Chroniques

Jimmy Eat World – Damage

Huitième album studio pour le quartette à succès Jimmy Eat World, près de trois ans après le très bon “Invented” (2010). Alors que les natifs de l’Arizona célèbrent cette année leurs vingt ans de carrière, l’attente autour de ce nouvel opus aura été toute aussi forte que pour ses prédécesseurs, la recette pop-punk/emo de la formation n’ayant visiblement pas pris une ride. Même pas un peu ?

Cet effort aurait pu être celui du bilan, mais aussi d’une remise en question, une occasion idéale de laisser libre cours à de nouvelles envies musicales, voire à un changement total de direction. On imagine en effet sans mal qu’après autant d’années à développer une forte identité musicale, un groupe puisse rêver à de nouvelles choses. Il n’en est pourtant pas question ici, puisque, comme “Damage” nous le confirmera dès la première écoute, la bande de Jim Adkins, non contente de poursuivre sur sa lancée avec la même conviction que dans ses premières années, creuse encore un peu plus profondément pour apporter à son style ce qui lui manquait avant : la maturité émotionnelle. Pas vraiment de surprise donc, plutôt l’impression de retrouver une bande de potes perdue de vue quelques années plus tôt, avec laquelle on retrouverait une complicité immédiate. Si certains regretteront sans doute le manque d’évolution dans le son de la formation, y voyant une certaine passivité, voire un manque de créativité, il faut bien admettre que, là où tellement de groupes se sont perdus en essayant autre chose par peur d’ennuyer leur audience, la persistance de Jimmy Eat World fait plutôt plaisir à voir, surtout qu’elle est accompagnée d’un talent indéniable. Ce que fait la formation, elle le fait bien, et c’est donc sans la moindre déception que l’on se replonge dans le style qui a fait le succès du quartette. On se laisse donc porter par la voix de Jim Adkins, sur des mélodies simples mais terriblement prenantes qui bénéficient d’un son doux et organique que l’on doit au producteur Alain Johannes (Queens Of the Stone Age). Avec toujours pour thème central celui des histoires d’amour compliquées, les dix titres de l’opus nous transportent dans une ambiance de série américaine, avec une dominante mélancolique ponctuée d’instants plus joyeux, grâce, par exemple, aux guitares acoustiques bondissantes du très pop “Book Of Love”. De “Appreciation” à “Lean” en passant par “Damage”, on ne peut pas dire qu’un morceau ressorte en particulier dans cette première partie de l’album, en bien ou en mal, si bien qu’il faudra quand même plusieurs écoutes pour bien distinguer ces chansons. La deuxième moitié nous apporte sa part de morceaux plus vifs, notamment le single “I Will Steal You Back”, mais aussi et surtout l’excellent “How’d You Have Me”, porté par une des rythmiques les plus pêchues de l’opus, deux temps forts axés pop punk qui nous rappellent que la bande n’a rien perdu du feu sacré qui l’animait pendant sa période “Bleed American” (2001). “No, Never” se démarque, quant à lui, par son introduction tout en percussions et la lourdeur de son refrain, en contraste avec la dynamique pop de ses couplets. Au rang des ballades, la sympathique “Please Say No”, qui ne manquera pas de rappeler aux nostalgique la sublime “Hear You Me”, avec ses chœurs éthérés. Quant à “Byebyelove”, on pourrait plutôt la rapprocher de l’inégalable “23” par sa dimension suspendue, sa rythmique lente qui donne l’impression que l’on rentre dans une bulle hors du temps. Avec sa base guitare-voix, simplement enveloppée d’un son d’orgue un peu sourd, presque mystique, “You Were Good” clôt l’ensemble dans une ambiance intimiste, humaine, qui résume très bien l’esprit de Jimmy Eat World.

Si ce nouvel opus ne peut pas exactement être qualifié d'”original” vis-à-vis du parcours de JEW, il faudra le prendre pour ce qu’il est : un nouveau lot de morceaux nous enveloppant dans l’atmosphère mélancolique et rassurante de la formation, s’écoutant un peu comme une bande son de film, c’est-à-dire comme un tout et non au titre par titre.

Informations

Label : Dine Alone Records
Date de sortie : 11/06/2013
Site web : jimmyeatworld.com

Notre sélection

  • How'd You Have Me
  • No, Never
  • Byebyelove

Note RUL

3.5/5

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