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GODSMACK (21/06/19)

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Interviewer les Américains de Godsmack n’est pas un mince exploit au vu de la rareté de leur venue en Europe, et notamment en France. Et c’est à peine une paire d’heures après leur show au Hellfest que le sympathique et bavard batteur Shannon Larkin (également Ugly Kid Joe) – qui sera rejoint par Sully Erna (chant/guitare/batterie) – s’entretient avec nous sur le septième album “When Legends Rise” (2018) avec la promesse d’être enfin plus présent sur notre Vieux Continent !

Un mot sur votre concert qui viens de se terminer ainsi que sur la réception du public ?

Shannon Larkin (batterie) : On a eu un set superbe. On est monté sur scène à 3h de l’après-midi, ce qui est différent et inhabituel pour nous bien évidemment, et je ne m’attendais pas à ne serait-ce que la moitié des personnes qui étaient là. Je ne savais pas à quoi m’attendre, et lorsqu’on est montés sur scène, wow ! Une véritable marée humaine. Et puis, on ne savait pas vraiment combien de personnes connaissaient notre musique ou notre groupe, parce qu’on n’est pas très important en France. Mais pas mal de fans chantaient nos chansons, c’était vraiment un super concert pour nous, et on espère vraiment revenir vite et jouer un peu plus tard sur l’affiche.

En parlant de ça, la seule et dernière fois où nous vous avons vu, c’était en 2003 en première partie de Metallica. Le show du Bataclan de 2012 avait été annulé. Ce n’est pas évident de vous voir en live. Est-ce que l’on peut espérer vous revoir rapidement ?

Shannon : Oui, on s’est fait une promesse là-dessus. On a eu pas mal de malchance par le passé, et beaucoup de cela était dû à un mauvais management, et nous avons fait beaucoup de grosses tournées, dont certaines avec Metallica, donc devant des milliers de personnes. Mais malgré cela, on n’a jamais de support des médias, pas de journalistes pour nous, pas de photographes dans la fosse lorsqu’on jouait, et nous, on se disait : “mais qu’est-ce qui se passe ?”. La maison de disques en Europe. Disons qu’on soit avec Universal par exemple, chaque pays à sa propre version d’Universal, mais ils ne communiquaient pas entre eux, et on a un peu disparu de la distribution en quelque sorte. Et pendant ce temps-là aux Etats-Unis, on vendait des millions d’albums, et on se produisait dans des salles de vingt-mille places, alors, on ne pouvait pas comprendre.

Et un autre inconvénient qu’on a eu, est que nous ne nous pressons pas pour sortir un disque, d’ailleurs, depuis 2003 où j’ai rejoint le groupe, nos albums sont espacés de quasiment quatre années à chaque fois. Et forcément, pendant cette période, on changeait en tant que groupe et en tant que personnes. Si tu compares notre dernier album au précédent, il y a un changement énorme. Et ce sont des décisions conscientes que nous prenons, comme de changer de producteurs ou de labels entre nos albums. Quoiqu’il en soit, avant qu’on ne devienne trop vieux pour les tournées, on doit absolument revenir jouer ici et “travailler” l’Europe, et le seul moyen de réellement devenir important ici est de revenir souvent et jouer. Par conséquent, on ne peut pas attendre de nouveau quatre ans avant de revenir, et comme je l’ai dit, on a pris en engagement et on va revenir l’année prochaine, et puis l’année d’après, etc. Jusqu’à ce que l’on soit accepté ici ou que l’on nous dise d’aller se faire foutre ! (rires)

On a trouvé “When Legends Rise” (2018) très bien équilibré et mature. Es-tu d’accord avec cette analyse ?

Shannon : On y a mis beaucoup de réflexion, y compris sur la production que l’on voulait changer. Pour la première fois, on a travaillé avec des compositeurs extérieurs. Sully (Erna – chant/guitare rythmique)
écrit bien entendu tous les textes, mais il avait besoin d’aide afin de moderniser notre son. Avec l’âge, on est moins énervé ou en colère que par le passé. Jeunes, on était vraiment énervé, et c’est ce que reflètent nos premiers albums, qui sont très heavy et metal. Là, on arrive dans la cinquantaine (sourire), on ne veux pas se comporter comme une bande de gamins de vingt ans qui veulent en découdre et tout casser. On n’a plus ce sentiment, ce besoin d’agression dans nos vies. On a tous des enfants, une maison, on est des gens heureux maintenant (rires), et on ne veut pas faire semblant de ne pas l’être.

Cela étant dit, on n’a pas envie de décevoir et énerver nos fans en écrivant subitement du Elton John, tu vois ce que je veux dire ? Alors, ce que l’on essaye de faire – surtout que l’on est pas inquiet comme certains de nos fans de la première heure des : “oh, ils ne sont plus aussi heavy qu’avant” – est de revenir à la créativité qui existait dans les années 70 où c’était moins commercial et régenté par le business. Je pense que le véritable thème de ce disque est la renaissance, et que l’on regarde nos vingt premières années comme un chapitre. “When Legends Rise” est un nouveau commencement pour nous, un nouveau chapitre de notre musique.

Le processus d’écriture était plus spontané ?

Shannon : Janvier 2017. En fait, on venait de terminer une tournée de trois ans, et avec Tony (Rombola – guitare) qui vit également en Floride, on écrivait de la musique jusqu’à fin 2017. Sully voyageait à travers tous les Etats-Unis, expérimentant (musicalement) des choses, composant avec d’autres artistes compositeurs, et d’ailleurs “Bulletproof” était l’un des résultats de tout cela. Robbie (Merrill – basse) était à Jacksonville, écrivant ses propres trucs. Et après quatre-cinq mois, où tout le monde écrivait de son côté, on s’est rassemblé (comme d’habitude), sauf que pour la première fois, Sully a fait appel à des compositeurs extérieurs au groupe, plutôt que de simplement rester à Boston, composant seul de son côté. Il voulait expérimenter, et trouver quel type de mélodie on pourrait ajouter, et dans le même temps, quel grand producteur inclure dans le processus, pour obtenir un nouveau son.

On essaye d’évoluer. Il y a des groupes que j’adore comme AC/DC, mais qui sortent le même disque encore et toujours, tout au long de leur carrière, et on n’est pas ce genre de groupe. On voulait changer, et donc le processus a été le suivant : on était tous séparé une bonne moitié de l’année 2017, puis on s’est retrouvé en studio en Floride, et on a commencé à balancer nos idées respectives. Et tout ce qu’à ramené Sully, qui était le fruit de ses collaborations était vraiment bon. Il y avait toujours notre patte, notre côté dur, mais avec de grosses mélodies, des synthétiseurs, le but étant toujours de moderniser notre son, un peu comme le fait Shinedown. On est entré en studio vers la fin de 2017, à Boston – studio que nous avons déménagé à Nashville d’ailleurs, juste pour information. Il n’a fallu que six semaines pour enregistrer et mixer l’intégralité de l’album.

Même si nous savons que c’est Sully qui s’en charge, les paroles semblent avoir un thème récurrent de survie, de résistance face à l’adversité, toujours se relever. Cela fait partie des gènes du groupe ?

Shannon : Je peux l’expliquer. Si tu fais quelques recherches sur les paroles de tous les albums de Godsmack, tu constateras qu’à l’exception de “Voodoo” et d’une autre, toutes les chansons traitent de ses sentiments, son ressenti sur sa vie, sur ce qui lui arrive. Il ne s’agit pas de “Dungeons & Dragons” ou quoique ce soit du genre. Et comme quatre ans s’écoulent entre nos albums, beaucoup de choses se sont passées dans sa vie (rires), bon ou mauvais. Dans ce laps de temps, il a rencontré une femme avec qui il est toujours, il est heureux, et c’est également quelque part une sorte de renaissance pour lui. Dés qu’il a commencé à écrire de nouvelles paroles, on a soudainement commencé à réaliser que celles-ci étaient bien plus positives que d’habitude. On n’avait jamais eu de textes aussi positifs. “Someday” est une chanson très positive, et ça, c’est nouveau pour Godsmack. De plus, pendant que l’on était dans le studio, il s’est assis au piano et a commencé à jouer une nouvelle chanson qu’il avait écrite, “Under Your Scars”, et on n’avait jamais fait de ballade, encore moins une ballade au piano. (rires)

Elle avait une mélodie si belle, et il nous a expliqué le sens des paroles, dans l’idée de : “montres-moi tes cicatrices, je te montrerai les miennes”, et que l’on ne devrait jamais avoir peur de nos propres cicatrices. On parle là de celles que l’on ne peut pas voir. Chris Cornell, Chester Bennington et beaucoup d’autres. Peut-être que s’ils avaient parlés de leurs cicatrices. Et ce titre n’était pas évident pour nous car on voulait éviter à tout prix le côté parfois kitsch des ballades et qui souvent ne veulent rien dire. On a fondé la “Scars Foundation” avec notre propre argent, ce truc est vrai et profond mec, ce n’est pas pour simplement sortir un hit. Il y a vraiment un sens derrière. C’est une organisation à but non lucratif, nous avons notre propre staff qui s’occupe de lever des fonds. C’est pour les gens qui souffrent de troubles de stress post-traumatique, de toute sorte de dépression, d’obésité, de harcèlement.

Sully entre dans la pièce et nous rejoint.

Il peut prendre la suite sans problème (rires).

Sully Erna (chant/guitare) : OK. Salut !

Shannon : C’est juste une fondation qui a pour origine une belle chanson.

Sully, tout le monde sait que tu es un batteur, un guitariste ainsi qu’un chanteur, mais peut-être un peu moins que tu joues également du piano, comme récemment avec Lisa Guyer, entre autres. Est-ce qu’à l’avenir le clavier sera plus présent dans Godsmack ?

Sully : Je ne sais pas. Déjà, on avait pas vraiment prévu de faire une chanson avec du piano sur cet album. A l’origine, ce titre était écrit de manière acoustique, mais un jour, je m’étais assis au piano, je l’ai transposée et cela sonnait vraiment bien. Elle me rappelait un peu “Dream On” d’Aerosmith dans l’idée (ndlr : autre groupe de Boston) et on a alors décidé que cela valait le coup d’aller jusqu’au bout avec cette chanson. De plus, on prenait déjà des risques sur cet album en explorant de nouveaux sons. Donc, on s’est dit : “pourquoi pas ?”. Qu’on le fasse putain, parce qu’on veut pouvoir écrire absolument ce que l’on veut, et sans que personne ne nous dise comment nous sommes supposés sonner. On imposera ce qu’on voudra faire tout en espérant que nos fans nous accompagnerons sur cette aventure. Et jusqu’ici, non seulement ils nous suivent, mais on apprend que cette fan base s’agrandit énormément. On constate qu’il y a plus de femmes et d’enfants dans notre public. Je pense qu’on a accompli exactement ce qu’on voulait avec ce disque (presque en chantant) “Round and round and round it goes. Where it stops, nobody knows”. (rires)

Shannon : On reviendra, comme je le disais.

Sully : Pour en revenir au disque, on savait que l’on voulait explorer une nouvelle direction. Mais personne n’avait de chansons, alors le défi était de mettre un grand coup de pied dans notre nid douillet et écrire de la putain de musique. On est parvenu à trouver cette nouvelle direction, et tout est parti de “Bulletproof” je pense. Ce titre est très accrocheur, et je pense que cela nous a amené dans la position où l’on a pu écrire et composer ce que l’on a voulu sur cet album. Mais on était également conscient que nous devions mettre quelques chansons bien heavy, car c’est l’identité même de notre fanbase.  Mais mêmes les plus heavy ont des passages très accrocheurs. Cet album est la naissance d’une nouvelle carrière.

On a une question NFL pour toi, vu qu’on sait que tu es un grand fan des Patriots de la Nouvelle-Angleterre.

Sully : Yeah !

Même si ce n’est pas notre équipe, on n’a que le plus grand respect pour cette organisation. On a trouvé très drôle les vidéos que tu as posté sur ta page Facebook après chaque matchs des Pats, pour un peu “chauffer” ceux qui les détestent (ndlr : Les Patriots, entre domination écœurante depuis dix-sept ans et polémiques et accusations, sont l’équipe la plus détestée des USA, tous sports confondus).

Sully : On est simplement comme ça à Boston. C’est une ville compétitive, et on a un amour et une dévotion éternelle pour toutes les équipes sportives qui défendent nos couleurs. C’est juste la “Boston attitude” tu vois ? (rires) Tout le monde la ramène, c’est une ville très dure, et donc, on est tous compétitif et passionné pour notre équipe, et chacun devrait l’être pour l’équipe qu’il supporte d’ailleurs.

Des projets de sortie d’un DVD/Blu-ray live de cette tournée ?

Shannon : Je ne sais pas, on n’y a pas pensé étant donné qu’on est encore en pleine tournée. Mais on a des idées pour un DVD live atypique, comparé à ce qu’il se fait d’habitude.

Sully : On travaille sur quelque chose en ce moment, mais nous ne pouvons pas trop en parler car nous en sommes pas encore certains. Si cela se fait, ça sera très spécial, un live vraiment spécial, je vous le promet. Quelque chose que Godsmack n’a jamais encore fait jusqu’à présent.

Enfin, nous sommes “RockUrLife”, et vous, qu’est-ce qui rock votre life ?

Shannon : J’ai un bassin de carpes Koi. (rires) Je vous jure, j’ai ces poissons magnifiques, des tortues et tout. Ma copine et moi on adore trop ces trucs, on en prend soin. C’est ce qui me manque le plus là de suite.

Sully : Je dirai que les deux choses qui rock ma life sont ma fille et mon groupe. Je suis extrêmement heureux d’en faire parte. J’aime ces mecs, ce groupe, j’adore ce qu’on fait et j’aime le regarder évoluer et grandir, parce que je pense vraiment qu’il était temps de prendre des décisions ainsi qu’une nouvelle direction, surtout en Europe. C’est ce qu’on voulait faire depuis très longtemps, on est donc en mission (d’être présent ici) une bonne fois pour toute. D’obtenir le statut de “groupe de stade” partout dans le monde. Donc, tout cela rock ma life car c’est ce que j’aime faire, d’arriver au niveau pour lequel on est fait. Et quand je rentre chez moi, le contrepoids est ma fille. Etre un père, c’est important. Elle a grandi, et n’a plus besoin d’un papa désormais, alors j’essaie d’absorber chaque moment que je peux avec elle.

Site web : godsmack.com