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Sam Fender – Hypersonic Missiles

Le petit chouchou du rock indépendant anglais nous livre enfin son premier album. Entre textes acides et voix tranchante, Sam Fender se fait l’observateur cynique de la société.

Avec sa gueule d’ange, digne d’un mannequin de “Abercrombie & Fitch”, Sam Fender pourrait chanter des chansons pop sucrées à propos d’un garçon qui rencontre une fille et qui en tombe amoureux. Il préfère plutôt chanter sur des choses qu’il vit, qu’il constate ou qui le font réagir : que ce soit le suicide de jeunes hommes (“Dead Boys”) ou les enfants assassinés à Gaza (“Hypersonic Missiles”, probablement le meilleur morceau du disque).

Dès cette première chanson, on est frappé par la puissance de sa voix, conjurant les esprits de Springsteen pour la tessiture et les textes, et de Dallas Green pour le tranchant de sa voix. Sans oublier le saxophone rappelant les meilleurs titres de “Born To Run” (1975). En particulier le sublime “You’re Not The Only One”, ressemblant à une B-side d’un album obscur du Boss.

Sam Fender n’est pas un cliché typique du jeune mâle blanc anglais. Il écrit ses textes, ses mélodies, est bercé par le rock seventies et les chansons à texte social. C’est ce qui marque chez cet artiste : il n’est pas dans les canons des maisons de disque. Qui aurait laissé sa chance à cet artiste à la belle gueule et aux textes si sombres ? Il est en décalage complet avec ce son si années 1970 mais en même temps si intemporel.

Mélancolique et euphorique, lancinant et douloureux

Les ombres de Patti Smith et Tom Petty flottent sur chacun de ses titres. Il ne recrée rien dans sa musique mais il a le mérite de le faire bien et avec beaucoup de sensibilité, de douleur et de cœur.

Chaque chanson est une petite histoire en elle même : le désir de quitter sa ville natale ou le sentiment de savoir que plus rien ne nous y retient sur “Satuday” ou “Leave Fast” ou l’amour adolescent avec “Call Me Lover”. Son essai à dénoncer sur “White Privilege” sonne un peu faux. Un morceau qui aurait mérité à être plus travaillé.

Niveau musique, les influences anglaises sont évidentes : difficile de ne pas retrouver la guitare de Johnny Marr sur certaines mélodies. Les ballades à la guitare acoustique/électrique sont sublimes et déchirantes. Les titres les plus “construits” sont dénaturés. On aurait aimé retrouver ce son brut si intense sur tous les titres.

Les questionnements qu’il pose sont brûlants. Difficile de faire fi du Brexit ou de la réalité socio-économique difficile de l’Angleterre. Comme il le dit lui même, il n’a pas les réponses aux questionnements qu’il pose et ne souhaite pas être consacré comme héros de la classe ouvrière. Ce serait d’ailleurs le cloisonner dans un rôle qui ne lui convient pas.

Sam Fender nous offre un premier album extrêmement abouti musicalement. Tout n’est pas parfait, mais est-ce que nous souhaitons vraiment écouter de la musique parfaite ? Est ce qu’un peu de brut de décoffrage n’est pas souhaitable ? Peut être que ce n’est pas le premier disque parfait, mais c’est le meilleur qu’il pouvait faire.

Informations

Label : Universal Music / Mercury
Date de sortie : 13/09/2019
Site web : www.samfender.com

Notre sélection

  • Hypersonic Missiles
  • You’re Not The Only One
  • That Sound

Note RUL

 4,5/5

Ecouter l’album

Laura Navarre
J'ai annoncé à mes parents à 16 ans que mon objectif professionnel était de produire la prochaine tournée de U2.