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GOJIRA @ Accor Arena (25/02/23)

Après deux reports successifs et une prestation acclamée en clôture du premier week-end du Hellfest 2022, Gojira a pu reprendre le chemin des salles de concerts. Pour la deuxième d’une série de trois dates en France clôturant le Fortitude Tour, les Landais ont vu grand puisqu’ils s’apprêtent à jouer à l’Accor Arena de Paris. Mais rien n’est trop grand ou impressionnant pour le phénomène qu’est devenu Gojira !

Pour vous servir

Ouvrir une soirée n’est jamais facile. Ouvrir un concert pour Gojira, qui plus est dans son pays d’origine, est un défi de taille. EMPLOYED TO SERVE ne se laisse pas débiner pour autant. Menée par la chanteuse Justine Jones, le quintette anglais livre un hardcore classique certes, mais avec une fougue bien réelle ! Riffs saccadés et gros breakdown se succèdent sur fond de growls puissants. Très vite, le manque d’originalité du groupe, couplé à son statisme, commence à se faire ressentir. Le public, déjà en nombre, ne boude pas le plaisir de s’échauffer les esgourdes à coup de metal traditionnel. Quand il ne s’époumone pas à reprendre les paroles de “We Don’t Need You”, il s’essaie avec plus ou moins de réussite à un braveheart. Plus ou moins de réussite, comme cette demie-heure de set.


Traditions ancestrales

20h15, l’obscurité recouvre les milliers de visages de l’Accor Arena. Le batteur d’ALIEN WEAPONRY s’installe derrière ses futs et entame une version revisitée du haka, un rituel traditionnel issu de la culture maorie. Hasard ou caprice artistique ? Aucun des deux ! Originaire de Nouvelle-Zélande, chaque membre possède des ancêtres maoris. Avec un thrash groovy sans concession, le trio s’empare immédiatement de la scène en l’arpentant de long en large. Mais c’est bien vers le chanteur/guitariste que tous les yeux sont rivés. Torse-nu, Lewis de Jong et ses dreadlocks mènent la danse, alternant headbang et riffs acérés. Tantôt clair, tantôt hurlé, le chant en maori insuffle un supplément d’âme tribal, rappelant le charme suranné de Sepultura. Quarante-cinq minutes durant, circle pit, pogos et braveheart se succèdent dans une transe primitive qui fait dignement écho à la musique sauvage mais parfaitement calibrée des Néo-Zélandais. Chapeau bas et merci pour le voyage !

Au sommet !

Après ces deux tours de chauffe, un décompte de cent quatre-vingt secondes s’affiche sur les écrans et fait monter la pression une dernière fois. 10, 9, 8… le public s’époumone déjà avant que l’intro de “Born From One Thing” ne le réduise au silence. Suivent des jets de flammes et un nuage de fumée qui recouvre entièrement la scène. Entrée en matière spectaculaire d’un groupe à l’ascension qui ne l’est pas moins. Comment, en l’espace de dix ans, GOJIRA a-t-il pu passer d’un modeste Bataclan à remplir la deuxième plus grande salle de spectacles de France ? La réponse se trouve sans doute quelque part entre le niveau technique de “Backbone” et les causes fortes défendues sur “Flying Whales”, toutes deux jouées ce soir.

La folie des grandeurs

Tous les fans le savent : chez Gojira, rien n’est laissé au hasard. Cela se confirme encore plus dans la scénographie du concert. De la scène sur trois niveaux aux jets de fumée en passant par les effets pyrotechniques, les Landais s’offrent une vraie plateforme d’expression et un show à la hauteur de leur stature. Derrière eux, un grand écran pose les ambiances en se faisant le relai visuel des thèmes évoqués dans les morceaux. Tout est fait pour sublimer et donner davantage de corps au death metal des Français. En leader charismatique, Joe Duplantier n’a pourtant pas besoin des nouvelles technologies pour communier avec son auditoire. Sur “The Cell”, il invite d’ailleurs à “ranger son téléphone pour se connecter au moment présent“. Sur l’hymne “The Chant”, il devient le chef d’orchestre d’une assemblée qui montre qu’elle sait aussi chanter, et pas seulement se perdre corps et âme dans des marées humaines de pogos.

Septième du nom

Des belles accalmies de “Grind” aux riffs hypnotiques de “Another World”, la setlist fait la part belle à Fortitude (2021). Clé de voûte de l’engagement écologique du quatuor, ce disque dévoile un visage musical moins extrême mais plus mature et sophistiqué. Sans surprise, “Amazonia” et son ambiance tribale font un effet coup de poing auprès de l’assistance. L’après rappel n’est pas en reste : les mélodies de “New Found” et le tapping stratosphérique de “The Gift Of Guilt” vont rester longtemps dans les esprits. Dernière image : le flot de slammeurs remonte vers la scène, comme une marée haute qui ramènerait les derniers corps. La boucle est bouclée, il est temps de partir, encore faut-il le vouloir ! Après presque deux heures de set, Gojira reste un long moment sur scène pour remercier le public et les premières parties. Eux non plus ne veulent pas que ce moment se termine.

Ineffable sensation

Expérience spirituelle et quasi-mystique, voilà comment un set de Gojira pourrait être décrit et devrait être vécu. Si le son n’a pas toujours rendu justice à la richesse musicale du quatuor – grande salle oblige – la prestation des Français a été plus qu’à la hauteur. Elle a, à dire vrai, même terminé d’ancrer le présage qui se dessine depuis la sortie de Fortitude. Celui que Gojira joue définitivement dans la cour des très grands. Et que rien ni personne ne pourra freiner ou arrêter l’ascension (méritée) des Landais !

Gojira Setlist Accor Arena, Paris, France 2023, Fortitude