Chroniques

Grave Pleasures – Dreamcrash

Un premier méfait intitulé “Climax” (2013) et un changement de nom (de Beastmilk à Grave Pleasures) plus tard, le quatuor nous revient avec un deuxième album, “Dreamcrash”. Malgré une notoriété timide mais ascendante, Grave Pleasures a tout du groupe qui s’apprête à exploser à la face du monde, un peu comme ses voisins de chez Ghost. D’ailleurs, le CV des musiciens a de quoi faire rêver : l’Anglais Mat Kvohst McNerney, également à la tête d’Hexvessel et créateur de la formation norvégienne black metal Dodheimsgard, le Finlandais Juho Vanhanen qui officie toujours dans le combo de black metal expérimental Oranssi Pazuzu, la guitariste suédoise Linnéa Olsson qui a joué dans The Oath et enfin le Suédois Uno Bruniusson, batteur chez In Solitude, qui a maintenant splitté. Deux Suédois, un Finlandais et un Anglais sont sur un bateau.

Et pourtant, avec Grave Pleasures, on est bien loin des groupes sus-cités : ici pas de black metal, ni même une once de metal extrême. Produit par Tom Dalgety (Killing Joke, Royal Blood), “Dreamcrash” se place au cœur d’un revival post punk, revival encore un peu fébrile même si la France avait entamé ce revival avec brio (Amesoeurs, Soror Dolorosa) il y a quelques années. Avec une production très teintée 80’s, difficile également de ne pas penser à la Madchester (The Smiths, Buzzcocks, Joy Division), ces adolescents de Manchester, turbulents mais ô combien talentueux. Grave Pleasures nous replonge donc en arrière avec des ambiances nocturnes et endiablées, ironiquement morbides et terriblement romantiques (“Lipstick On Your Tombstone” qui ne renie pas des influences deathrock). Mais, au-delà d’une simple restitution des codes du post punk et du gothic rock, Grave Pleasures a le talent de savoir manipuler ces codes, les mélanger avec un talent certain pour en créer sa propre substance sonore.

Les arpèges froids de “New Hip Moon” démontrent une certaine aisance de composition alors que la lumière fait irruption, par rares moments, dans le cœur froid des Finlandais. En témoigne la voix de Mat sur la semi ballade “Crisis”, lumineuse alors que sur les autres titres, elle se veut plus distante et perchée comme sur la très punk “Futureshock” où le tempo gagne en cadence. Le quatuor a aussi la qualité de proposer quelques rafraichissements comme ce lead guitar endiablé sur l’hymne “Girl In A Vortex” ou ses innombrables accélérations sur “Worn Threads”. Attention cependant à ne pas céder à cette tentation facile qui est de rester confiné dans un seul et même style que l’on sait pratiquer à la perfection, car avec le background des différents musiciens, il n’est pas difficile de comprendre que le groupe possède un potentiel créatif qui va bien au-delà des quelques styles qui font sa symbiose actuelle. Ajoutons à cela que l’opus n’est, stylistiquement, pas très éloigné de son prédécesseur.

Véritable bombe à retardement, imagé, amère mais jamais dénué de charme et de goût, ce “Dreamcrash”, pour le peu que vous soyez doté d’un minimum de curiosité musicale, n’aura aucun mal à déployer ses charmes. Entre de lourdes lignes de basse caractéristique au post punk, des arpèges cristallins et des accords plus lourds soutenus par une batterie fantomatique, la souplesse vocale de Mat se fraie un chemin, tel un serpent bien vicieux qui aurait pour unique désir celui de vous piquer les oreilles. Si vous souhaitez partager cette détresse ou simplement assister à ce qui sera très certainement le concert de revival post punk de l’année, on vous invite chaudement à faire la queue le 3 octobre prochain devant La Flèche d’Or de Paris. Et qu’il pleuve, vente ou fasse orage, vous n’aurez aucune excuse… l’atmosphère n’en sera(it) que meilleure !

Informations

Label : Sony Music / Columbia
Date de sortie : 04/09/2015
Site web : gravepleasures.com

Notre sélection

  • New Hip Moon
  • Crisis
  • Girl in A Vortex

Note RUL

4/5

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