Chroniques

Bush – Man On The Run

Après trois ans à naviguer à travers le monde pour la tournée du précédent album “The Sea Of Memories” (2011), Bush revient sur la terre ferme avec son nouvel opus “Man On The Run”. Signé sur le label Zuma Rock Records, sous la direction de Jay Baumgardner et Nick Raskulinecz, ce sixième disque annonce un tournant dans la perspective musicale des Britanniques : avec Raskulinecz aux commandes, qui a notamment travaillé avec Trivium, Ghost, Deftones, Marilyn Manson, Apocalyptica et Evanescence pour ne citer qu’eux, ce nouveau disque promettait de prendre un accent plus musclé, cru, taillé pour le live. Cependant, il semblerait que cet espoir se soit dissipé derrière un côté parfois trop lisse, qui pourrait décevoir les plus fervents adeptes de leur époque postgrunge. Mais compte tenu de la direction que le groupe est en train de prendre, il semblerait qu’il ne faille plus s’attendre à des sorties telles que “Sixteen Stone” (1994) ou encore “Razorblade Suitcase” (1996). La formation a laissé tomber le garage pour le bateau de croisière.

Si les Londoniens ont décrit eux-même cet essai comme un “grand voyage de découverte”, le nom choisi apparaît comme une confirmation de ce propos : il est un effort de l’entre deux, du chemin parcouru et qui reste encore à parcourir. Les musiques dessinent une tranche de vie, celle de la course d’un personnage qui a encore le choix de ce qu’il veut faire, d’où il veut aller, alors que les portent se ferment, et qu’il n’a pas d’autre choix que d’avancer et deviner la meilleure voie à emprunter. Le départ est donné sur “Just Like My Other Sins”, laquelle fait partir le quatuor dans les starting-blocks. Le sprint initial est prometteur. C’est un début énergétique, en sprint. Bush offre une critique de la société belliqueuse, dont l’agitation et inquiétude rappellent le péché personnel, le tout sur un tapis instrumental déstructuré, très 90’s. De façon générale, cette époque reste très présente tout au long de l’ensemble, marquée outre la composition, par l’utilisation de vieilles guitares et amplis. Mais, pour reprendre les dires du frontman Gavin Rossdale : “Après toute cette obscurité, le seigneur des ténèbres se retire. Laissons un peu de lumière (entrer) dans la pièce !”. De fait, si musicalement, l’opus adopte un son vintage, le tout donne un résultat très lisse, sans défaut. Vocalement, Gavin offre une performance impeccable, avec des paroles relativement simples et répétitives cependant. Mais toujours prenantes. A cela, sont ajoutés des sons presque futuristes, comme sur “Loneliness Is A Killer”. Pourtant, très vite, l’homme qui courre finit par s’épuiser, et c’est bien la critique que nous pourrons formuler à ce nouvel essai : s’il contient des chansons qui tiennent la route, il apparaît comme une course inachevée. Nous sentons en effet que Bush a voulu jouer la carte de la créativité, qu’il a le talent et l’expérience nécessaire pour faire de bonnes chansons, entraînantes, avec des paroles auxquelles il est facile de s’identifier du fait qu’elles correspondent à une tranche de vie par laquelle nous passons tous : celle lors de laquelle nous devons nous trouver, trouver notre chemin. En effet, l’album tient son engagement de chemin initiatique, celui qui apprend à faire ressortir un message positif, à partir de thèmes plus larges, universels et parfois plus simples. Des pistes comme “The Only Way Out” constituent des hymnes pour les épreuves de la vie quotidienne, des challenges, où trouver la force dans des moments de faiblesse, qui nous testent. Effectivement, nous y retrouvons le chemin entre l’ancienne période grunge, instrumentalement, et le côté pop rock d’un chant moderne, soutenu par un certain futurisme sonore. Pour toutes ces raisons, “Man On The Run” représente ce voyage, cet entre-deux annoncé par son titre.

Certes, nous ressentons que le combo a fait du chemin, a pris confiance en lui, qu’il a compris le sens de leur formation. Mais sans doute qu’en observant cette fin d’un peu trop près, les musiciens sont restés sur la route, à mi-chemin entre une identité et un Idéal. Gardant les yeux sur la ligne d’arrivée, ils semblent avoir manqué la course. L’opus est solide et intéressant. Cependant, il reste en surface, manque de profondeur, et s’essouffle malgré lui. Autrement dit, il marque bel et bien une évolution dans la carrière de Bush, qu’elle soit appréciée ou non de leurs fans, mais ce “Man On The Run” en lui-même reste fixe, sans changement entre le début et la fin. Il reste donc à voir si les performances live sauront à ce dernier effort, un second souffle !

Informations

Label : Zuma Rock Records
Date de sortie : 20/10/2014
Site web : bushofficial.com

Notre sélection

  • Just Like My Other Sins
  • This House Is On Fire
  • Loneliness is A Killer

Note RUL

3/5

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