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VIZA (19/10/12)

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Quelques heures avant de monter sur scène en ouverture de Serj Tankian au Zenith De Paris, RYL! a eu le plaisir de rencontrer trois membres du groupe Viza !

Bonjour! Comment allez-vous aujourd’hui ? Heureux d’être de retour à Paris ?

Andrew Kzirian (oud) : Oui, nous sommes très contents d’être ici à nouveau.

Knoup Tomopoulos (chant) : Paris est toujours top. J’attends demain avec impatience pour faire un tour en ville, comme à chaque fois.

Comment se passe votre tournée pour le moment ?

K : La tournée se passe très bien. Nous avons visité de nouvelles villes, dont trois dates au Royaume-Uni. Nous faisons beaucoup de nouvelles connaissances ainsi que de fans, et il n’y a rien de plus qu’on puisse demander en tant que groupe. Sur la route, visitant différents endroits, notre réseau s’étendant un peu plus, on le fait plutôt bien ces temps-ci.

A : C’est une excellente expérience que de rencontrer tout ce beau monde. Nous adorons partager notre art et quel meilleur moyen que de partir en tournée ? Surtout avec quelqu’un comme Serj. C’est une grande expérience pour nous, cela nous aide à grandir en tant que personne mais également en tant que musicien, donc c’est très cool.

 

Vous voilà, à nouveau, en tournée avec Serj, comment avez-vous appris que vous alliez prendre part à sa tournée européenne ?

A : C’était assez marrant comme histoire. On faisait beaucoup de promo au Royaume-Uni et via notre attaché de presse, il s’est passé pas mal de trucs, et je pense que c’était quelque chose d’important pour nous, d’être disponible pour cette tournée, montrant ainsi qu’on est très actif. Je veux dire, qu’on est un groupe bossant à fond, avec beaucoup d’allant, nous faisons tout nous-mêmes et nous avons appris que cette tournée était programmée, un soir à Londres avant un show; nous avons appris qu’on allait en faire partie. Ce n’était pas très sur, mais au final, à peine une tournée de finie que celle-ci a commencé en août dernier.

A propos de Serj, avez-vous écouté “Harakiri” ? Quel est ton avis sur ce disque ?

K : Je pense que cela révèle un nouveau niveau de son habilité à composer de la musique pour ceux qui sont hors du système. Ce n’est pas un album rock, au sens traditionnel, comme ses autres projets d’ailleurs. Personnellement, j’aime beaucoup cet album pour la simple raison qu’il y a de très bonnes chansons, comme “Harakiri” et “Ching Chime” par exemple. C’est une sorte d’opposition vis-à-vis de l’album “Elect The Dead”, qui est également un fantastique opus. Il y a beaucoup de sagesse vis-à-vis de ses propos. Il aborde des sujets très terre à terre, que certains artistes voulaient faire malgré les plannings de chacun. II a senti le besoin d’attirer l’attention sur le fait que l’on vit sur la planète Terre et que celle-ci est fragile. Il traite ainsi de ce sujet, et c’est plutôt réussi.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Viza, pouvez-vous nous présenter le groupe ?

A : Oui, bien entendu ! J’aime dire qu’on est sept musiciens, jouant une musique de fou et cela se reflète vraiment via nos prestations lives. Ceux-ci font grandement parti de notre identité; c’est une façon pour nous de partager notre matière artistique, présenter nos compositions, notre énergie de groupe, à la façon d’une famille. Ce que nous faisons est plutôt unique en son genre, avec des éléments rock et metal mixés aux influences orientales venant d’Arménie et de Grèce, et bien même de la culture latine, vu que notre batteur est de Porto Rico. Lorsque tu mélanges tout cela, tu obtiens Viza; et comme le disent beaucoup de personne, notre son n’est pas courant montrant ainsi que nous créons quelque chose de nouveau et de frais. Lorsqu’ils écoutent notre musique, ils peuvent se dire “regarde, c’est quoi ce truc ?”. En tant qu’artiste, c’est très gratifiant d’observer la façon dont nous communiquons ensemble.

K : La musique est, selon moi, sept gars jouant de leurs origines, qu’elles soient grecques, arméniennes ou russes. La musique orientale est leurs racines, ce avec quoi nous avons grandi et cela se traduit via notre travail; et j’aime à penser que nos prestations sont épiques et très théâtrales. De plus, j’aime à croire qu’on essaye de ramener l’”arena rock”, qui était jadis omniprésent, alors que de nos jours, le rock est considéré comme un show quelconque, nous avons oublié qu’il y a eu Def Leppard, Queen, Led Zeppelin.

A : KISS !

K : KISS; ses gros shows et s’il y a bien une chose dont j’ai envie avec ce groupe, c’est un immense concert, le plus grand sera le mieux !

A : Et vous en attesterez ce soir !

 

Cette question peut paraitre un peu naze, mais à vos débuts, Viza s’écrivait avec un S, remplacé maintenant par un Z, pourquoi donc ?

A : Pour faire simple, les deux derniers albums du groupe, “Made In Chernobyl” et “Carnivalia” ont marqué une évolution significative de notre son. Nous avons certes gardé nos racines avec les éléments ethniques traditionnels et tout, ces deux albums sont plus agressifs tout en gardant notre propre style. Donc le Z évoque ce changement de cap dans notre musique.

Votre dernier album “Carnivalia” est sorti l’année dernière. Avec ce recul, qu’en penses-tu au final ?

K : C’est comme un nouvel enfant. Les critiques étaient très bonnes; il y aura toujours des fans disant “Je suis fan de “Chernobyl” mais un peu moins de “Carnivalia””, tu ne peux plaire à tout le monde. Dans un premier temps tu te satisfais toi-même, quand tu fais ton boulot. Je suis très content avec cet opus, avec cette expérience; nous l’avons enregistré au Frank Zappa Studio, ce qui n’était pas simplement un immense plaisir mais également une grande source d’inspiration. Tout le monde a apprécié; je reçois beaucoup d’e-mails, les autres aussi, de la part de nos fans. C’est un album différent, où ira le prochain, qui sait ? Mais “Carnivalia” est un bon album.

A : Puis-je ajouter quelque chose ? Avec “Carnivalia”, puisque nous l’avons composé après notre première véritable tournée, il reflète ainsi nos expériences. Nous sommes des musiciens mais nous avons commencé à voyager et partager, il est donc intéressant de se produire autant après l’album; celui-ci résulte également de nos tournées, comme si cela reflétait notre image, ce qui est plutôt cool.

Votre style musical évolue depuis vos débuts. Etait-ce naturel ? Avez-vous senti le besoin de changer ou c’était plutôt une évolution ?

Hiram Rosario (batterie) : Quand tu composes un album, pour avoir joué de nombreuses années ensemble, tu évolues naturellement en tant que musicien et tu commences également à comprendre le style de chacun; c’est ce qui ressort des chansons que tu écris, donc je veux dire que l’album a évolué depuis le tout premier. En se connaissant mieux, en passant plus du temps ensemble, nos amitiés et nos musiques se combinent, résultant de cette façon.

A : Garde le micro pour la prochaine question. (rires)

 

A ce propos, comment avez-vous été introduit à la musique ? Qu’est-ce qui vous a convaincu de faire de la musique votre gagne pain ?

K : Personnellement, la musique fut un appel sentimental. Quand j’étais plus jeune, j’ai été confronté à la musique via ma famille, je pense que j’avais sept ans, quand j’ai commencé à jouer de la trompette dans un orchestre.

A : (ndlr : riant et imitant le son d’une trompette)

K : Et c’était fun à vrai dire, ainsi plus tard, en raison de ma passion pour la guitare, j’ai découvert le rock et ce fut le déclic. C’était instinctif “je veux faire ca, je veux monter sur scène, je veux faire comme Bono, comme Freddie Mercury”, et j’y ai cru; ce n’était pas de simples mots écrits sur un coin de table genre “je pense que je veux faire ça”, non, c’était immédiat. Un jour, après m’être réveillé, je me suis dis “je veux faire de la musique jusqu’à ma mort, je ne peux imaginer faire autre chose”. Ce combat fut un long périple, avec plus d’échecs que de réussites, surtout au début lorsque tu te cherches encore en tant qu’artiste. Tu rencontres tellement de monde, surtout de là où je viens. Tout le monde voulait que je sois avocat, médecin, ingénieur, pas spécifiquement chanteur. De ce fait, toutes ces années de galère auront valu la peine d’être vécus, au vue de ma situation actuelle. Etre ici à Paris, je ne pensais jamais jouer au Zenith De Paris, et me voilà, c’est un grand plaisir et je suis honoré par cela.

A : Mon parcours est très, très différent. J’ai toujours grandi jouant de la musique, en raison de ma famille, composée d’artistes et de musiciens. J’ai toujours joué de la musique arménienne et américaine également. Mais la pression familiale, comme le dit Knoup… Je suis avocat, c’est ce que je suis au final, mais en intégrant Viza, ce fut une grande opportunité et je m’y suis retrouvé, déployant ma créativité et mes touches artistiques qui étaient enfouis en moi et que j’ai pu sortir plus librement. Donc c’est arrivé bien plus tard chez moi, “mieux vaut tard que jamais”, et c’est génial de travailler avec eux, c’est comme la famille en fait; bien qu’on peut se battre de temps en temps, il s’avère que tout va bien en fin de la journée. Cela aide également à créer notre musique. Hiram, qu’en est-il de toi ?

H : Je ne savais pas du tout ce que je voulais faire. Tout gosse pense à devenir pompier ou policier.

A : (rires)

H : Quelque chose de ce type “oui c’est ce que j’ai envie de faire” (ndlr : imitant un enfant). Mais au final, en grandissant, la musique a été quelque chose de très présent dans mon foyer, de sept heures du matin à minuit, que ce soit à la TV, à la radio, ou mon père jouant de la guitare et chantant en même temps; c’était toujours très présent autour de moi, c’est venu naturellement. Je suis très heureux d’avoir ce soutien de leur part, ils me disaient “si tu es content avec, alors tu es content, c’est tout”. Et maintenant je suis à Paris et c’est fantastique.

Lorsque l’on jette un œil à l’illustration, faite par Ari Roussimoff, pouvons-nous dire que cela reflète bien votre univers musical ?

K : Oui, tout à fait. La minute où je suis tombé sur son travail, via ce magnifique outil qu’est internet, c’est incroyable comme tu n’as plus besoin de sortir de chez toi, pour aller au musée par exemple. J’ai donc vu son travail et j’ai tout de suite su qu’il fallait qu’il représente un de nos albums, peu importe comment; car ses différents choix, reflètent parfaitement ce que j’ai voulu transmettre via “Carnivalia”. Il incarne parfaitement ce melting pot avec son travail et pas seulement pour l’album. Si tu observes ses autres réalisations, il en créé de si différents, un peu comme une sombre version de “Sesame Street”, très enfantin.

A : Oui, c’est une sorte de show pour enfants.

K : Et il a cette touche enfantine. Ce type est un génie, ce fut un privilège de travailler avec lui.

Y-a-t-il une possibilité de voir un album plus sombre, comparé à “Carnivalia”. Quelque chose de vraiment fort et lourd à la fois, par exemple.

K : C’est plutôt marrant que tu dises cela, car nous en avons parlé récemment. Nous avons fait le coté intense et fou de Viza, sans avoir touché à la noirceur. Le seul souci, c’est que nous essayons de transmettre nos vies et nos quotidiens, c’est notre reflet. Et nous voilà, s’interrogeant sur l’éventualité de composer un album plus sombre; mais avec tous ces sourires et cette joie, on ne peut pas se forcer. Le meilleur moyen d’écrire quelque chose d’obscur est lorsque tu vis une situation pénible, touchant le fond et quand tes émotions sont très atteintes et que c’est à ce moment là que tu dois écrire à ce moment là. Heureusement qu’on peut y arriver sans sombrer psychologiquement. Je suis plutôt fan de musique “dark” et j’aimerais beaucoup voir ce que cela donnerait avec le groupe.

H : (ndlr : 15 secondes plus tard), carrément.

(rire général)

 

Avez-vous déjà pensé à explorer la face cachée de la musique orientale ? Qui est souvent triste et pleine de mélancolie.

A : Excellente question, je suis d’ailleurs content que tu la poses, car cela correspond parfaitement à Viza. Beaucoup de nos titres essaient d’aborder ce coté là, mais c’est clairement une facette à approfondir et j’ai hâte de le faire; parallèlement à la question précédente, où tu parlais d’une musique plus sombre et heavy avec ce coté là de la musique orientale. Je trouve ca génial car tu ne retrouves pas la même qualité dans cette voie là, comparé à notre coté lumineux; qui a ses avantages et ses qualités, mais il y a un autre ressentiment, surtout via la musique orientale. Par exemple, quand je joue, j’utilise différentes tonalités, car je n’ai pas de fret sur mon instrument, et cela ajoute une saveur particulière à la musique, que tu ne peux avoir avec une guitare ou un clavier. Une nouvelle fois, cela vit en Viza et j’espère qu’on le fera plus tout bientôt.

Vous avez récemment sorti un single, reprenant “Alabama Song (Whisky Bar)”, pourquoi ce choix et qui a eu l’idée ?

K : Nous avons écouté The Doors, et je pense que de l’avoir écouté toutes ses années, après avoir atterri dans mon iPod et j’étais “wow, il y a un peu de Viza là”. Et je me souviens donc, l’avoir amené au studio en disant “hey les gars, et si on faisait une reprise ? “, On lui a donné une chance, c’était 50/50, pour y apporter la touche Viza. L’originale était plus loungy et on lui a apporté un peu d’Oomph! !

A : Ah oui !

K : Apportant un brin de vie, tout en respectant l’original qui fut celle de…

A : Curt Weill. The Doors a repris son titre.

K : C’était une comédie musicale et The Doors l’a rendu populaire. Mais je l’ai amené au studio, les gars l’ont pris, nous l’avons revisité et tada ! J’espère que vous avez tous aimé.

A : Une chose que j’adore particulièrement dans cette chanson est que Viza en a fait sa version, en y ajoutant un brin d’électro, et j’adore ca. Avec cette excentricité, cela rend le titre encore plus Viza.

Prévoyez-vous d’autres reprises ?

A : Oui… je veux dire que c’est au feeling. Si le temps est propice pourquoi pas, mais ce n’est pas quelque chose que nous faisons tous les jours.

Bien que votre dernier album soit sorti en fin d’année dernière, de nouveaux projets ?

H : De nouveaux albums ?

Peu importe.

H : Honnêtement, nous avons tellement tourné cette année, que nous n’avons pas eu l’occasion d’écrire quoique ce soit. Les idées sont là, mais nous n’avons pas encore mis tout ça à plat, ce qui sera la prochaine étape. A partir du moment où nous serons rentrés, le studio nous attend et les séances d’écriture vont démarrer. Puis nous reviendrons avec du nouveau matos.

 

Il est pratiquement 16 heures, il reste encore pas mal de temps avec le show, comment vous occupez-vous avant une prestation ?

K : Hmm…

H : Donner des interviews. (rires)

K : J’aime rester calme, zen, communiquant au strict minimum, et arrivera ce qui arrivera sur scène. Je m’échauffe, je prends un thé voir un shot, mais la plus difficile des choses est de tous se retrouver avant de monter sur scène. C’est du style “bon il manque qui ?”.

Avez-vous eu le temps de visiter la ville aujourd’hui ?

K : Pas aujourd’hui, mais je prévois ca pour demain. J’ai visité Paris plusieurs fois déjà, en raison de nos différents shows ici.

A : En effet, c’est notre quatrième passage à Paris.

K : Oui, la quatrième fois. Donc j’ai pu me balader.

A : Bataclan, Divan Du Monde et Zenith.

K : Yann ici présent, nous a dévoilé les rues de Paris. C’est évidemment l’une des plus belles villes au monde, comme précisé dans les guides touristiques. (rires)

H : Le quartier rouge.

(Knoup et Andrew rient)

A : Pas bien Hiram, pas bien.

K : C’était Hiram.

Yann (notre photographe) : Vous êtes actuellement dans le quartier rouge en fait.

(rires)

A : Oh non, pourquoi l’as tu dis ?

H : Nous reviendrons ce soir !

Y : Après le show, je vous y emmène. (rires)

Avant de conclure, un message pour les fans français ?

A : Les concerts à Paris étaient une incroyable expérience. Je sais que les autres membres ont toujours une folle envie lorsqu’ils jouent en France. A chaque fois, le public est au rendez-vous, super chaleureux et accueillant; certains nous ont même amené des crêpes ! Tout le monde est si gentil, c’est vraiment sympa et nous apprécions beaucoup car l’une des choses importante pour nous, c’est de rencontrer nos fans. Cette dynamique est très présente ici et on adore ça. On attend avec impatience le concert de ce soir et nous voulons impérativement revenir. C’est toujours un moment spécial de passer par ici lors de nos tournées européennes. Beaucoup de choses à venir avec Viza ! Soyez là !

K : Je l’ai déjà dis et je le dirais encore : Paris est notre seconde maison.

H : Exact, j’approuve ! Si j’avais les moyens de vivre ici, je m’installerais direct ! Ma femme est franco-canadienne, donc elle connait parfaitement la langue; elle ne m’a rien appris d’ailleurs, mais nous verrons. C’est magnifique ici.

 

Et comme toujours, à la fin de chaque interview, nous posons la traditionnelle question. Nous sommes “RockYourLife!”, donc tout simplement, qu’est-ce qui rock votre existence ?

K : La vie. La vie, sérieusement. La plus importante des choses est d’avoir la santé. Si tu es en bonne santé, tu peux faire ce que tu veux et tu peux rocker aussi longtemps que tu le souhaites. Si tu ne l’es pas, rien ne t’intéressera comme l’argent et les femmes, les choses superficielles de la vie. Me concernant, la vie est le leitmotiv pour rocker sa vie.

A : L’énergie positive, c’est la clé de toute chose.

(Hiram veut ajouter quelques mots, alors que Knoup lui demande)

K : La batterie ? (rires)

H : Pour ma part, c’est l’énergie des fans, j’adore, pas seulement durant les concerts, mais les rencontres également, signer des trucs, prendre des photos, ça rock carrément ma vie, parce que je suis un type normal et qu’ils me traitent comme un peu plus que ça, c’est très gratifiant.

 

 

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