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Lofofora – Vanités

Trente ans de carrière… déjà ! Voilà bien un groupe qui brille tant par sa longévité que par la qualité de ses œuvres. En 2019, la fracture sociale est encore bien trop présente. Lofo a malheureusement du carburant pour nourrir la bête et injecter à “Vanités” une grosse dose de protestation.

La tempête après le calme

La sortie de “Simple Appareil” l’an passé fut comme une bouffée d’air frais dans le déluge sonore auquel nous avait habitué les Parisiens. Mais si la musique avait largement diminué le taux de décibels, les mots, eux, restaient chargés d’électricité. Cette plume incisive maniée par Reuno depuis trois décennies semble ne jamais manquer d’encre. Sans parler de textes engagés, l’essence de ces derniers est toujours tirée de la triste actualité. Il faut dire qu’il s’en est passé des choses dans notre pays depuis l’an passé. Cette fronde sociale, cette colère collective et la façon dont nous nous comportons les uns avec les autres sont autant de sujets sensibles qui nourrissent ses écrits.

Melting potes

Depuis dix ans, le line up du band est on ne peut plus stable. Et cela se ressent clairement tant l’alchimie entre les musiciens est palpable. Proposant un condensé de tout leur savoir-faire, Vincent Hernault et Phil Curty bénéficient d’un mixage absolument redoutable et déploient l’artillerie lourde sur la section rythmique. Dès le premier brûlot “De Bonne Guerre”, on ressent la frappe massive nous exploser en pleine figure accompagné d’une basse ronde et généreuse. “L’Exemple” et son intro furieuse continuent de nous rassurer quant à la direction prise sur cette galette.

Daniel Descieux a rangé l’acoustique et on sent ici le besoin de dégainer du riff par parquet de douze. Tantôt très metal, tantôt très keupon, le six-cordiste se fait plaisir. Sur “Les Fauves” on sentirait presque quelques réminiscences black metal tandis que “Le Refus” qui suit nous ramènerait aux plus belles heures punk de The Exploited. Tout l’album est fait de cela, mêlant les styles qui ont fait les beaux jours du groupe et formant une œuvre malgré tout très homogène.

Le chant de Reuno est quant à lui complètement possédé. Son phrasé, reconnaissable entre mille, fait encore des étincelles. Qu’il parle ou qu’il hurle, on ne peut qu’être happé par son pouvoir hypnotique. “Le Venin” est l’un des plus beaux exemples illustrant cela. Tel un serpent se faufilant entre les pavés, on sent sa rage exploser quand elle nous saute en plein visage. Maturité oblige, sa voix ultra maîtrisée n’a peut être jamais été aussi bien mise en son.

Joyeux anniversaire et merci pour le cadeau

Vous l’aurez compris, Lofo a frappé fort et l’a fait de manière extrêmement intelligente. En effet, si les sujets abordés sont souvent emprunts d’une certaine gravité, ils sont traités de manière très positive et transpirent l’optimisme contagieux. Les aficionados de la formation auront à cœur de retrouver quelques aspects de ses anciens travaux notamment “Le Fond Et La Forme” (2012) et “Dur Comme Fer” (1999). Un clin d’œil visuel de ce dernier a d’ailleurs été savamment placé dans le très joli visuel du petit dernier.

Ceux qui suivent depuis longtemps la carrière des Parisiens seront donc ravi de cette offrande synthétisant à merveille leur discographie. Les plus jeunes qui cherchent à échapper à un quotidien de plus en plus morose trouveront ici un refuge bienvenu.

Le Lophophora au Mexique est une variété de cactus sans épines. Ce Lofofora là est piquant, addictif et risque fort de tourner en boucle aux côtés des grands classiques de son répertoire. Et comme le disait Al Pacino dans “L’Associé du Diable” : “La vanité… c’est décidément mon pêché préféré !”.

Informations

Label : AT(h)OME
Date de sortie : 08/11/2019
Site web : www.lofofora.com

Notre sélection

  • Bonne Guerre
  • Le Venin
  • Le Refus

Note RUL

 4,5/5

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