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Three Days Grace – Alienation

L’attente est enfin finie pour les fans de Three Days Grace ! Avec Alienation, Adam Gontier signe son retour dans la formation post grunge/alternatif mythique des années 2000. Le chanteur originel retrouve le groupe après 11 ans d’absence, mais aux côtés de son successeur Matt Walst, dans une configuration inédite à deux voix. Ce 8e album du groupe marque une nouvelle ère et la recherche d’une nouvelle identité. Quelque part entre hommage, rédemption et modernité.

Pierre Feuille Ciseau

One, two, here we fucking go!” De l’aveu de Matt Walst, ce slogan guerrier est directement inspiré de la clameur du public lors d’un concert à Glasgow. C’est donc galvanisés par leurs fans que le groupe attaque ce nouveau chapitre. Et il s’ouvre avec une déflagration ! “Dominate” est un hymne survolté, aux accents nu metal et à la production massive. Adam Gontier prend le lead dès le début du morceau et nous met en garde : “Il n’y a rien de plus dangereux qu’un homme qui a quelque chose à prouver, mais rien à perdre“.

Une mise en garde qui ne va pas tarder à se concrétiser. Dans une synergie parfaite, Adam et Matt scandent leur volonté de domination dans un refrain accrocheur, parfaitement réalisé. Un titre qui devrait rester longtemps dans les setlists du groupe… et dans les playlists muscu !

Dans cette troisième version de Three Days Grace, la vraie réussite réside dans la complémentarité du duo vocal et l’audace de ce pari inédit. En lieu et place d’une compétition toxique entre les deux leaders, règne une franche amitié et un processus de composition qualifié de “naturel” par Gontier. Le duo va même jusqu’à se départager à “Pierre-Feuille-Ciseaux” pour savoir qui chantera certaines parties.

Cette synergie traverse tout le disque avec certains moments de fulgurance. Dans l’excellent “In Waves”, le groupe explore les difficultés à surmonter le deuil, entre hantise des souvenirs et impuissance. Les voix s’alternent, se mêlent et se confondent, dans un ressac incessant entre puissance et émotion torrentielle. Un véritable highlight.

L’art de la démesure

Pour ce nouvel album, le groupe retrouve Howard Benson, leur producteur de longue date, à la supervision des voix. Il s’entoure de deux figures incontournables de la scène alternative : Zakk Cervini et Dan Lancaster. Membres du cercle intime de Bring Me The Horizon, ils ont aussi façonné le son d’artistes comme Blink-182 (California, 2016), Architects, Good Charlotte ou 5 Seconds Of Summer. S’ils sont reconnus comme des pointures de la production moderne, ils sont aussi régulièrement décriés pour pousser l’industrie musicale alternative vers une sorte d’uniformisation du son, surproduit et déshumanisé.
Une ambivalence en miroir de la scène actuelle, entre innovation et standardisation.

Et il faut bien le dire : L’omniprésence de l’auto-tune, des batteries triggées et des textures électroniques saute aux oreilles. Cette démesure technique divisera certainement une partie de la fanbase et des nostalgiques d’une époque analogique que l’on pourrait aisément qualifier de “vintage“. L’exemple frappant de cette nouvelle orientation est le morceau “Apologies”. Une power ballad modernisée qui vient puiser allègrement dans tous les codes de la pop music. Déstabilisant au premier abord, ce morceau diablement efficace est indéniablement un moment incontournable de ce disque.

Autre titre notable, “Never Ordinary” dévoile également toute la maîtrise du groupe et de son équipe à construire un tube moderne, fédérateur au-delà de la sphère rock habituelle. À noter, la présence de la violoniste Lindsey Stirling qui vient soutenir le morceau subtilement, sans alourdir un arrangement déjà massif.

ONE-X, 2X

Bien conscient du statut culte de ses deux premiers albums, la formation canadienne a savamment parsemé ce disque d’une dose de fan service. Avec son beat “Four-on-the-floor” et la basse de Matt Walst aux mids surboostés, le single “Mayday” fait un bond dans le temps et vient saluer le célèbre “Animal I Have Become”. “Deathwish” navigue également en terrain connu. Le riff de ce morceau taillé pour la radio (vous avez dit “butt rock” ?!), est un hommage direct à “Time Of Dying”, autre morceau emblématique de One-X, l’album phare du groupe sorti en 2006. Côté paroles, un petit easter egg se cache dans le vers “With two X’s on my eyes“, rappelant le titre de travail de l’album, 2X, tout en confirmant la volonté de tracer une ligne directe entre passé et présent.

Sur cette note nostalgique, “Another Relapse” et son break colossal viennent clôturer l’ensemble dans un final tout en intensité, porté par le jeu super expressif de Barry Stock à la guitare et un refrain qui fera vibrer nos vieux cœurs de millennials. Une véritable madeleine de Proust version MySpace : sacs au Tipp-Ex, jeans troués, écouteurs emmêlés et mèches cramées au lisseur compris. Tu vois, Maman, c’était pas une phase !

Avec Alienation, Three Days Grace continue d’incarner un rite de passage vers les musiques plus extrêmes et effectue sa mue avec succès. Si un penchant certain pour la surproduction peut être reproché, cela marque également l’engagement clair du groupe à embrasser le futur tout en surfant sur le revival 00’s. Reste à voir si la formule ne s’essouffle pas.

Informations

Label : Sony Music / RCA Records
Date de sortie : 22/08/2025
Site web : threedaysgrace.com

Notre sélection

  • Apologies
  • In Waves
  • Another Relapse

Note RUL

 3/5

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