le groupe HINDS débarque sur scène avec une énergie brute et un son punk assumé. L’esthétique visuel de sa scénographie fait penser à celle des Sex Pistols, avec le titre du dernier album de la formation VIVA HINDS (2024) projeté en grandes lettres déchirées qui claquent comme une revendication. La chanteuse Ana Perrote tente quelques mots en français, confiant l’avoir appris à l’école, ce qui déclenche des sourires attendris dans la salle. Elle prend aussi la parole pour évoquer la difficulté d’être une femme dans l’industrie musicale et dans la société en général. Un message bref, mais fort.
Entre deux salves de guitares saturées, la chanteuse s’installe plusieurs fois au piano, apportant une respiration bienvenue à ce set à la fois nerveux et instinctif. Le public accueille avec chaleur ce que le quatuor a à offrir. Si Hinds est là ce soir, ce n’est pas un hasard : c’est Nicola Sirkis lui-même qui les a personnellement invitées à assurer la première partie. Une collaboration déjà concrétisée sur le morceau “Showtime” du dernier album d’Indochine, Babel Babel (2024)
Indochine
INDOCHINE, c’est un peu notre madeleine de Proust à tous. Un groupe qui traverse les générations, avec bientôt quarante-cinq ans de carrière au compteur. Ils font désormais partie intégrante de notre paysage culturel, et chaque concert reste un plaisir intact, presque rituel. Ce soir, la salle de l’Accor Arena est pleine d’habitués, de fans de la première heure qui arborent le logo de la formation en forme de croix sur des T-shirts, en patchs, en maquillage sur le visage. Le public est transgénérationnel : des familles entières se déplacent, des grands-parents aux petits-enfants. On remarque même un jeune enfant dans la fosse avec une pancarte : “Mon premier concert, c’est ici avec vous !“. Un décor familial et touchant, à l’image d’un groupe intemporel. Ce lundi 17 juin, l’Accor Arena se transforme en capsule immersive, propulsée dans le cœur du Arena Tour 2025, avec un mot d’ordre : démesure.
Un show en trois dimensions
Dès les premières notes de “Showtime”, le décor est planté : Nicola Sirkis entre en scène au clavier, rejoint par les musiciens Oli de Sat (guitare), Marc Eliard (basse), Boris Jardel (guitare) et Ludwig Dahlberg (batterie). Derrière eux, un écran monumental engloutit visuellement la scène, donnant l’impression saisissante que le groupe évolue littéralement à l’intérieur. L”effet est immédiat, presque cinématographique. À mi-chemin entre performance live et installation 3D, ce dispositif propulse l’Arena dans une autre dimension.
Sur “L’Amour Fou ”, des visuels psychédéliques éclatent en motifs kaléidoscopiques, façon hallucination numérique. Plus tard, “Le Chant Des Cygnes” baigne la salle dans un ciel de faisceaux lumineux traversant la salle du sol au plafond, comme si la scène se fondait dans une nuit étoilée. Grâce aux bracelets lumineux remis au public à l’entrée, chacun devient acteur de cette scénographie spectaculaire et enveloppante.
Côté scène, il n’y en a pas une mais trois : une avant-scène circulaire au centre de la salle comme un îlot central, et une scène plus confidentielle au fond de la fosse. Tout est pensé pour que chaque spectateur, peu importe sa place, puisse voir correctement. Entre cette disposition intelligente et le prix des billets plafonné à 75€ pour les plus chers, Indochine rappelle qu’un concert peut encore être à la fois grandiose et accessible. Une rareté précieuse.
Une communion sincère
L’une des particularités d’Indochine est la connexion sincère avec l’auditoire. Dès la première partie du set consacrée à la dernière sortie Babel Babel, les fans chantent, parfois plus fort que le groupe. De “L’Amour Fou” à “Seul Au Paradis”, jusqu’à “Le Chant Des Cygnes”, les titres s’enchaînent sans fausse note. Puis la seconde partie du set fait la part belle aux classiques : “Electrastar”, “Canary Bay”, “Alice & June”, tous joués depuis l’avant-scène centrale dans une ambiance d’euphorie collective.
Lorsque Nicola Sirkis fredonne le début de “J’ai Demandé à la Lune”, l’Arena se transforme en chorale géante de vingt mille voix. C’est un des moments les plus émouvants du show. Sur “Trois Nuits Par Semaine”, le frontman traverse à nouveau la salle, salue les barrières, serre les mains, galvanise les derniers rangs. L’ambiance est à son comble.
Indochine, toujours intemporel
Difficile d’imaginer un autre groupe français avec une telle longévité. À 65 ans, Nicola Sirkis lance avec humour à l’audience : “On est un vieux groupe, proche de la retraite“. Pourtant, tout dans ce concert contredit cette déclaration. Alors que “Trois Nuits Par Semaine” marque l’approche du final, l’Arena chante, Nicola Sirkis traverse la salle de scènes en scènes, saluant les fans aux barrières, échangeant des poignées de mains, déclenchant des vagues d’enthousiasme à chaque pas. L’ambiance est incandescente, portée par un public qui connaît chaque mot, chaque note, et le vit pleinement.
Pour conclure ce set marathon de vingt-huit titres en deux heures trente de temps, la formation se déploie aux quatre coins de l’Arena : Ludwig Dahlberg, Oli de Sat et Marc Eliard prennent place sur l’avant-scène, tandis que Nicola Sirkis et Boris Jardel rejoignent la petite scène située tout au fond de la fosse. Pour s’y rendre, Nicola Sirkis traverse la foule, littéralement porté par une ferveur collective pour atteindre ce dernier îlot scénique. L’assemblée l’accompagne du regard, des cris et des bras tendus. La communion est totale pour interpréter les morceaux “La Vie Est Belle” et “Tes Yeux Noirs” à l’unisson.
Enfin, lorsque retentissent les premières notes de l’incontournable “L’Aventurier” la salle entière se lève d’un seul mouvement. On saute, on hurle, on danse. Un final comme on n’en voit que dans les grands soirs. Puis “En Route Vers le Futur” s’affiche sur l’écran, reprenant tous les visuels du show comme un générique de fin. Et le futur, justement, semble radieux : l’Arena Tour, c’est plus d’un million de spectateurs. Indochine devient le tout premier groupe à franchir ce cap sur le territoire français. Un record historique et une évidence : cette aventure est loin d’être terminée.