Chroniques

Black Lips – Underneath The Rainbow

Depuis 1999, le punk psychédélique et crasseux des américains de Black Lips parcourt la planète dans sa déambulation rock garage. Enregistré en mars 2014, trois ans après le pop rock de “Arabia Mountain”, “Underneath The Rainbow” a été concocté entre les studios de New York et de Nashville avec Tommy Brenneck (Budos Band) et Patrick Carney (The Black Keys), ainsi que Brent Hinds (Mastodon).

Depuis la dernière sortie “Arabia Mountain”, on observe chez le groupe une musique qui s’éloigne de l’aura salement punk des albums comme “Good Bad Not Evil” (2007) ou encore “Let It Bloom” (2005). Le son garage de la formation demeure, mais se décale progressivement vers un aspect particulièrement lo-fi, surf rock à l’instar des récents Fidlar et Dune Rats. “Drive By Buddy” réintroduit le chant sous micro grésillant de Cole Alexander qui prend ici des teintes vocaliques à la Devendra Banhart, et se prête à l’enthousiasme d’une communauté entonnant des chœurs honnêtement faux. Le chant de Cole Alexander change d’un titre à l’autre, passant d’un air maussade à un air plus enjoué. Avec une voix naïve qui joue d’une fausseté ruminante, “Smiling” détient une dimension Dune Rats, tout comme “Make You Mine” qui se dote de quelques phrases rock n’roll de charme. Le groupe se rapproche également des sonorités psychédéliques que l’on pourrait attribuer à un certain Ty Segall, dans une bonne dynamique et des notes aiguës sur fond d’accords panoramiques de “Funny”. Quelques titres se démarquent clairement comme la parenthèse folk blues de “Justice After All” et sa voix particulièrement charnue. Ou encore le single, “Boys In the Wood” qui ressort par sa personnalité. Sa rythmique languissante, couplée à une guitare sensuelle, forme un corps lancinant que vient chevaucher un chant à la teinte Jack White, agrémenté de chœurs rassemblants et juvéniles. L’asile de “Do The Vibrate” vient nous bousculer avec le style déjanté de sa confusion sonore faite de multiples bruits parasites et cris, créant une ambiance psychédélique, dans laquelle se retrouvent des riffs de guitare pleins de détermination. Avec une humeur globalement enfantine, au risque de frôler le puéril, le groupe produit des mélodies joyeuses et entrainantes, agrémentées d’une discordance propre à leur esprit d’enregistrement en prise directe. Cet essai pèche toutefois de tonus malgré ses morceaux à l’énergie certaine. Par exemple, “Dorner Party” pulse un dynamisme soutenu mais donne une sensation de déjà entendu et devient presque désagréable à l’oreille avec son mélange de bruits divers mal organisés. “I Don’t Wanna Go Home”, d’une humeur ensoleillée, reprend une cadence rythmée, dans la dualité de guitares crachantes, puis légères, mais ne parvient toutefois pas à graver la mémoire. L’ensemble s’estompe dans les riffs rock 70’s de “Dandelion Dust”, qui reprend la même texture de chant que “Boys In The Wood”, tout en déployant le style garage du quatuor; mais se clôt définitivement avec “Dog Years” qui reflète quelque peu le manque de saveur de la galette, malgré certains bons éléments comme la supplication à voix cassée du chanteur et son intonation volontairement mollassonne plutôt réussie.

La sortie de “Underneath The Rainbow” a fait beaucoup d’émoi parmi les fidèles de la formation, mais on peut reprocher à l’album de trop marcher dans les pas des jeunes groupes lo-fi et surf-garage et semble s’être fait dépasser dans leurs sonorités garages psychédéliques. Les Black Lips sont pour le moment en pleine tournée américaine, mais passerons par notre pays pour trois dates, notamment le 26 mai au Nouveau Casino à Paris.

Informations

Label : Vice Records
Date de sortie : 17/03/2014
Site web : black-lips.com

Notre sélection

  • Justice After All
  • Boys Is The Wood
  • Waiting

Note RUL

3/5