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ALTER BRIDGE (12/11/10)

C’est à l’occasion du concert parisien d’Alter Bridge que nous avons eu l’opportunité de passer quelques instants en compagnie de Scott Phillips. Compte rendu de ce bref moment partagé avec le batteur…

Commençons avec quelques mots au sujet de votre dernier album, “AB III”. Il a été très bien reçu par les fans. Ma question est : de votre côté, en êtes-vous totalement satisfaits ? Ou voyez-vous, comme de nombreux groupes, un certain nombre de détails que vous auriez pu améliorer ?


Scott Phillips (batterie) : Je pense que nous en sommes très satisfaits. On n’a pas eu énormément de temps pour l’écrire, en tout cas pour le construire, en groupe j’entends, spécialement comparé à “Blackbird”, notre album précédent, pour lequel on a pu travailler presque un an, tranquilles, sans tournée. Du coup le disque a énormément évolué entre ce qu’il devait être au début et ce qu’il était au final. Pour “AB III”, on venait juste de finir une tournée, d’achever la réunion de Creed, Myles [Kennedy (chant)] sortait de studio pour son album solo et travaillait également avec Slash, et on s’est retrouvés avec seulement quelques mois pour tout agencer, tout préparer. Qui sait ce que ça aurait donné si on avait eu plus de temps. Mais on est très contents, d’autant que les fans l’accueillent très bien et que la presse semble l’aimer, ce qui est nouveau pour nous [sourires], donc… Ouais, on en est très satisfaits.

Dans l’ensemble, pensez-vous que ce disque présente de réels points forts ou points faibles ?

S : Je ne sais pas. Globalement, je le vois comme un beau travail. Bien sûr, je pourrais plus y repenser, et me dire qu’il est possible de retoucher ceci ou cela, mais on est tous contents du résultat. Pour ce qui est des chansons, c’est un disque un peu plus sombre, au niveau des paroles comme de la musique, mais il y aussi des moments plus exaltants pour équilibrer. On est satisfaits de l’ensemble.

Avez-vous –à titre personnel- une chanson favorite sur l’album ? Et si oui, est-ce à cause de son sens ou juste parce que vous aimez ce que vous avez à jouer ?

S : Je pense que ma chanson préférée sur l’album est la dernière, “Words Darker Than Their Wings”. L’ambiance crée par la musique m’absorbe vraiment, j’ai vraiment été attiré par cette chanson la première fois que j’ai entendu Mark [Tremonti (guitare)] la jouer. Et les paroles ont beaucoup de sens également. Le sujet est similaire à d’autres chansons sur le disque, c’est un voyage du début à la fin dans la vie de quelqu’un qui croit en quelque chose toute sa vie et découvre finalement que cette chose en particulier n’est peut-être pas vraie. Je pense que c’est vraiment le morceau que j’aime écouter. On ne le joue pas en concert, on joue environ six ou sept chansons du nouvel opus. Le morceau le plus amusant à jouer doit être, peut-être “Isolation”.

Vous pouvez marteler la batterie…

S : Oui ! (grand sourire)

Est-ce que le groupe pense déjà au prochain album ? Avez-vous des idées qui doivent en faire partie ?

S : Rien sur lequel on ait travaillé. Je sais que Mark et Myles sont en permanence en train d’écrire et de travailler sur de nouveaux éléments, que ce soit pour Alter Bridge, ou pour les projets personnels de Myles, ou pour l’album solo dont Mark a parlé et qui devrait voir le jour beaucoup plus tard, mais ils sont toujours en train de travailler d’abord pour Alter Bridge, et si éventuellement ils créent quelque chose de trop éloigné de ce qu’Alter Bridge ferait, là ils l’emploient pour d’autres projets. Mais pour le moment, rien n’a été travaillé en groupe, c’est le début du début. On se concentre juste sur les concerts, on essaie de bien jouer, et de ne pas trop massacrer les morceaux.

Bien, passons à votre tournée actuelle. Ma première question à ce sujet : voyez-vous de grandes différences entre vos fans américains et européens ?

S : Oui ! Pour le moment, on peut dire qu’on préfère le public européen. Ils semblent beaucoup plus passionnés, plus engagés dans le concert et dans la musique. Et ce soir, c’est une petite salle, ce sera complet, mais pas mal de concerts que nous avons faits au Royaume-Uni ou ailleurs en Europe ont eu lieu devant 1500, 2000, 3000, jusqu’à 5000 personnes. En comparaison, ça fait un moment qu’on n’a pas fait de tournée aux États-Unis, mais la plupart de ces concerts ont eu lieu devant 700, 800, parfois peut-être 1000, voire 2000 personnes selon l’endroit. On adore le public américain, mais je pense qu’on leur balance tant de musique qu’ils en deviennent indifférents aux groupes qui passent en ville, pour eux il n’y a plus d’événement, c’est normal, alors qu’ici, lorsqu’on passe dans une ville, c’est quelque chose, les fans sont excités, ils voyagent pour venir aux concerts, etc.

Comme vous l’avez dit, ce soir c’est une petite salle, vous jouez ici, à La Maroquinerie, qui doit accueillir peut-être 300 personnes-

S : Je pense que c’est 500 places. Du moins c’est ce qu’on nous a dit.

Honnêtement, je ne sais pas où on mettra 500 personnes…

S : Je ne sais pas non plus comment on fait entrer 500 personnes, mais bon…

Je vais rester sur mon estimation de 300.

S : Oui, c’est assez juste, je pense.

Donc, ce n’est pas la plus grande salle de Paris, et il s’agit de votre seule date française de cette tournée. Euh… Qu’est-ce qu’on vous a fait ?

S : (Rires)

Ce n’est pas vraiment notre choix, c’est le genre de chose qu’il faut voir avec notre management, et notre agent ici en Europe. On décide, ou plutôt ils décident avec nous, puisqu’on a quand même une influence, mais… Vous savez, on a essayé, après le premier album, je peux me tromper mais peut-être deux fois, de faire des concerts à Paris, et il n’y avait pas beaucoup de public. Notre agent nous avait alors fait comprendre que le rock était mal en point sur Paris. C’est pourquoi je pense qu’on avait fait l’impasse pour la sortie de “Blackbird”. Mais là, on avait envie de retenter notre chance ici, d’essayer de rallumer cette passion du rock. C’est un petit concert, mais il est complet depuis un bon moment, c’est sans doute la preuve qu’il y a des fans de rock, ici, à Paris. On va revenir, autant qu’on pourra. Avec un peu de chance, dans une salle plus grande (sourires) la prochaine fois. Vous savez, on a toujours eu de bonnes expériences ici, c’est juste qu’on ne parvenait pas à vendre assez de billets pour pouvoir financer un passage.

Oui, c’est vrai que le marché est assez éclaté. […] Beaucoup de groupes se retrouvent à jouer dans des salles relativement petites, alors que les concerts sont complets très vite…

S : Vous savez, c’est parfois aussi une stratégie. Faire une petite salle qui affiche complet, ça crée une demande. Lorsque le groupe revient dans une salle plus grande, les fans se précipitent sur les places de peur que le concert soit complet à nouveau. De là, on peut jouer dans des salles de plus en plus grandes…

Ce soir, le groupe en première partie est Evenline. Comme vous le savez peut-être, leur musique est largement inspirée de la vôtre, avec Creed et Alter Bridge. Je voulais savoir ce que ça vous faisait de savoir que vous allez jouer avec des fans.

S : C’est vraiment cool ! En fait, lors d’un grand nombre des concerts que nous avons faits en Europe, nous avons découvert que nos premières parties, ou tout du moins certains membres des groupes, étaient des fans, qui étaient déjà venus nous voir jouer, et avaient sauté sur l’opportunité de jouer avec nous. C’est un réel plaisir pour nous, de savoir que quelqu’un a aimé notre musique au point que ça le motive à jouer d’un instrument, et de partager la scène avec lui… C’est génial. Comme les gars avec qui on a joué hier, plusieurs nous ont dit qu’on était une inspiration pour eux et leur musique, c’est… Il faut les voir, ce sont de bons groupes ! Et ça… Ça nous fait du bien.

Avez-vous une idée précise de ce qu’un concert d’Alter Bridge est ou doit être ?

S : Je ne sais pas. On essaie de faire au mieux. On essaie faire participer les gens, de leur faire sentir qu’on est tous là pour faire partie d’un grand spectacle. Le public est inclus, pas comme s’il s’agissait de quatre gars sur scène, on fait ce qu’on a à faire, on ignore le public, et on attend de lui qu’il nous vénère. Ce n’est pas notre truc. De même, on essaie de ne pas trop ressembler au CD, car pour nous, un live est un live, c’est là qu’on peut changer des choses. Si je voulais écouter un groupe jouer comme sur le CD, je lancerais le CD plutôt que de dépenser vingt euros et d’aller écouter le groupe jouer la même chose. Néanmoins, je pense qu’on joue de manière assez proche du disque, et qu’on respecte avec une certaine précision ce qu’on a enregistré. On a juste modifié certaines choses pour les concerts, pour que les fans aient une expérience live.

Est-ce que vous appréciez tous la scène comme c’était le cas au tout début de vos carrières ?

S : Oui, oui, clairement ! Si ce n’était pas le cas, je pense qu’aucun de nous ne continuerait. Jouer en live est probablement la motivation qui nous pousse à faire ça. Travailler en studio, c’est génial, mais on le fait une fois, et voilà, c’est sur le CD. On aime tous jouer, interagir avec les fans. Je pense que c’est tout aussi excitant que ça l’était la toute première fois qu’on a donné un concert ensemble.

Je voulais vous demander s’il y a des “rôles” dans le groupe. Comme, par exemple, un gars marrant, un gars sérieux, un gars grognon…

S : On a tous un bon sens de l’humour. Il n’y a pas un patron, que tout le monde suit. On s’entend tous très bien, ce qui est très important. Mark et moi avons été membres d’un même groupe, que ce soit Creed ou Alter Bridge, ces quinze dernières années. Brian [Marshall (basse)] aussi était là pendant la plus grande partie de cette période. Vous savez que Myles est le nouveau de la bande, mais on joue ensemble depuis maintenant six ans, et on se connaît depuis dix ou onze ans. Tout le monde a ses petits défauts. Il s’agit juste de quatre amis qui traînent et font de la musique ensemble ; ce qui, au final, est très important pour notre longévité. Il y a tellement de groupes qui commencent amis, et tel ou tel mec se met à détester l’autre gars, et ils continuent comme ça pendant des années et des années, et ça se ressent dans la musique, et sur la scène… Bref, c’est important pour un groupe que tout le monde s’entende. Mark est le professionnel accompli, qui s’exerce beaucoup et cherche à s’améliorer avec son instrument. Brian est bizarre. Je considère que je suis le gars marrant. Et Myles présente quelques défauts, mais d’une façon adorable, dans le bon sens. Il est très spécial en ce qui concerne sa voix. On a quatre personnalités distinctes, mais on a aussi beaucoup en commun.

Quelque chose à ajouter ?

S : Oui, certainement. Je souhaite bonne chance à votre site, surtout s’il n’est là que depuis quelques mois. Avec un peu de chance, quand on reviendra durant l’été ou l’hiver prochain, vous serez devenu une grosse référence. J’espère que tous vos lecteurs aiment l’album, aimeront cette interview, et qu’un jour ils auront l’opportunité de nous voir jouer en live !

 

 


Crédit photos : Ashley Maile & Aurélie Humez

Site web : alterbridge.com