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Eiffel – Stupor Machine

Le groupe Eiffel, que l’on pensait déjà loin, fait un retour fracassant et prouve qu’il n’était jamais vraiment parti.

Sept ans après l’excellent “Foule Monstre” (2012), qui contenait notamment “Place De Mon Coeur”, Eiffel présente “Stupor Machine”, le sixième album depuis la création du quatuor il y a plus de vingt ans. Fidèle à la verve mélodique de Romain Humeau, ce nouveau disque nous plonge dans un magnifique cauchemar teinté de poésie et de guitares bruyantes durant treize titres.

“Stupor Machine” fait évidemment référence à l’un des premiers morceaux phares d’Eiffel, “Machine à effroi”, qui vient boucler la boucle. On en viendrait presque à penser que cet album serait le dernier. Mais non, Romain Humeau l’a confirmé : “Eiffel ne splittera jamais.”

“Fureur suprême et anges d’hashtags ! Hail to the cameras! Big Data!”

L’ensemble se veut virulent, pessimiste, violent dans les textes pour vous plonger sous l’eau le titre suivant. Jamais un album d’Eiffel n’a été aussi engagé et tant pis si Romain Humeau déteste ce qualificatif. “Pute à clic, putes à média, regarde bien on est désespéré !” Il l’est !

Exit les machines, les plug-ins électroniques et même les featuring, ce “Stupor Machine” relève de l’essence même du groupe, comme si Eiffel était passé dans un entonnoir. “Chasse Spleen” ou “N’Aie Rien A Craindre” redonnent du souffle et répondent à une mélancolie que Romain Humeau semble assumer une bonne fois pour toute.

Si les clins d’oeil à David Bowie ou aux Beatles semblent (presque) évidents, il n’empêche que Romain Humeau s’adresse surtout à la jeune génération, celle de sa fille entre autres, “Et toi ma fille, quelles noces feras-tu ?”, mais aussi à cette jeunesse perdue, hyper-connectée qui devrait “tourner les yeux pour une fois”.

Romain Humeau, incisif du pamphlet à la ballade

L’album a été achevé au mois de janvier dernier, soit quelques semaines après le lancement des “Gilets Jaunes”. Lorsque l’on écoute la chanson “Oui”, véritable antidote à “À Tout Moment La Rue” sorti dix ans plus tôt, on imagine que Romain Humeau aurait pu y ajouter un couplet de plus si le disque n’avait pas déjà été envoyé en maquette. Un détail, évidemment.

Au virage d’une composition garage rock comme on les aime, “Si tu marches tu crèves, si tu marches pas tu crèves aussi”, Romain Humeau fait une pause romantique (oui, vous avez bien lu !) et nous dévoile le sensuel “Chocho”. Un moment suspendu dans l’album où l’on ne tend presque pas l’oreille pour comprendre les rimes du chanteur. Il prend le temps d’admirer “l’origine du monde”, sacralise le corps de la femme et les mystères de son derme. Inattendu ! Un moment bucolique avant de finir sur “Terminus” dont les premières notes de piano nous rappellent un scénario apocalyptique à la “Centrefolds” de Placebo : “Regarde un peu le monde, ton coeur bat !”

Puisque les révolutions s’arrosent entre elles, “Stupor Machine” est intemporel, aussi lourd qu’un sous-marin qui regarderait le monde brûler du bout de sa lunette.

Informations

Label : PIAS
Date de sortie : 26/04/19
Site web :www.eiffelnews.com

Notre sélection

  • Chasse Spleen
  • Oui
  • Terminus

Note RUL

 4/5

Ecouter l’album