Chroniques

Thirty Seconds To Mars – America

Après avoir entamé sa tournée promo et un passage remarqué par Paris il y a quelques semaines, Thirty Seconds To Mars nous présente aujourd’hui son cinquième album studio au nom patriotique de “America”.

Il aura fallu cinq ans à Thirty Seconds To Mars pour concocter son nouveau disque. Cinq années pendant lesquelles le groupe semblait se reposer sur ses lauriers, faisant alors de ce nouvel effort l’un des plus attendus de la scène rock/alternative. Malheureusement, et pour la deuxième fois consécutive, l’énorme machine se grippe devant nos yeux : un nouvel essai qui parait inachevé et fade, malgré les multiples tentatives de la formation à rester dans l’ère du temps.

Et si “Walk On Water” ou encore “One Track Mind” ne vous avait pas séduit, ce ne sera pas le cas du reste. Du patriotisme, de l’électro et beaucoup de paillettes, trois mots qui résument à eux seuls l’écoute qui va suivre. Pour la musique rock et l’identité Mars, il faudra repasser.

L’ensemble s’ouvre alors sur “Walk On Water”, single phare de l’album, suivi de “Dangerous Night”, “Rescue Me” et “One Track Mind”. Si A$ap Rocky nous sort la réplique suivante : “Heard it’s only Thirty Seconds To Mars, then it take you even less just to get to my heart”, il en faudra en fait bien plus au groupe pour nous convaincre. Après quatre morceaux qui avaient donc déjà ouvert le débat, s’ensuit “Monolith”, un entracte assez plaisant qui reprend les codes du succès “This Is War”. Plus belle surprise encore que de trouver juste après Halsey en featuring, chanteuse en vogue et reconnue pour sa personnalité éclatante. Mais la surprise ne se prolonge pas une fois “Love Is Madness” lancé. Un morceau très lent où même après plusieurs écoutes, on cherche encore le point positif d’une collaboration qui aurait pourtant pu être explosive. On en est à la sixième chanson, et guitares, basse et batteries censées être à la base d’un groupe rock se font encore attendre.

“Rescue Me” nous avait déjà averti de ces choix artistiques : il fallait s’attendre à une voix hyper modifiée pour Jared Leto, agrémentée de pads électro empruntés à n’importe quel morceau pop radiophonique. L’expérimentation musicale, pourtant fer de lance des débuts de 30STM, semble avoir disparue. Pourtant on comprend la volonté de créer des titres résonnants et grandioses avec “Great Wide Open” comportant les chœurs habituels chez Thirty et, pour la première fois depuis le lancement de l’écoute, une guitare mélodieuse. Mais c’est un échec. “Dawn Will Rise” commence avec une phrase en français, qui nous rappelle “Hurricane” et “Up In The Air”, et quand la voix de Jared Leto se fait entendre, celle-ci est entachée d’un vocodeur qui lui fait perdre toute résonance. Il nous aura fallu attendre dix chansons pour trouver quelque chose à se mettre sous la dent : une piste acoustique portée par Shannon Leto au chant, pourtant habituellement derrière les fûts.

L’artwork de “America” et l’esprit qui l’entourent, sont de véritables hymnes à la gloire des Etats-Unis, mais cela ne nous fait pas chavirer. Thirty Seconds To Mars nous avait habitué à des visuels soignés et grandioses, mais le manque de moyen et d’implication se font aujourd’hui sentir.

Une fois l’écoute terminée, de nombreuses questions se posent : où est donc passé l’énergie d’un groupe qui faisait vibrer les foules il y a quelques années ? Où est passé l’identité Mars qui en faisait un projet artistique à part entière ? Et où est donc Tomo Milicevic, guitariste et pilier de Thirty Seconds To Mars depuis plus d’une décennie ?

L’éviction avouée à demi-mot de Tomo suscite déjà bon nombre de réactions auprès des Echelons qui veulent alors faire basculer cette décision. Mais les frères Leto semblent déjà tellement loin de leurs fans que ces revendications resteront lettre morte. La base même de la formation, l’Echelon commence à s’affaiblir.

Ce cinquième effort ne séduit pas plus que “Love Lust Faith + Dreams”, il déçoit même davantage. Reconnue pour sa créativité, la bande de Jared Leto nous livre une coquille vide. Pourtant, la bonne volonté est présente, et montre que les musiciens veulent rester sur le devant de la scène. Mais à quel prix ? Il suffit d’écouter le résultat pour comprendre que cela ne permettra pas d’emporter l’adhésion des auditeurs. Si son prédécesseur avait déjà divisé les auditeurs et amenait au trio (qui n’en est plus un) maintes critiques, “America” apporte le coup de grâce à une formation qui déçoit même sur scène désormais. 

Informations

Label : Universal Music / Polydor
Date de sortie : 06/04/2018
Site web : www.thirtysecondstomars.com

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Note RUL

1.5/5

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