Chroniques

Kvelertak – Nattesferd

Symbole que le black metal inspire plus qu’il n’effraie aujourd’hui, les Norvégiens de Kvelertak prouvent, depuis leur premier album en 2010, que l’on peut rendre sexy et accessible les blasts et les cris sur-aigus. Le premier album éponyme était un concentré de hardcore très rock n’roll, le tout enrobé dans un emballage black qui rendait le tout à la fois groovy, mais aussi très agressif. Le deuxième opus, “Meir”, fut un immense succès, bien que l’influence black metal avait légèrement diminué. Ce troisième effort était donc extrêmement attendu pour toute la fanbase du groupe, bien impatiente de voir dans quelles aventures la formation s’est embarquée cette fois-ci.

Et si ce sont les cris et les blasts, caractéristiques au black metal, qui ouvrent ce disque, on sent dès la deuxième moitié de “Dendrofil For Yggdrasil” que le propos s’est adouci et que le sextette avait envie de balancer de la mélodie qui reste en tête. Car, comme vous le découvrirez dans notre interview, les membres ont révisé leurs classiques en terme de “dad rock”. En découle un premier single “1985” hyper heavy et mélodique. Mais vus les retours engendrés par ce single, la sauce semble avoir pris !

Si les chansons même les plus agressives de Kvelertak avaient leur dose de groove, les rendant relativement accessibles, l’effort sur cet essai a été fait pour épurer encore plus les compositions. Ainsi, on se surprend à bouger la tête et à remuer du pied non-stop durant les cinquante minutes que durent cet ensemble. Un combo qui prend même l’initiative plusieurs fois de ralentir le rythme pour envoyer des refrains extrêmement mélodiques, ne gardant que la voix d’Erlend comme seul élément agressif (“Nekrodamus”, “Ondskapens Galakse” et son magnifique pont de fin de chanson).

Envoyer “de la musique” c’est bien beau, mais si le tout ne s’harmonise pas, le projet tombe à l’eau. Et si Erlend ne se met pas à chanter comme Bruce Dickinson, il se débrouille cependant pour que son chant extrêmement saturé puisse groover et nous offre son lot de refrains fédérateurs qui ne manqueront pas de rendre le public fou en concert (“Svartmesse”, “Heksebrann”). Mais on sent tout de même qu’il fallait sacrifier un peu de sa participation pour pouvoir mener à bien cette entreprise de rendre ce nouvel album plus mélodique. Ainsi, le chanteur sait s’effacer pour laisser des plages musicales entières, parfois pendant de longues minutes. L’incroyable “Heksebrann” nous emmène loin durant neuf minutes, Erlend ne rentrant qu’au bout de quatre minutes d’une intro qui n’aura jamais vu les musiciens jouer aussi mélodieusement, le tout pour nous placer un refrain qui vous restera en tête des heures durant.

On attendait ce groupe au tournant. Le mélange hardcore/black metal/rock n’roll était casse gueule et jusqu’à aujourd’hui, la formation s’en tirait avec les honneurs. Sur ce nouvel effort studio, les Norvégiens délaissent pratiquement les relents les plus extrêmes de leurs influences, pour nous offrir un disque de metal au sens large du terme, puisqu’il n’hésite pas à puiser dans des racines plus historiques de l’enfant terrible du rock. Et le résultat est au rendez-vous car l’agressivité est sacrifiée sur l’autel de la mélodie. Entreprise risquée mais succès haut la main pour Kvelertak tant le groupe réussit à nous filer bons nombres de frissons avec un riffing d’exception, un songwriting bien plus mature et des refrains extrêmement fédérateurs.

Informations

Label : Roadrunner Records
Date de sortie : 13/05/2016
Site web : kvelertak.com

Notre sélection

  • Heksebrann
  • Ondskapens Galakse
  • Nattesferd

Note RUL

4/5

Ecouter l’album

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN