Interviews

GHOST (23/03/18)

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À l’occasion d’une journée promotion sur Paris, le leader du groupe Ghost Tobias Forge, plus connu sous le nom de Papa Emeritus et désormais Cardinal Copia, est venu nous parler du nouvel album du groupe “Prequelle”, mais également de l’univers de la formation et de la prochaine tournée.
 

Il y a beaucoup de nouvelles choses qui arrivent avec ce nouvel album. Comment le vis-tu ?  

Tobias Forge (chant) : Avec beaucoup d’excitation. Et quelque part ce n’est pas forcement une mauvaise chose, mais je n’ai jamais été capable de l’orchestrer de cette manière. Pour plusieurs albums je voulais : enregistrer l’album, le livrer et avoir un break. Le plan était d’enregistrer en août et de livrer un album mixé et masterisé au label en décembre et il sortirait en avril ou en mai et ça m’aurait permis d’avoir comme des vacances dans un sens. Et on n’a pas eu beaucoup de retard, mais en novembre Tom (ndlr : Dalgety), le producteur était en mode : “peut-être, vraiment peut-être qu’on devrait relâcher un peu la pression, et faire en sorte que l’on ait tout enregistré pour Noël et mixé en janvier” et j’étais là : “fuck yes!” et on s’est tenu à ces deadlines-là avant que la promo ne commence. Au final, on n’a jamais vraiment de repos. Tout ça pour dire que grâce à ce procédé je n’ai pas le temps d’être nerveux ou anxieux par rapport à la sortie de l’album, ce que j’estime être une bonne chose ! (rires)

Bientôt (ndlr : au jour de l’interview) vous allez révéler le Cardinal Copia au grand public comme nouveau leader de Ghost. Pourquoi avoir choisi un Cardinal ? Hiérarchiquement parlant le cardinal est en dessous du Pape.

Tobias : En effet, mais je te rassure il y a toujours un Pape, Papa 0 et à côté le Cardinal. Ce sont deux personnes différentes : le premier est le maître et le deuxième l’apprenti. Et le Cardinal est l’exécutant, pas le patron et Papa 0 va surveiller son travail et ses progrès et si le Cardinal Copia fait un bon travail il deviendra éventuellement… peut-être… Papa IV !

Mais du coup, Papa Emeritus 0 sera-t-il sur scène pendant la tournée ?

Tobias : Il sera possiblement présent pour un court moment (ndlr : il a été montré depuis que Papa Emeritus 0 joue le solo de saxophone sur scène), mais il y aura sa présence un peu partout.

Donc il y aura deux personnages principaux dans un sens. Est-ce toi qui interpréteras Papa Emeritus 0 et le Cardinal sur scène ?

Tobias : Je n’en jouerai qu’un, il n’y a qu’un seul chanteur dans le groupe comme pour “Meliora”. Je vais changer de costume c’est certain, mais avec le même personnage : le Cardinal Copia. L’un portera un chapeau, un autre pas, ce sera la seule différence. (rires) Le Cardinal est un seul et même personnage avec quatre costumes différents qui pour des raisons que tu découvriras, changeront tout au long du show pour rendre ça un petit peu plus marrant.

 

 

Justement à propos du design de ces personnages et de leurs costumes, travailles-tu toujours avec les mêmes personnes qu’au début de Ghost ? Et qui décide du look que va avoir le prochain Pape ou Cardinal ?

Tobias : Alors, en ce qui concerne ta première question : Oui ! Je travaille toujours avec la même personne et la manière dont elle travaille est parfaite pour moi. Elle est designer, mais ne s’assoit pas et visualise et conçoit tous les costumes et je ne le fais pas non plus alors que je suis extrêmement spécifique sur ce que je veux, mais ça peut changer quand tu vois plusieurs options. Donc j’ai une idée très construite de ce que je veux, quel personnage je veux habiller et puis ce n’est pas non plus très original. On prend un costume de Pape et on le fait en noir. Donc on suit un certain protocole et après on peaufine les détails, et où on veut voir certaines choses. Après certaines choses sont dictées par le côté pratique, tu peux avoir une idée en tête et une fois que tu l’essayes tu réalises que ça ne marchera pas. Je suppose que l’idée initiale et le veto m’appartiennent mais après c’est une collaboration. Je ne suis pas un fabriquant de gants donc il y aura évidemment des décisions qui seront prises par le gars qui fait les gants. “Make (G)love!” (rires)

Et combien de temps cela te prend-il pour concevoir tout cet univers visuel ? En ce qui concerne les tenues.

Tobias : Des semaines et des mois ! (rires) Il y a tellement d’étapes. Et il faut réussir à tout gérer en même temps. Quelqu’un s’occupe des gants, un autre des coutures, quelqu’un fait les chapeaux, un autre achète les chaussures et quelqu’un qui achète tout le matériel pour concevoir toutes ces choses. Surtout qu’il n’y a pas que moi il y a aussi les Ghouls et chaque costume que l’on fait, on les fait en double, il y a beaucoup de travail. Si tu voyais la garde-robe avant une tournée c’est assez impressionnant. Je ne sais plus vraiment quand on a commencé à réfléchir aux nouveaux costumes, mais évidemment le premier était Papa 0 en juillet il me semble pour prévoir la fin de la tournée. Et tous les autres autour de novembre ou décembre. Et entre-temps beaucoup d’e-mail, de rendez-vous et d’essayage ! À chaque essayage je suis là : “Oui, oui, non. Oh merde j’ai gagné du poids, OK, je rentrerai dans ceux-là dans deux mois !”. (rires) Donc c’est beaucoup de boulot.

Passons à l’album maintenant, à la première écoute on avoue avoir été un peu perplexe, on se disait : “OK, oui, pourquoi pas”, mais à la deuxième écoute avec un peu de recul c’était vraiment excellent, différent, mais excellent ! Alors as-tu travaillé avec de nouvelles personnes pour cet album pour avoir cette approche ? Comment as-tu travaillé “Prequelle” ?

Tobias : J’ai toujours travaillé et eu la chance de ne jamais avoir de page blanche dans un sens. Même pendant “Meliora” où j’étais avec Klas (ndlr : Åhlund), qui était le producteur de l’album, initialement c’était juste lui et moi. J’avais beaucoup de matériel et deux albums en tête. Je voulais les enregistrer tous les deux, ce qui est un peu risqué. Un album un peu futuriste et l’autre une sorte d’album médiéval. Il fallait choisir et Klas voulait faire l’album futuriste. J’ai dit : “OK !” et j’ai pris quelques musiques dont une qui était prévue pour l’album médiéval. On a commencé à travailler les mélodies et les beats. Et il voulait que l’on se serve de la musique médiévale comme introduction qu’on réutiliserait (peut-être) dans le prochain album pour qu’il y ait un lien entre eux.

Je travaille sur l’album dès que j’ai une pause ou un jour off, j’enregistre sur mon ordinateur ou même avec mon téléphone si je n’ai que ça sous la main. Et toutes ces idées si je les trouve intéressantes je les emmène en studio avec quelqu’un juste pour enregistrer une musique et voir comment ça ressort. Car contrairement à ce que disent certaines personnes qui ont été en groupe avec moi et ce qu’ils pensent, j’aime collaborer. Je ne suis pas complètement impossible de travailler avec. La seule différence, c’est que j’ai besoin de vouloir collaborer avec toi, c’est tout. C’est un peu comme les filles à l’école qui veulent être embrassées, peut-être qu’elle ne veut pas être embrassée par n’importe qui, elle veut l’être par cette personne. Et je suis un peu comme ça quand il s’agit de travailler. Je ne veux pas quelqu’un pendant que je suis en train d’écrire me taper sur l’épaule me disant : “hey, hey, joue ça plutôt deux fois !” et quand tu le fais et que ça sonne bien deux fois il crie partout : “j’ai écrit celle-là !” et c’est très irritant, c’est pour ça qu’il est difficile de travailler avec moi, et que je choisis qui vient avec moi en studio c’est beaucoup plus simple, ça ne veut pas dire non plus que ça finit très bien, mais ça permet de tester ce que l’on a.

Avant les groupes jouaient devant un public pour essayer leurs nouveaux titres, maintenant c’est impossible, car les gens l’enregistrent et c’est fini. Mais de nos jours c’est un peu étrange d’enregistrer un album avec toute cette idée du groupe dans une pièce qui capture de la magie parce qu’on n’a jamais fait ça ni été comme ça. Pour enregistrer Ghost on n’a jamais eu besoin de tout le monde dans la pièce. C’est une charmante idée, mais la plupart des albums ne sont pas fait de cette manière, l’astuce est de faire ressentir comme si ça avait été un groupe qui joue en même temps et crée cette magie. Et ça prend du temps ! (rires) C’est pour ça que je suis en studio plusieurs mois travaillant chaque putain de détail.

 

“Prequelle” sonne comme l’album de la liberté, on a l’impression que tu as fait absolument tout ce que tu voulais sur ce disque avec par exemple le saxophoniste. Penses-tu que maintenant que Ghost est mondialement connu et possède une base solide tu es beaucoup plus libre dans la création ?

Tobias : Je pense que comme beaucoup d’artistes ça ne me dérangerait pas de toucher plus de monde, mais j’ai aussi l’impression que je suis toujours “libre” dans mes créations. Je l’étais sur tous les autres albums, mais c’est vrai qu’il y a un élément de liberté dans cet album, car il a été fait un peu comme “Opus Eponymous”, car il y avait beaucoup moins de “maintenance sociale” autour de moi, ce qui a joué un grand rôle entre les deux albums. Parce que même si c’était ma responsabilité de faire ces disques il n’y avait personne à la porte toquant et demandant : “hey, est-ce que je peux être la ? Rester dans les environs, je peux être dans la pièce prendre de l’espace et de la nourriture ?” et sachant qu’il y en avait beaucoup c’était très irritant, car au final c’est toujours ma responsabilité de faire cet album et pas le leur. Tu as envie de leur dire de sortir, et d’aller faire leur groupe, de faire leur truc.

Et cette fois-ci à part pour enregistrer les batteries ou le saxophone, il n’y avait que moi et Tom et c’était très serein malgré ce qui se passait à l’extérieur à l’époque, c’était une très bonne atmosphère. De plus, j’étais proche de chez moi, environ cinq minutes à pied donc c’était très positif surtout que j’ai eu une bonne année de merde donc j’avais besoin que ce soit fait d’une certaine manière et que ça se ressente. D’une certaine manière, je voulais vraiment être aussi libre que sur “Opus Eponymous” où personne n’attendait rien de cet album, juste moi. Ça m’a pris quatre ans pour faire cet album et il nous a permis d’être encore aujourd’hui sur la même trajectoire, car on a travaillé chaque détail. Je ne veux pas être dans une logique où je me dis que “Square Hammer” a très bien fonctionné, donc je vais faire douze “Square Hammer” sur le prochain disque. Mais ce n’est pas comme ça que ça marche, pour faire un album de Ghost il faut que ce soit étrange et que ça ne ressemble pas à ce qu’on a fait avant. Et je suis content que ce soit ce que tu penses, tu as sans doute raison, sur “Prequelle” il y a beaucoup de liberté.

Nouvel album, nouvelle tournée. Peux-tu nous dire à quoi on peut s’attendre sur scène si on vient assister à un concert de Ghost ?

Tobias : Rien que pour le côté des musiciens, on a voulu recréer tout ce qu’on a fait avant, toutes les voix, les claviers. Donc on a besoin de neuf personnes pour que ça arrive parce que pour beaucoup de claviers on aurait eu besoin d’une troisième main, surtout que l’on a beaucoup de shakers et plein d’autres instruments donc il fallait plus de personnes avec deux mains pour que ça sonne de la même manière que sur le disque. Je pense que la plus grosse différence sera sur les anciens morceaux, car maintenant ils vont sonner beaucoup plus fort et seront jouer comme les nouveaux titres, car avant sur scène des morceaux comme “Absolution” sonnaient mieux que “Ritual”, ça ne devrait pas ! (rires) Maintenant ce ne sera plus le cas. On sonnera plus comme un groupe et moins digitalisé et sur scène il y aura beaucoup plus d’éléments, plus de changement de vêtements plus de choses vont arriver, un peu plus de tout ! Disons que c’est beaucoup mieux orchestré.

Dernière question, notre média s’appelle “RockUrLife”. Alors qu’est-ce qui rock ta life Tobias ?

Tobias : Je suppose la fin de la journée. Ma famille, mes enfants me donnent beaucoup de raisons de vivre. Avant de les avoir, je ne faisais rien de mon temps libre. Et maintenant que j’ai très peu de temps libre, je veux passer chaque instant avec eux, malgré le groupe. Mais j’ai la chance d’avoir les deux, car d’un côté j’ai une famille qui me donne beaucoup de but et de chose à construire. Et de l’autre, j’ai ce groupe qui me permet de parcourir le monde et vivre mon rêve. Avoir ces deux choses rock ma life !

Parfait, merci Tobias.

Tobias : Merci à toi.

 

 

Site web : ghost-official.com