Chroniques

Motorhead – Under Cover

L’héritage de Motörhead s’étend à perte de vue. Être repris par Lemmy, dont nous sommes tous les orphelins depuis décembre 2015, est l’une des plus grandes distinctions musicales existantes. Après l’excellent “Bad Magic” (2015), et le live posthume “Clean Your Clock” (2016), il est légitime de se demander si la récente sortie d’archives résulte d’un travail méticuleux ou d’une motivation pécuniaire.

“Under Cöver”, composé de onze titres, fait la part belle à la scène punk et heavy metal. Le groupe insuffle ses décibels à travers des standards dont l’énergie n’est pas à démontrer. Souvent imitée, jamais égalée, l’empreinte sonore est avant tout caractérisée par la basse rugissante, et la voix rocailleuse du capitaine Kilmister. L’artwork mérite d’être mentionné, et applaudi. Pep Bonet est l’auteur de “Röadkill”, ouvrage minutieux de photographies argentiques noir et blanc sur la tête de möteur. Il signe des clichés qui raviront les admirateurs de la première heure comme les nouveaux venus dans la grande famille du rock n’roll.

Judas Priest (“Breaking The Law”) ouvre la marche dont l’allure ne faiblit pas un seul instant durant quarante-et-une minutes. Même quand il s’agit d’aborder le seul inédit du disque (“Heroes”), aucun traitement de faveur n’est accordé. Extraite des séances de “Bad Magic”, l’hymne de Bowie se voit parée de guitare grondante, de batterie fulminante, et d’un élément subtil ayant son importance. Les paroles de David font place à celles écrites par Lemmy. Le frontman, disparu treize jours avant le chanteur aux yeux vairon, s’approprie l’histoire de l’homme qui voulu être roi, pour ancrer sa vie dans la chaire de ce titre d’anthologie.

Le trio confirme sa volonté de donner aux morceaux leur dimension, des Sex Pistols (“God Save The Queen”) en passant par Rainbow (“Starstruck”) avec au chant Biff Byford de Saxon. Le fulgurant morceau de Metallica (“Whiplash”) termine en beauté pour acquiescer le chemin emprunté par la nouvelle génération ayant mûri l’idée de marcher sur leurs pas avec “Overkill” à plein volume sur la platine.

Cependant, dix titres sur onze sont déjà présents sur des albums, des faces B, et des compilations hommage. La sélection représente un léger aperçu du travail de reprise entamé par la formation durant ses quarante années dans l’industrie, et sur la route. Le parti pris de la production de se focaliser sur la période de la dernière formation est honorable. L’ère Mikkey Dee / Phil Campbell est pourtant incomplète, des morceaux de bravoure comme “The Trooper” (Iron Maiden) ou “It’s A Long Way To The Top” (AC/DC) sont absents de ce recueil.

L’ensemble manque d’une cohérence représentant l’esprit du leader, en nous offrant par exemple deux titres des Rolling Stones pour ne pas inclure la reprise de “Back In The USSR” des Beatles, groupe préféré de Lemmy. Un suivi chronologique est envisageable quand on sait que des reprises de Chuck Berry à KISS existent. Certains vous répondront de vous pencher sur la discographie de Motörhead pour retrouver les pépites manquantes. D’autres vous conseilleront d’écouter les Head Cats, formation où Kilmister visite son répertoire classique comme Buddy Holly ou encore T-Bone Walker.

Un projet comme “Under Cöver” se doit d’être exhaustif, et non concis. Rien ne l’empêche de continuer sur plusieurs volumes à l’avenir, mais l’aboutissement d’une telle entreprise en une seule étape valait l’attente, et le détour. Le résultat demeure gigantesque, même si nous sommes privés d’audaces qui resteront au stade de fantasme secret. Ne le niez pas, vous rêviez d’entendre sa basse vrombir et sa voix résonner sur “Life On Mars?”.

Informations

Label : Silver Lining Music / Warner Music
Date de sortie : 01/09/2017
Site web : imotorhead.com

Notre sélection

  • Heroes
  • Rockaway Beach
  • Whiplash

Note RUL

3/5

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