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Metallica – 72 Seasons

La sortie d’un nouvel album pour le plus gros groupe du monde et ses quarante ans de carrière est forcément un évènement qui s’accompagne toujours des mêmes interrogations? Metallica est-il encore capable de créer des hits ? James Hetfield et Lars Ulrich arriveront-il à retrouver la flamme créatrice ? La formation ne devrait-elle pas se contenter de tourner sur sa discographie actuelle ?

Un certain regard sur le passé

Metallica répond à la question de ses motivations pour produire de nouveaux morceaux avec le survolté “Lux Æterna”. Véritable déclaration d’amour à la scène et à la création musicale, le titre raconte que les musiciens ont toujours autant besoin de continuer à vibrer avec leur musique. L’hommage musical à Diamond Head, l’une des premières influences du groupe, conforte l’idée que les années passent et la passion reste intacte.

Ce nouveau disque est d’ailleurs l’occasion de poser un regard critique, éclairé et honnête sur le passé. Le morceau éponyme et inaugural “72 Saisons” est un livre ouvert sur la jeunesse de James Hetfield. Une plongée sans retenue sur les dix-huit premières années de sa vie et la manière dont elles l’ont façonné. Une enfance marquée par le cancer de sa mère, un carcan catholique qui refusait la médecine et une fermeture d’esprit oppressante. Si les paroles laissent transparaître de la vulnérabilité et une sincérité touchante, la musique prend le parti de rester sur un rythme entraînant.

Les premiers riffs du titre associés à une batterie nerveuse donnent immédiatement l’envie d’en savoir plus. Lorsque la machine s’emballe, l’auditeur retrouve les marqueurs réconfortants du quatuor américain. Des riffs incisifs, un chant puissant avec des punchlines cinglantes. Depuis plusieurs décennies, Metallica prend la parole pour mettre en avant les problèmes de dépression, de santé mentale et d’addiction. A travers les paroles, les documentaires, les interviews ou encore les échanges sur scène, ces thèmes sont devenus des fils conducteurs dans la discographie des Californiens.

Ainsi, “Screaming Suicide” explore le tabou du suicide, là où “Fade To Black” l’évoquait avec une forme de poésie et de noirceur sans espoir. De plus, le nouveau morceau ose poser les mots et offre une porte de sortie plus optimiste. Musicalement le titre est soutenu par un groove assez unique qui se retrouve autant dans les lignes de guitare que dans la voix d’Hetfield. En somme, c’est un dynamisme sans relâche qui soutient des paroles qui prônent l’acceptation de ces pensées sombres pour mieux les affronter et prendre le dessus.

Des démons difficiles à vaincre

“If Darkness Had A Son ” accroche rapidement l’oreille grâce à une intro puissante et quasi militaire. Le titre est un voyage au cœur d’une vilénie sans répit. Les assauts d’un monstre protéiforme, aux milles exactions servent de prétextes pour des voix et des riffs efficaces et des solos bienvenus. Toutefois, des tentatives rythmiques pas toujours assumées s’entendent en arrière-plan. Le fait est que du lourd et du très lourd l’album en a à revendre.

Impossible de ne pas penser à “Sad But True” à l’écoute de “You Must Burn!”. La lourdeur des riffs, le tempo bien particulier et le chant de James, tout est là pour se plonger dans un univers bien connu. Tandis que “Crown Of Barbed Wire” fait quelque peu écho au “King Nothing” dans sa thématique et sa couleur musicale. Le refrain permet au chanteur de tenter de nouvelles choses sur sa voix. Même si le titre traîne un peu longueur, il reste plutôt attrayant. Dans un autre registre, “Chasing Lights” illustre bien l’énergie des premiers disques avec une forme de punk thrashy bien acéré. Le solo de Kirk Hammett, bien que trop court, rappelle les grandes années du groupe.

“Too Far Gone” incorpore un peu de cet élan punk et fait la part belle aux solos bien ciselés. Le leitmotiv des paroles “Am I too far gone to save?” résonne comme une interrogation existentielle. En effet, James Hetfield continue de se batailler avec sa propre santé mentale et ses problèmes d’addiction. Le titre est une belle démonstration d’un groupe au sein duquel chaque membre a de la place pour s’exprimer. Le rendu n’en est que plus cohérent et donne envie d’en avoir plus. Il y a un mariage réussi entre des formules un peu old school, une envie de créer des choses inédites et une belle complémentarité des solos, des riffs et du chant.

Un record pour une fin majestueuse

72 Seasons se présente comme un long chemin introspectif dans les méandres des pensées des musiciens. Morceau après morceau, la conclusion de ce cheminement devient de plus en plus incertaine et nécessaire. Metallica soigne sa sortie et brise le record du morceau le plus long avec les onze minutes de “Inamorata”. Les riffs d’intro sonnent presque comme s’ils avaient été inspirés par des compositions de post black metal. Alliant noirceur et lourdeur pour une atmosphère parfaitement trouvée pour laisser James Hetfield exposer son agonie.

Misery, she needs me/ But I need her more“. Des paroles qui ramènent à beaucoup d’autres morceaux de la formation, écrites pendant la pandémie. L’isolation de la période laisse place à la complicité entre Hetfield et Hammett qui se répondent à coup de notes de guitare. Tout simplement jouissif ! Mais la bande ne se repose pas sur les lauriers. Elle ose, elle exprime et surprend par sa capacité à créer un passage minimaliste. Avec une batterie entêtante et des guitares envoutantes, le break fait mouche. “Inamorata” livre une succession de parties musicales avec une fluidité et une maestria absolue. Finalement, Metallica arrive avec ce morceau à faire le pont avec toutes les influences et les années de sa carrière. Un coup de maître !

Metallica retrouve de sa superbe avec 72 Seasons. Du thrash, du groove et beaucoup d’introspection pour un résultat convaincant.

Informations

Label : Universal Music / Virgin Records
Date de sortie : 14/04/2023
Site web : www.rockurlife.net

Notre sélection

  • Inamorata
  • Lux Æterna
  • Too Far Gone

Note RUL

 4/5

Ecouter l’album

1 Commentaire

  1. engagé dans la lutte contre la médiocrité musicale, je m’inscris en faux contre cette bien triste chose, beurk !

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Marion Dupont
Engagée dans la lutte contre le changement climatique le jour, passionnée de Rock et de Metal le soir !