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KRAFTKLUB @ La Gaîté Lyrique (18/01/18)

Rock allemand rime souvent avec metal théâtral à la Rammstein et mélancolie adolescente de l’époque où Tokio Hotel poussait toute une génération à ne pas choisir l’espagnol en LV2. Pourtant, loin de la pénombre, des flammes et du trop-plein d’eye-liner, le groupe allemand auquel vous devriez vous intéresser, c’est Kraftklub. Un peu comme si feu Skip The Use avait grandi sur le rivage opposé du Rhin, le groupe de Chemnitz s’est créé un nom dans son pays en mixant influences punk rock, mélodies ultra accrocheuses, énergie détonante et discours parfois engagé, un touche d’indé, de rap et d’autodérision en plus. Après un premier passage par Paris en 2015, la bande est revenue à l’assaut du public français pour lui présenter son nouvel album, “Keine Nacht Für Niemand”.

Pour la conquête du public français, ça semble compliqué. Toute la communauté allemande de Paris semble s’être réunie à La Gaîté lyrique. Et pour cause, l’Office franco-allemand pour la Jeunesse y tient sa Cérémonie des Voeux 2018, et c’est à cette occasion que Kraftklub a été convié. Mais loin de l’ambiance soirée cocktail du hall, une soirée d’un type tout autre se prépare dans la salle de concert. Sur scène, SOFIANE M. de OUÏ FM s’occupe de la programmation musicale à la sauce allemande en glissant “99 Luftballons” entre deux tubes des Red Hot Chili Peppers.

 

 

Après un court intermède chorégraphique mêlant danse contemporaine et hip hop, la lumière s’éteint et une voix que tout le monde connaît résonne : celle de Google Traduction. Dans un français approximatif, elle donne le ton de la soirée en présentant le groupe à venir comme les dignes héritiers des auteurs les plus raffinés d’Allemagne, entraînant une vague de rires dans le public. Après avoir déclaré que “l’allemand ne sonne pas bien”, la voix finit par annoncer KRAFTKLUB, qui débarque sur scène tout en rouge et blanc, et embraye sur “Band Mit Dem K”. Il n’en faut pas plus au public pour partir au quart de tour, lançant un moshpit dès le deuxième morceau, “Fenster” et hurlant chaque parole. La bande, véritable machine à pogos, enchaine les morceaux survitaminés extraits de ses trois albums, “Mit K”, “In Schwarz” et “Keine Nacht Für Niemand”. On ne saurait pas dire qui, de l’audience ou du groupe, est le plus remonté à bloc. Wall of death, pogos, moshpit, circle pit, stage dive, slam, c’est une vraie démonstration de tout le vocabulaire de la chorégraphie de concert que fait l’assemblée, majoritairement allemande.

 

 

S’excusant de ne parler ni très bien anglais, ni très bien français, ni très bien allemand d’ailleurs, le chanteur Felix Brummer mélange les trois langues, se donnant tout le mal possible pour témoigner de sa reconnaissance et raconter des blagues en glissant du français. À l’aide d’une feuille écrite en phonétique, il appelle successivement en français l’auditoire à “taper dans les mains”, “sauter” et “danser”. Souriant de la première à la dernière seconde du show, l’hyperactif showman, à mi-chemin entre rappeur et chanteur punk, pogote avec ses fans sur “Eure Mädchen” et se fait porter sur “Unsere Fans”. À ses côtés, ses bandmates Karl Schumann (chant/guitare), son frère Till Brummer (basse), Steffen Israel (clavier/guitare) et Max Marschk (batterie) sont moins démonstratifs. Après une succession de morceaux aux riffs énervés et à la rythmique implacable, les deux frères Brummer font un virage radical avec le rap pas très sérieux “500K”, qui semble transformer le sol en trampoline géant tant le public bondit de plus belle. Avant de s’éclipser rapidement en coulisses, Kraftklub se réjouit d’avoir rempli la salle dans son intégralité, doublant la taille de son public depuis son premier passage à Paris. De retour sur scène, c’est sur un ton moins festif que Felix Brummer introduit la plus engagée “Schüsse In Die Luft”, en évoquant la montée de l’extrême droite en Allemagne et du Front National. Ultime occasion de bondir, le groupe finit son show avec deux de ses titres les plus efficaces en live, le bien nommé “Randale” (“émeute” en allemand) et “Songs Für Liam” (et ses références aux frères Gallagher), ponctuées d’une bonne douzaine de stage diving pas toujours très fructueux, déclenchant l’hilarité du leader.

 

 

Grâce à son énergie communicative, ses morceaux ultra efficaces et sa générosité, Kraftklub fait de son concert un grand rassemblement fédérateur, si bien qu’il est impossible de ne pas être conquis par la bande de Chemnitz. Et promis, même pas la peine d’avoir fait allemand LV1 pour apprécier sa musique.

Setlist :

Band Mit Dem K
Fenster
Ich Will Nicht Nach Berlin
Wegen Dir
Liebe Zu Dritt
Eure Mädchen
Am Ende
Irgendeine Nummer
Fan Von Dir
Unsere Fans
Wie Ich
Karl-Marx-Stadt
500 K
Chemie Chemie Ya
—-
Schüsse In Die Luft
Randale
Songs Für Liam