Lorna Shore – I Feel The Everblack Festering Within Me

Trois ans après Pain Remains (2022), Lorna Shore revient avec I Feel The Everblack Festering Within Me. Attendu, presque redouté, l’album poursuit l’élan monumental du précédent sans chercher une réinvention totale. Le groupe préfère durcir son univers, l’assombrir, l’alourdir. Pas de respiration ici : c’est une plongée abyssale.

Un mur qui étouffe

Dès l’ouverture, aucune échappatoire. Les orchestrations fusionnent aux riffs et aux percussions comme une vague écrasante. Chaque frappe et chaque accord résonnent comme un effondrement. Là où Pain Remains laissait parfois filtrer une lueur, ce disque ferme toutes les issues et entraîne dans une spirale suffocante.

“Prison Of Flesh” illustre cette mécanique : montée oppressante, puis déchaînement sonore hypnotique. On se sent enfermé, mais happé par l’intensité. “Unbreakable” propose une variation : toujours brutal, mais traversé de mélodies brèves qui éclatent comme des lueurs dans le chaos. Lorna Shore ne se limite pas à frapper fort : il fait naître des émotions au cœur de la violence. Et puis vient “Forevermore”, sans doute l’un des morceaux les plus marquants du disque : ici, la rage s’allie à une forme de solennité presque tragique. Les orchestrations s’y font plus grandioses, presque cérémonielles, comme si chaque note pesait d’un poids funèbre. C’est une tempête émotionnelle où le désespoir se mêle à une beauté glaciale.

Des mots comme des plaies

Les textes prolongent cette suffocation : luttes intérieures, perte, douleur. Pas de concept figé, mais un besoin viscéral d’exorcisme. Will Ramos incarne cette rage avec une intensité rare : graves orageux, cris acérés, spectre vocal entier au service d’un combat sans fin.

La cohésion est renforcée. Là où certains passages paraissaient autrefois impénétrables, chaque élément trouve désormais sa place. Les orchestrations ne recouvrent plus la brutalité, elles l’amplifient. Résultat : un disque homogène et pointilleux, qui révèle ses nuances au fil des écoutes, au risque d’épuiser ceux qui attendaient plus de respiration.

Un pas de plus dans l’obscurité

Comparé aux précédents albums, tout est renforcé. Plus long, dense et ambitieux, I Feel The Everblack Festering Within Me divisera : sommet pour certains, œuvre asphyxiante pour d’autres. Impossible d’y rester indifférent.

Cet album ne transige pas et confirme pourquoi Lorna Shore domine sa scène. Écrasant d’abord, il dévoile ensuite une richesse insoupçonnée. Sombre et massif, il s’impose comme un accomplissement majeur, preuve que le groupe avance avec une vision claire et sans peur.