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ROYAL TUSK (10/05/19)

English version

C’est quelques heures avant leur concert avec Monster Truck que nous avons rencontré Daniel et Sandy de Royal Tusk. Et on en a appris pas mal sur cet autre groupe canadien !

Salut les gars, comment allez-vous ? C’est votre première en France ce soir ?

Daniel Carriere (chant/guitare) : En tant que groupe oui. Quoique attends, c’est la première ?

Sandy MacKinnon (basse) : On a déjà été à Calais.

Daniel : C’était en 2017, en fait on avait une tournée au Royaume-Uni et en Allemagne, donc on était seulement de passage. Mais ce soir, c’est bien notre première en France !

Comment se passe la tournée jusqu’à présent ?

Sandy : Que demander de plus ? C’est un très beau plateau, on est tous potes, que ce soit les groupes ou nos équipes, et puis on se connait depuis si longtemps. Chaque soir on essaie de se mettre au niveau, d’être meilleur et de prendre du plaisir.

Daniel : Le public est excellent. On prend beaucoup de plaisir en Europe. Ils démontrent beaucoup d’enthousiasme à notre égard et ça fait vraiment plaisir.

Pouvez-vous nous présenter Royal Tusk ? On ne vous connait pas tant que ça ici.

Daniel : On est donc Royal Tusk. Sandy et moi-même sommes amis depuis très longtemps. On jouait dans la même équipe de foot quand on était gamin, c’est dire. Son frère jouait dans un groupe, donc on se devait de former un groupe aussi. On a joué dans des groupes de punk puis nous avons formé Royal Tusk. Depuis, il ne s’agit que de rock n’roll. L’essence de Royal Tusk est de délivrer une musique honnête, rien de superficiel.

Vous mettez en avant le fait de venir de familles de col bleu. Pourquoi mettre une pareille chose autant en avant ? Ça semble vous tenir à cœur.

Sandy : De là où on vient du Canada, en gros il n’y vraiment rien. C’est un peu le Texas du Canada. Quasi tout le monde travaille dans l’industrie pétrolière. Il y a les villes où les gens détiennent ces entreprises et les villes où les gens travaillent dans ces entreprises. On a grandi dans ce second cadre.

Daniel : On vient d’une ville (Edmonton) où ça bosse beaucoup, ça bouge beaucoup et où la sphère culturelle est plutôt intéressante. Les gens ont sans doute le besoin de s’exprimer, de plus ici tu n’as parfois pas besoin d’aller à la fac pour trouver un bon travail qui paie bien. C’est assez intéressant et curieux.

Sandy : Ceci dit, tu peux aussi voir la misère et beaucoup de drogués. Nous sommes si isolés, trop au nord, il fait très froid.

Daniel : C’est un endroit intéressant et on l’adore tous. En raison de ce cadre, il y a aussi un clivage entre ceux qui gagnent bien leurs vies et ceux qui s’en foutent royalement des arts, c’est assez spécial de vivre entre les deux.

L’année dernière, vous avez sorti un nouvel album “Tusk II”. En écoutant votre premier album et votre EP, celui-ci est très différent. Même le style de rock est différent. Comment l’expliquer vous ? Ça en est presque choquant.

Daniel : Lorsqu’on a fait notre premier album, on était dans tout ce qui était groovy et aujourd’hui, nous voulions faire quelque chose de plus agressif. On le sentait comme ça, ça ne s’explique parfois pas. Peut-être que le climat social et politique a suscité en nous frustration et colère et on a mis ça sur la table en faisant l’album. De plus, on a toujours aimé le heavy et on prenait simplement du plaisir à jouer de cette façon. Des tonalités plus heavy, des sons lourds etc. On voulait capter ce moment et c’est tout simplement ce qu’il se passait à cet instant T.

Sandy : On ne s’est pas dit d’écrire une musique plus lourde consciemment. C’est venu assez naturellement et on en est plutôt fier.

Du coup, pourquoi vos premières sorties étaient plus soft disons ? Elles sont plutôt uniques.

Daniel : Je ne peux pas parler pour Sandy mais je pense qu’il sera d’accord de dire que lorsqu’il s’agit de musique, notre unique but est de composer de bons morceaux. Un bon morceau peut venir d’un groupe de black metal, un rappeur ou même de Bob Dylan. On était uniquement concentré là dessus. Néanmoins, les musiciens avec lesquelles nous jouions, chacun ayant ses propres influences, il est possible que l’association de celles-ci ait créer une musique plutôt indie rock. Mais c’est avant tout les chansons, comme ont fait les Beatles.

Sandy : De plus, depuis notre EP, la seule constante dans le groupe est Daniel et moi. Les autres musiciens ont changés. Donc c’est tout à fait naturel que le son évolue au fil des années et des personnes.

C’est davantage axé sur les riffs, plus lourd et la voix aussi alterne entre le clair et le crié. Comment ont réagi vos fans ?

Daniel : Tu sais quoi ? Positivement, pour la plupart en tout cas. Le premier album avait clairement plus de chansons d’amour. Mais là, toi-même tu peux dire, tu l’as écouté, il dure trente-cinq minutes et c’est rentre-dedans. Peut-être que certains s’attendaient à une ballade ou quoi, peut-être qu’à l’avenir il y en aura, mais à cet instant, on était énervé, on ne se sentait pas d’évoquer l’amour ou des émotions de cette sorte.

Comment travaillez-vous/composez-vous ?

Daniel : On fait beaucoup de démos mais on cherche toujours à composer à partir d’une idée forte. Dès qu’on se sent inspiré, il faut vite capturer ça. Donc en répétition, quand on joue quelque chose de vraiment cool et inspirant, on s’enregistre sans tarder. Par la suite tout devient plus simple, on prend cinq minutes pour les arrangements et ensuite les paroles, il te suffit d’écouter la musique et les mots viendront à toi. On estime qu’un titre est bon s’il nous excite, s’il nous parle. Si c’est seulement OK, alors on laisse de côté. On veut que ce soit extra, pas seulement bon.

Vous est-il arrivé de reprendre d’anciennes démos qui n’ont pas vue le jour sur des disques précédents ?

Sandy : A vrai dire oui, “Northern Town” devait apparaître sur “DealBreaker” (2016) mais ce ne fut pas le cas au final. Mais là, elle est bien sur le deuxième album.

Daniel : On jette toujours un œil à l’ensemble de nos riffs et idées. Rien que pour cet album, on avait entre vingt et trente morceaux, au final on en a enregistré dix. Rien qu’hier, on a enregistré une idée durant nos balances. Dès qu’on se sent inspiré, il faut impérativement capter ça. Car lorsque tu ne l’es pas, ça se sent, tu essaies de copier quelque chose, et c’est forcément moins bon.

Sandy : Ça s’entend aussi et les gens ne vont pas apprécier cela.

Daniel : Tu peux même élaborer un superbe morceau mais si au fond, la base du morceau n’est pas sincère, alors ça se verra. C’est comme si tu compares une belle femme et un mannequin, la différence est là.

Si on dit de vous que vous êtes un groupe canadien sonnant tel un groupe de rock US, ça vous va ?

Daniel & Sandy: Bien sûr !

Daniel : L’idée de cataloguer les groupes, c’est pour la presse et les fans. Nous, on veut simplement faire de la musique. Evidemment ça fait plaisir d’entendre ça, de plus, il n’y a pas tant de groupes canadiens qui sonnent comme des groupes US. Ah si, Three Days Grace peut-être, mais tu n’en trouveras pas des masses.

Sandy : C’est marrant car même les gros groupes canadiens qui en vivent, sonnent parfois comme des groupes américains. Mais peu importe oui. Prends Danko Jones par exemple, il marche bien ici et pourtant il ne tourne quasi plus au Canada.


Et côté paroles, quelles thématiques abordez-vous ? Que souhaitez-vous partager ?

Daniel : Prenons le premier single “Aftermath”. Il fait référence aux fusillades de masse d’une part, mais aussi le public qui subit et accepte à contre-cœur cette violence et la frustration qui en découle. On n’est pas des politiciens mais je trouve ça incroyablement difficile de se réveiller tous les matins et d’apprendre tel ou tel événement, alors que c’est un jour ordinaire. Comme ce qui est arrivé au Bataclan ou ces boites de nuit aux US, peu importe le jour en fait. Et que fait-on ? On continue comme si de rien. C’est déroutant et horrible à la fois. Le monde continue alors qu’il ne devrait pas ! C’est ce sentiment là que je souhaitais aborder. Nous, individus, que faire face à cela ?

Sandy : Tous les jours, tu te réveilles et tu check ton téléphone et t’y vois des trucs horribles. Comment ne pas s’arrêter ?

Daniel : Combattre ce dilemme. Autre chose aussi, l’un des critères que l’on utilise pour s’évaluer est notre richesse. C’est une idée tout à fait détestable mais le système est fait ainsi malheureusement. Il y a ce type, qui voulait être comme nous, avoir et jouer dans un groupe. Il a démangé plus au nord pour aller travailler dans l’industrie pétrolière car, depuis petit, sans ça, il pensait qu’il ne vaudrait rien et qu’il fallait qu’il gagne de l’argent. Entre temps, il quitte ses proches et en se regardant il se demande : “mais n’y avait-il rien de plus précieux ?”. Ce sont des thématiques telles que celles-ci que nous abordons. Ou bien, comme avec “Control”, on y évoque les crimes sexuels qui prennent place au sein de l’Eglise Catholique. Le fait d’utiliser la foi pour contrôler des gens. Personnellement je ne hais pas la religion, mais je suis contre toute forme de manipulation, surtout à des fins financières.

Sandy : On n’essaie pas de prêcher quoique ce soit. C’est simplement ce que l’on ressent à un instant donné et l’envie de les évoquer. On ne dit pas si telle ou telle chose est bonne ou mauvaise. C’est à chacun et chacune de se faire sa propre opinion par la suite.

Daniel : Notre boulot c’est de transmettre ces émotions, car nous avons tous en nous, ces émotions. On ne cherche pas à influencer les gens. Si j’avais la réponse, alors je ferais sans doute autre chose. La meilleure chose que je puisse faire c’est d’attirer l’attention sur ces sujets et peut-être que cela en touchera quelques unes et ça aurait un rôle positif à leur encontre.

Autrement, comment connaissez-vous les gars de Monster Truck ?

Sandy : Avec Daniel, on a joué dans tellement de groupes. C’est pareil pour Steve et Jeremy de Monster Truck, ils faisaient pareils et ils étaient pas mal en tournée. On a joué pas mal de concerts ensemble. On se connait depuis plus de dix ans !

Daniel : De toute évidence on les a croisé ici au Canada et ça fait un bail qu’on les connait ! Lorsqu’on a eu l’opportunité de venir avec eux, on n’a pas hésité une seule seconde. Ce n’est pas seulement un excellent groupe, ce sont aussi de très bons amis.

Sandy comment gères-tu cette histoire avec Marv’ de Monster Truck ? Comme quoi tu serais son sosie et vice versa. (rires)

Sandy : C’est plutôt fun. (rires) T’as vu la photo avec les lunettes. (rires) On ne devait pas être bien sobre au moment de cette photo d’ailleurs. (rires)

Enfin, nous sommes “RockUrLife” donc qu’est-ce qui rock la life de Daniel et Sandy de Royal Tusk ?

Daniel : Je dirais ma petite amie, qui est française. Et mon chien qui m’attend à la maison. (rires)

Sandy : Oui, ma copine, les chiens, regarder la NFL, écouter des albums, c’est ma définition du paradis pour moi !

Etes-vous aussi fan de hockey ?

Sandy : Oh yeah ! Mais les mecs de Monster Truck supportent des équipes que je hais. (rires) Et je leur dis tous les jours d’ailleurs, et eux me disent que l’équipe que je soutiens et la pire de toute la ligue. C’est dur à entendre car c’est plutôt vrai. (rires)

Daniel : Tu choisis toujours des équipes de loosers.

Sandy : Eh oui, je sais. Ce n’est d’ailleurs pas toujours évident.

Site web : royaltusk.com