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CIGARETTES AFTER SEX (04/05/17)

English version

Un mois avant la sortie de leur, très attendu, premier album, les New Yorkais de Cigarettes After Sex s’arrêtent à Paris pour nous présenter ce premier album qui fait suite à l’EP paru en 2012 déjà. L’occasion pour RockUrLife de rencontrer Greg, chanteur, compositeur et membre fondateur du groupe, afin de discuter de ce disque et de Françoise Hardy.

Quel est ton ressenti à propos de Paris ? Nous avons l’impression que notre ville et ta musique étaient faits pour se correspondre.

Greg Gonzalez (chant) : C’est super d’entendre ça ! J’adore Paris, c’est devenu l’une de mes villes préférées et j’adore les artistes qui en sont originaires aussi. Je l’ai souvent répété mais Françoise Hardy est ma chanteuse préférée et Erik Satie a eu une grosse influence sur le groupe. C’est une ville très romantique également. J’aime m’y balader, c’est très enivrant. 

Tu as donc pris le temps de visiter la ville.

Greg : Oui mais pas ces jours-ci. Nous n’avons pas eu beaucoup de temps et nous n’avons jamais vraiment le temps de visiter lorsque nous venons pour un concert. Mais j’ai eu la chance de venir à Paris en simple touriste en août dernier. J’y suis resté une semaine entière, le temps de visiter Montmartre, Pigalle. J’ai vraiment pris du bon temps à être ici en tant que visiteur et non artiste en tournée. 

C’est assez inhabituel de croiser des artistes dont l’influence majeure est Françoise Hardy.

Greg : Oui je sais ! Je l’ai découvert parce qu’une de ses chansons était dans un top des meilleures chansons des années 60. Je suis immédiatement tombé amoureux de sa chanson et donc j’ai voulu en écouter d’autres. J’ai découvert d’autres singles comme “Voilà” par exemple. Puis je me suis procuré son album “La Question” et je me suis dis “OK, c’est l’album le plus beau qu’il m’ait été donné d’entendre”. J’étais bouleversé par la beauté de ce que j’écoutais. Et à partir de ce moment, je suis devenu littéralement obsédé par elle. L’idée avec l’album de Cigarettes était d’arriver à un résultat s’approchant le plus possible de quelque chose d’aussi beau que “La Question”. 

Quand l’as-tu découverte ?

Greg : C’était en 2008 je crois. Avant la première sortie officielle de Cigarettes. Elle a énormément influencé notre son.

Peux-tu nous dire comment le projet a débuté du coup ? 

Greg : Pour moi, le projet a débuté d’abord comme une aventure solo. J’avais cette collection de chansons qui, je trouvais, allaient bien ensemble. C’était de l’électro pop, assez influencée par les années 80 et Madonna même ! J’ai donc d’abord sorti un EP de six chansons. Mais tout le monde s’en est foutu donc j’ai fini par le supprimer. Puis j’ai sorti un EP de quatre chansons, cette fois-ci plus influencé par les Smiths, Joy Division et Jesus And Mary Chain, mais je m’en suis rapidement lassé donc je l’ai supprimé également ! Après ça j’ai sorti un EP appelé “Romance 39” qui a trouvé un petit public mine de rien. Mais pareil, je m’en suis lassé et je l’ai supprimé. Et finalement, en 2012, j’ai sorti l’EP officiel et je l’ai trouvé suffisamment bon pour ne pas le supprimer. Nous avons trouvé le vrai son du groupe avec cet EP. Les premières sorties ont servi d’entrainement quelque part. Et c’est seulement avec cet EP que nous avons senti que la voie empruntée était la bonne pour le groupe. Ca a pris un certain temps !

Tu aimes prendre ton temps en effet. Pourquoi avoir attendu cinq ans entre l’EP et votre premier album (disponible le 9 juin) ?

Greg : Ce qu’il s’est passé avec l’EP c’est que c’est, à mes yeux, les meilleures chansons que j’avais pu écrire. Donc, dans la foulée j’ai enregistré plein d’autres titres mais je n’étais pas satisfait. Je suis donc parti à New-York et j’ai décidé de tout reprendre depuis le début. Ce ne fut pas des moments faciles puisque je ne pouvais pas enregistrer beaucoup de musique, j’étais trop occupé à établir des connexions avec les gens de la ville, à survivre quoi ! (rires) Cela m’a donc pris plusieurs années à rassembler tous les musiciens présents avec moi. Nous étions prêts fin 2014 et nous avons commencé à travailler début 2015. J’ai finalement trouvé que ce nous écrivions était au moins du même niveau que l’EP. Ca a tout changé, nous avons mis “Affection” en ligne et c’est tout de suite devenu un buzz viral. Donc nous avons enregistré tout l’album d’une traite. Mais la raison pour laquelle il ne sort que maintenant est que nous avons passé l’intégralité de l’année dernière sur la route, à tenter de trouver le succès, à discuter avec les gens des labels et de l’industrie du disque afin de trouver le meilleur moyen de sortir l’album. Et donc ”album sort très bientôt donc nous l’avons finalement fait, nous avons réussi ! (rires)

 

 

N’était-ce pas frustrant d’attendre tout ce temps entre la fin de l’enregistrement et la sortie ?

Greg : Oui c’était un peu frustrant. Mais en même temps, nous avons pris énormément de plaisir en tournée, à voir le buzz autour de notre groupe grandir, jouer ces concerts complets un peu partout autour du monde. Mais oui c’était frustrant, tu as raison. Habituellement, quand nous terminions une chanson, nous la publions immédiatement. C’est donc bizarre d’avoir un album prêt mais qu’on ne peut pas dévoiler. Mais c’était pour le mieux. J’ai également pu m’assurer que l’album continuerait de me plaire sur la durée. 

A la vue de tes habitudes, c’est clair que vous risquiez tous les jours que tu jettes l’album à la poubelle car il ne te plait plus !

Greg : Oui ! (rires) Nous avons eu de la chance que ça n’arrive pas ! Mais non, j’adore toujours cet album. 

Donc on peut aisément imaginer que le deuxième album est déjà prêt.

Greg : Pas vraiment, nous avons d’autres chansons que nous avons enregistré lors de la session du premier album. Mais nous ne voulions faire un long album. Nous avons enregistré près de vingt chansons, mais nous ne voulions en garder que neuf ou dix maximum pour que l’album ne dure que quarante minutes maximum. Je pense que les meilleures d’entre elles sortiront d’ici la fin de l’année ou le début de l’année prochaine. Et puis oui, ensuite nous enregistrerons un second album.

N’est-ce pas difficile de conserver l’état d’esprit dans lequel tu étais lors de l’écriture et l’enregistrement de l’album près de deux ans après ?

Greg : C’est une bonne question. J’ai la chance d’écrire des chansons qui sont reliées à des sentiments, des expériences qui me sont arrivées personnellement. Donc, je peux tout à fait me replonger dans mes souvenirs si je le souhaite. Ca arrive tous les soirs sur scène. Quand nous jouons une chanson comme “Care” ou “Nothing’s Gonna Hurt You”, je ferme juste les yeux et je me vois à l’endroit exact où j’étais en écrivant la chanson. Je me sens chanceux d’être capable de faire ça. Je n’imagine rien, je retourne simplement dans mes souvenirs. 

Tu te souviens donc souvent de cages d’escaliers il parait.

Greg : Oui (rires) ! Je travaillais dans un cinéma il y a quelques années et il y avait cette cage d’escaliers avec une acoustique que j’aimais beaucoup. Donc, je me suis dis “nous allons enregistrer une chanson ici” et cela s’est fait très simplement ! Ca a donné” Each Time You Fall In Love”.

Ta musique est d’ailleurs, extrêmement cinématographique. Ecris-tu tes chansons comme tu écrirais un scénario ou est-ce juste une coïncidence ?

Greg : Je me souviens des choses m’inspirant pour les chansons de la même manière dont je me souviens des films que j’ai vu. Le feeling est cinématographique. Donc, je n’écris pas ma musique comme j’écrirais un film, mais quand j’écris une chanson comme “Sunset” par exemple, j’imagine quel météo j’associe à cette chanson, de quelle couleur est le ciel, ce genre de choses. Cela part de souvenirs techniquement, mais ça en devient un film.

 

 

Serais-tu intéressé par écrire la bande originale d’un film ? 

Greg : J’adorerai oui ! J’adore les bandes originales. Celle de “In The Mood For Love” par exemple, a eu une énorme influence dans ma vie, elle est juste fabuleuse. 

L’été prochain vous allez jouer dans plusieurs gros festivals, devant d’énormes audiences. Ta musique est plutôt intime. N’as-tu pas peur de ce genre de configuration ?

Greg : C’est bizarre parce que, même si notre musique est plutôt calme et douce, lorsque l’on joue en live devant beaucoup de gens, ils se mettent parfois à chanter et à danser très fort. De sorte que l’ambiance devienne vraiment intense. Mais pour nous, rien ne change, nous jouons ces chansons comme nous le faisons d’habitude et les gens sont libres de réagir comme ils l’entendent. Nous ne sommes pas un groupe qui va dicter la conduite de son public. Si en nous écoutant les gens veulent danser, qu’ils dansent ! S’ils veulent faire l’amour, qu’ils le fassent !

Comment expliques-tu le lien particulier entre la France et la musique de Cigarettes After Sex ? 

Greg : Tout d’abord, j’adore la musique française. Mais sinon, je ne peux pas vraiment l’expliquer, j’espère juste que les Français sentent l’honnêteté dans ma musique. Et je pense que les ponts entre nos cultures se font facilement parce que ma musique ne sonne pas comme la musique américaine de base. Mais j’adore également la musique venant du Japon, du Canada ou d’Afrique donc. Oui je pense juste que les Français sont capables de ressentir l’honnêteté de ma musique. Je ne pense pas que tu doives parler anglais pour l’apprécier. 

Pour terminer, notre site s’appelle “RockUrLife”, donc qu’est ce qui rock ta life ? Attention, tu n’as pas le droit de répondre Françoise Hardy !

Greg : Oh OK ! (rires) Je dirai… Le voyage alors. Voyager est excitant. Pouvoir être dans diverses villes, parler avec plein de gens venant de cultures différentes, c’est juste la chose la plus excitante qui soit arrivée dans ma vie. Je suis extrêmement chanceux de pouvoir vivre ça. Je me sens être une personne différente quelque part, ça me donne une énergie différente.

 

 

Site web : cigarettesaftersex.com

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN