Interviews

FRANK IERO (01/04/15)

Auteur d’un premier album remarqué, “Stomachaches”, sorti en août dernier, Frank Iero s’extirpe du moule My Chemical Romance pour prendre la voie la moins commerciale parmi les sorties post split du légendaire groupe américain emo. Avant son premier passage à Paris en solo le 7 mai au Backstage By The Mill, Frank Iero nous a accordé quelques minutes par téléphone, en direct de sa cuisine, afin de nous parler de ce renouveau dans sa vie d’artiste.

Comment te sens-tu à propos de cette tournée européenne ?

Frank Iero : Super excité mec ! On finit une tournée aux Etats-Unis, j’étais à Philadelphie hier soir et ce soir nous jouons à Brooklyn. Nous aurons dix jours de pause avant de partir pour l’Europe et, je t’avoue que je suis très heureux de ces dix jours, car nous sommes tous un peu fatigués ! Mais je suis quand même impatient de revenir en Europe. Ce sera la première fois avec mon propre projet et c’est vraiment une perspective à la fois hallucinante et très excitante ! Bien sûr l’Angleterre me fait toujours rêver, mais je suis vraiment content de revenir en France, en Allemagne et même en Espagne pour présenter mon nouveau projet.

Plusieurs des concerts sont déjà sold out. Comment expliques-tu ce succès ?

F : J’en ai aucune idée ! (rires) Le succès d’un groupe n’est pas une science exacte. Evidemment je suis très fier et honoré de voir que les gens s’intéressent à moi dans un pays comme l’Angleterre mais, c’est un peu angoissant aussi ! Mais peu importe de toutes façons, on est vraiment super contents et excités de venir en Europe, que les concerts soient complets ou pas, on va jouer chaque concert à fond puisqu’on ne sait faire que ça !

Etait-ce quelque chose que tu avais en tête depuis longtemps que faire ton album  ?

F : Absolument pas ! Pour être franc, je ne me souviens plus ce que j’avais en tête quand nous avons décidé de mettre fin à My Chemical Romance. On était en plein milieu de l’enregistrement de notre nouvel album quand c’est arrivé, alors je t’avoue que j’étais un peu dans le flou. Mais faire mon propre album et partir en tournée n’était clairement pas dans mes plans. Je crois me souvenir que j’envisageais plus d’écrire une nouvelle ou un roman. Même de reprendre mes études ! Ce n’est pas que j’étais fatigué de la musique, pas du tout, mais j’aurai trouvé ça bizarre de rebondir sur la fin de MCR direct pour lancer ma propre carrière solo. Cet album je l’ai enregistré dans mon sous-sol, par mes propres moyens, juste pour le plaisir. Je ne comptais pas en faire quoique ce soit de véritablement concret. Puis un jour je l’ai fait écouté à un ami qui avait de bonnes relations avec les maisons de disques et le lendemain je me retrouvais à signer un contrat et quelques semaines après sur scène pour jouer mes propres chansons ! C’est hallucinant mec ! Rien de toute ça n’était prémédité, vraiment.

Finalement, ton album est le moins accessible des albums des membres de MCR. C’est une bonne chose, on le trouve très personnel, très abouti. Quand as-tu commencé à travailler sur ces chansons ?

F : Merci mec ! Tu as tout à fait raison, ces chansons sont les plus personnelles qui soient et je n’ai jamais réfléchi une seule seconde en les écrivant. Je voulais faire juste mon truc, parler des choses que j’avais en tête et écrire des chansons sans but précis. C’est pour ça qu’elles sonnent un peu désordonnées, expérimental et qu’il n’y a pas de véritable genre qui se dégage de l’ensemble. Je n’ai jamais pensé qu’un jour le monde entier puisse écouter ces chansons et si je les avais écrite avec cette idée en tête, il en serait sûrement sorti quelque chose de différent mais, mieux ou moins bien, on ne saura jamais ! Ce qui est sûr, c’est que j’aurai vraiment fait les choses différemment si cela avait été dans un but de diffusion de ma musique. C’est pour ça que cet album compte beaucoup pour moi aussi, car il n’est le résultat que de mon travail et de mes sentiments.

 

 

D’ailleurs, en écoutant leur version live (enregistrée à la BBC), on se rend compte que les chansons ont encore beaucoup bougées dans leur version live. Elles sont encore plus sauvages. Comment as-tu approché l’idée de les jouer live ?

F : Tu as parfaitement résumé l’idée. Sans revenir sur ce que j’ai déjà dit, quand est venu la perspective du live, j’ai juste dit à mes musiciens qu’on allait les jouer comme elles viennent. Je n’avais pas d’idée, ni d’envie précise en tête alors autant en faire quelque chose de neuf ! On est très contents de les jouer car chaque soir elles peuvent sonner différemment. Ce qui est indéniable, c’est que même sur l’album, ce sont des chansons très intenses et que mes musiciens l’ont tout à fait compris. Dans ce sens, elles sont toujours très sauvages sur scène également !

D’ailleurs, tourner avec un groupe ne te donne pas envie de retourner en studio avec plusieurs musiciens ?

F : Je retrouve tout juste le plaisir de travailler et de faire les choses par moi-même dans mon sous-sol, alors je t’avoue ne pas y avoir encore pensé. Je ne suis pas très doué pour faire des projets longtemps à l’avance ! (rires) Mais pourquoi pas après tout. Je ne sais pas ce que je ferai une fois le cycle de cet album terminé. Je n’exclue aucune possibilité.

Même celle de reformer Leathermouth ?

F : Oh mec. J’aurai adoré continué l’aventure Leathermouth. J’avais vraiment envie qu’on mène ce groupe quelque part. On aurait pu le faire. Mais qui sait ? D’ailleurs, l’un des musiciens de Leathermouth est mon guitariste aujourd’hui et mon “stage man” jouait dans le groupe également. Et c’est drôle que tu me parles de Leathermouth aujourd’hui, car hier soir, pour la première fois, on a repris une chanson de Leathermouth sur scène ! Donc même si le groupe n’existe plus pour le moment, il subsiste un peu encore à travers ce projet aujourd’hui.

Es-tu toujours en contact avec les membres de My Chemical Romance ? Que penses-tu de leurs projets ?

F : Bien sûr mec ! Tu connais ce truc des groupes qui ne s’adressent la parole que lorsqu’ils sont en tournée mais qui, le reste du temps, ne se calculent pas. Bon et bien, dans MCR ça n’était pas comme ça. Même si nous habitions dans des endroits différents, on était constamment en contact et même si mettre un terme à ce groupe fut très dur, nos relations sont toujours bonnes. Par ailleurs, tous les musiciens au sein de My Chem étaient des gens très talentueux. Alors je n’ai jamais douté de leur réussite. L’album de Gerard est vraiment très bien, celui de Ray le sera également et celui de Mikey est vraiment bon aussi, bien que surprenant et très différent (ndlr : Mikey fait parti de Electric Century qui sortira un premier EP le 18 avril). Bien que chacun mène désormais sa carrière comme il l’entend, sans chercher l’approbation des autres, on se tient toujours au courant et c’est toujours un plaisir de recroiser ces mecs qui furent comme ma famille pendant plus de dix ans. Ce qu’on a accompli ensemble, c’est quelque chose dont je serai fier tout le restant de ma vie.

En janvier dernier, Gerard donnait justement son premier concert en tant qu’artiste solo à Paris et on était assez déçu de voir que des gens n’étaient là que dans l’espoir d’entendre une reprise de MCR. N’es-tu pas déçu par le fait d’être enfermé dans un projet à tout jamais pour certaines personnes ?

F : Mais jamais de la vie mec ! (rires) Faire partie de My Chemical Romance était quelque chose de fabuleux et je ne renierai jamais ce groupe. Mais je comprends ce que tu veux dire. Cet album, je l’ai composé dans mon sous-sol, comme tu le sais, et aujourd’hui je m’apprête à partir en tournée en Europe du coup, j’apprécie la chance que j’ai d’avoir quand même des gens qui me suivent dans mon délire. Maintenant, s’il y en a qui ne sont là que parce que j’ai fait parti de MCR, ce n’est pas grave, ils sont là quand même ! D’autant que je vois les gens connaître mes chansons en concert alors que je me dis qu’au final, ils aiment aussi ce que je fais tout seul, c’est plutôt cool et rassurant ! (rires)

Du coup, quels sont les plans pour les mois à venir ? Nouvel album ?

F : Mec, je pense que tu as compris que je n’arrivais pas à prévoir grand chose ! (rires) Je ne sais pas. Je sais que là on part pour une tournée européenne que je suis impatient de faire. Ensuite nous aurons un peu de repos puis de nouveau des dates aux Etats-Unis et quelques festivals européens à la fin de l’été (Reading et Leeds notamment, je suis super excité à l’idée d’y retourner !). Ensuite, qui sait ? Ce serait mentir que te dire que je ne pense pas à un autre album bien entendu, la musique est toute ma vie. Maintenant qui sait quelle idée pourra naître dans mon sous-sol ! (rires) Je ferai un point après la tournée et on verra ce qui vient à ce moment là.

Last but not least, notre site s’appelle “RockUrLife”. Qu’est ce qui rock ta life en ce moment ?

F : Ah… Ca va sonner très cliché ce que je vais dire, mais hier soir j’étais en concert pas si loin de chez moi donc j’ai pu rentrer. Là je viens de déposer mes enfants à l’école, puis je suis rentré chez moi voir ma femme, et là je suis en train de te parler, alors que tu es en France et que tu me dis que tu as aimé mon album : plutôt cool ma vie non !? (rires) Mais devenir père, fonder une famille, c’est tellement quelque chose d’important pour moi. Je deviens comme ces vieux rockers qui se rachètent une conduite : la musique c’est toute ma vie, mais je ne me suis jamais senti aussi heureux que depuis que j’ai rencontré ma femme et qu’elle m’a fait le cadeau de merveilleux enfants. Donc oui, ma famille est ce qui rock ma vie en ce moment ! (rires)

 

 

Site web : frank-iero.com

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN