Robert Plant – Saving Grace

Robert Plant a toujours été un maître de la réinvention, et avec Saving Grace, il nous livre une œuvre qui, loin de se tourner vers le passé, incarne son éternelle soif de découverte musicale. Avec un groupe qu’il a baptisé du même nom que l’album, Plant plonge dans des territoires acoustiques et intimistes. Le résultat ? Un album de reprises éthéré où la musique devient une invitation au voyage sensoriel.

A la croisée de l’acoustique et de l’intime

Le groupe réunit des artistes au profil aussi éclectique que singulier : Suzi Dian, dont la voix cristalline s’accorde à merveille avec celle de Plant, le multi-instrumentiste Matt Worley, le guitariste Tony Kelsey, le batteur Oli Jefferson et le violoncelliste Barney Morse-Brown. Ensemble, ils forment une alchimie parfaite qui mêle avec délicatesse blues, folk, gospel, country, et des accents de musique traditionnelle anglaise et irlandaise. C’est une véritable réunion de famille musicale où chaque membre apporte sa touche personnelle, mais où l’ensemble vibre comme une unité cohérente.

Saving Grace n’est pas un disque de reprises au sens classique du terme. Il revisite des morceaux oubliés ou peu connus dans lesquels Plant y infuse une nouvelle dynamique tout en conservant l’essence de chaque chanson. On y trouve des pépites du répertoire blues comme “Chevrolet” ou “Soul Of A Man”. Des chansons comme “Too Far From You” ou “Higher Rock” prennent ici une dimension nouvelle grâce à l’approche sobre et épurée du groupe, loin des excès et des démonstrations techniques. Nous conseillons tout de même d’écouter les morceaux originaux : déjà parce que ce sont des chansons qui gagnent à être plus connues tout comme leurs interprètes, et aussi pour mieux appréhender l’exercice de Robert Plant et de son groupe.

Le tour de force de l’album réside dans l’harmonie vocale entre Plant et Suzi Dian. À 77 ans, le vétéran de Led Zeppelin semble avoir mis de côté ses hurlements légendaires pour offrir une prestation empreinte de sensibilité. Cette évolution dans son chant témoigne d’une volonté de revenir à une forme de simplicité, où ne parle que la musique et les mots. Le résultat est un duo vocal d’une rare délicatesse.

Une production naturaliste et sans artifices

La production de Saving Grace se fait aussi écho de cette atmosphère intime. Les enregistrements, réalisés dans une grange et parfois à l’extérieur, baignent dans une aura bucolique, comme en témoigne le chant des oiseaux en arrière-plan de “Gospel Plough”. Cela ajoute à ce morceau traditionnel une énergie brute loin des contraintes du studio. Ce côté champêtre et rustique est une bouffée d’air frais dans un monde souvent saturé de productions et de mixage hyper policés et manquants d’âme.

Cet album est bien plus qu’une collection de reprises : c’est un voyage musical émotionnel mais aussi un témoignage précieux d’une évolution artistique maîtrisée. Robert Plant n’a pas fini de nous surprendre.