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BLEACHED @ Supersonic (27/05/16)

Après un concert initialement prévu au Badaboum, c’est finalement au bar à concerts/club parisien au design ultra-léché, le Supersonic, que les punkeuses californiennes de Bleached ont défendu leur tout nouvel album, “Welcome The Worms”.

Concert gratuit dans un bar oblige, la salle est plutôt clairsemée quand les Parisiens de DEAF PREACHERS grimpent sur scène. Mais peu importe, les quatre musiciens entament leur set avec un enthousiasme rafraichissant. Un beat frénétique et des riffs incisifs viennent compléter le tableau d’un garage rock rentre dedans. La voix, brute, va comme un gant aux morceaux, et le tout est admirablement maîtrisé.

STATIC KING, autre formation parisienne, calme le jeu en imposant son rock n’roll aux influences blues à une salle qui s’est bien remplie entre-temps. Si le groupe se fait relativement discret niveau scénique, il parvient à dégager une intensité captivante sans trop d’efforts, portée par une voix rauque et des riffs aiguisés sentant bon l’Amérique. Les garçons ont écouté Black Rebel Motorcycle Club, et ça s’entend. Une double entrée en matière plus que satisfaisante, qui laisse apercevoir un avenir réjouissant pour la scène rock française.

Les deux premiers sets ont fait défiler le temps rapidement, mais c’est tout de même le soulagement quand les trois filles de BLEACHED, accompagné de leur batteur, investissent enfin la scène du Supersonic, à 23h. La salle est désormais pleine à craquer et les premières notes de “Trying To Lose Myself Again” suffisent à faire remuer les rangs. Jennifer Clavin, au micro, est animée d’une fougue exaltante, tandis que sa sœur Jessica et Micayla Grace grattent les cordes de leurs instruments saturés sans relâche. Les trois musiciennes enchaînent avec le single délicieusement efficace “Keep On Keepin’ On” puis embrayent sur le plus pop “Wednesday Night Melody” et l’énervé “Sleepwalking”, tous extrait du dernier album, “Welcome The Worms”. Les morceaux ont beau être encore tout récents, ils sont parfaitement maîtrisés et le punk édulcoré de la formation de Los Angeles nous transporte au bord du Pacifique. Un départ sur les chapeaux de roues qui met le nouvel album à l’honneur. Mais Jennifer Clavin, soulagée de sa guitare, renchérit dans l’énergie, au détriment de sa voix. Elle s’essouffle vite et sa voix n’est pas toujours très juste et parfois à peine audible sous les riffs acérés de ses copines. Les morceaux perdent énormément de puissance et le tout devient quelque peu incolore.

Les morceaux s’enchaînent et quelques titres plus anciens (“Searching Through The Past”, “Think Of You”, “Electric Chair”) se trouvent une place dans la setlist, sans pour autant réussir à créer de réel sursaut sur scène ou dans la foule. Les mélodies ensoleillées et acidulées du groupe rappellent toujours autant les années 90, impression renforcée par les looks vintage et les cheveux fluo des sœurs Clavin. Les évocations pop grunge des années 90 atteignent leur apogée sur “Dead In Your Head”. Bleached offre une magnifique version rallongée du morceau, qui voit Jennifer Clavin lâcher son micro pour prendre place à la batterie, tandis que Nick Pillot, chassé de derrière ses fûts, récupère la guitare de la chanteuse. Les Californiens se font plaisir – et font plaisir à tout le monde – en partant dans un trip instrumental réjouissant. Micayla Grace finit dans le public, qui pogote joyeusement. C’est dans ces moments de déchainement bouillonnant, où les guitares s’enchevêtrent que le groupe brille le plus. La frénésie du morceau semble leur avoir fait du bien puisqu’ils enchainent ensuite en infligeant un gros coup de soleil au punk glauque de Misfits en reprenant “Hybrid Moments” à leur sauce punk bubblegum. Après un dernier morceau, les quatre musiciens quittent la scène avec de timides mercis, aussi souriants qu’hors d’haleine.

Entre un début prometteur et plus que convainquant et un final envolé étourdissant, les Californiens s’empêtrent dans un épisode délavé et monotone, à mille kilomètres de la fougue insouciante caractéristique de Bleached. Faute à une setlist mal pensée ou à un groupe éreinté, le combo délivre un concert en demi-teinte. Cependant, les morceaux du dernier album fonctionnent très bien sur scène et la formation n’hésite pas à mettre toutes ses tripes dans ses performances. Ses mélodies lumineuses transpirent les bonnes vibes californiennes, et ça, ça fait forcément du bien.