Chroniques

And So I Watch You From Afar – Heirs

Déjà dix ans que And So I Watch You From Afar répand la bonne parole avec son post rock/math rock énergique. L’étau semble se resserrer après trois albums, tous encensés par la critique : est-ce que le quatuor va réussir un nouvel exploit ?

Dès la première écoute, le constat est sans appel : la folie des Irlandais ne semble toujours pas s’être dissipée. Si le groupe semble proposer les mêmes ambiances, plusieurs écoutes seront nécessaires pour effacer cette fausse impression : And So I Watch You From Afar parvient, mieux que la plupart de ses compères, à distiller des ambiances très variées. Que ce soit du post rock tonique avec des chœurs endiablés qui respirent la bonne humeur (“Run Home”) à des titres plus musclés et résolument math rock comme sur “Redesigned A Million Times” et le final “Tryer, You”. Une bonne moitié des morceaux comporte des chœurs très joviaux et dansants, et donne une teinte presque estivale à cet ensemble qui respire la bonne humeur et le soleil. Mais le retour des beaux jours est-il une raison suffisante pour que la formule des Irlandais ne s’essouffle pas ? Très certainement car ASIWYFA fait partie de ces rares groupes dont les disques comportent toujours ces quelques pistes qui parviennent à redonner du souffle et du relief au tout. Sans quoi, il est indéniable que la formule pourrait vite nous faire sombrer dans l’ennui. On pense par exemple au groove de “These Secret Kings I Know”, aux passages célestes où l’on a l’impression d’entendre un cortège d’anges chanter sur “People Not Sleeping” ou encore aux titres qui voient les Irlandais proposer des expérimentations : les mélodies qui s’affrontent dans une sorte de duel au sabre laser sur “Animal Ghosts”, ou encore la chanson titre de sept minutes affichant un visage plus progressif avec des ambiances très travaillées et subtiles, jonglant de manière rafraichissante entre post rock et math rock, pour les structures les plus complexes. Il est dommage que la formation ne pousse pas davantage cette dimension progressive dans laquelle elle excelle. Enfin, le fait d’avoir des morceaux qui oscillent entre trois minutes et sept minutes témoigne d’une certaine liberté que l’auditeur saura apprécier.

Si “Heirs” brille par sa technicité et son caractère rafraichissant car optimiste, il ne fait nul doute que c’est avant tout un album qui, encore plus que ses prédécesseurs, est taillé pour la scène. Ses nuances sont suffisamment présentes pour lui donner de l’intérêt : entre duos de tappings et autres shreds, viennent s’ajouter de (trop ?) rares accalmies qui, parfois, nous permettent de prendre du recul sur cette nouvelle dimension que nous offre le quatuor. L’ensemble est tellement énergique qu’il manque parfois d’émotions, mais cela n’a jamais fait partie du discours du combo. Alors, post rock ou math rock ? ASIWYFA n’a jamais réellement voulu choisir, et c’est cette absence de choix qui plaît et qui continue de plaire.

Informations

Label : Sargent House / Differ-Ant
Date de sortie : 04/05/2015
Site web : www.asiwyfa.com

Notre sélection

  • Heirs
  • These Secret Kings I Know
  • Run Home

Note RUL

3.5/5