Pour la première fois depuis Muscle Of Love (1973), Alice Cooper enregistre un véritable album studio avec le line up originel : Michael Bruce (guitare), Dennis Dunaway (basse) et Neal Smith (batterie). Mieux : Bob Ezrin, architecte sonore des disques fondateurs (Love It To Death, School’s Out, Billion Dollar Babies), reprend les manettes. The Revenge Of Alice Cooper sonne donc comme une remise à plat du mythe, une sorte de retour aux fondamentaux.
Plus qu’un simple retour aux sources
The Revenge Of Alice Cooper n’est ni une opération nostalgie déguisée, ni un album “solo” maquillé de guests. C’est la réunion créative du Alice Cooper Band, celle d’un groupe qui choisit de composer ensemble, comme à l’époque où le shock rock avait encore un sens. Bien sûr, le disque conserve l’humour noir et l’autodérision caractéristiques de Alice Cooper, mais il dégage surtout une envie sincère de retrouver l’alchimie originelle. En bonus, la présence fantomatique de Glen Buxton, intégrée via des prises inédites, transforme l’ensemble en véritable rituel d’adieux et d’hommage.
La dynamique est simple : les quatre survivants veulent créer, pas seulement rejouer. Bob Ezrin, producteur historique, accepte de reprendre la barre et donne à l’album ce rôle de chapitre manquant, celui qu’aucun best of ni aucune tournée commémorative n’aurait pu combler. Dans un contexte où les pionniers du rock disparaissent peu à peu, ce retour aux sources sonne comme un acte d’urgence, une manière de sceller leur héritage en le recréant plutôt qu’en le figeant.
Ezrin rallume les lampes du théâtre
Dès “Black Mamba”, le décor est planté. Les riffs sont secs, les paroles oscillent entre cynisme et sarcasmes, et le chant est fidèle à Alice Cooper. La production d’Ezrin joue principalement sur la tension. La batterie se fait claquante, la basse entêtante de Dunaway serpente entre les guitares de Bruce. A côté, des arrangements malins (chœurs, pianos, petits passages psyché) apportent un peu de densité aux refrains. Le tout conserve le côté garage des débuts tout en mettant en avant les aspects théâtraux.
“Blood On The Sun” étire la formule sur plus de six minutes. Le morceau est plutôt sombre, surtout quand il part dans les parties instrumentales. Mais surtout il montre à quel point le groupe possède une chimie presque organique. Les musiciens se connaissent par cœur et ça s’entend. Des morceaux plus courts comme “What A Syd”, “Crap That Gets In The Way Of Your Dreams” ou encore “Intergalactic Vagabond Blues” condensent l’art du titre efficace. Les influences blues et jazz apportent le relief que l’on aime chez Alice Cooper.
L’héritage, la vanité, le miroir
Le grand sujet de The Revenge…, c’est le temps. Pas le temps qui passe comme cliché rock n’roll, mais le temps qu’on affronte avec humour noir. Alice se moque de la renommée toxique (“Famous Face”), d’une industrie où “l’argent hurle” (“Money Screams”), et de toutes les broutilles qui sabotent les rêves (“Crap That Gets In The Way Of Your Dreams”). Il n’épargne ni le business, ni le public, ni lui-même.
Moment le plus poignant et peut-être le plus dansant avec “What Happened To You”. En retrouvant des fragments de Glen Buxton, le morceau se transforme en question adressée à la fois au groupe et à son audience. Qu’est-il arrivé à cette bande de voyous glam ? Où est passée cette énergie de ruelles crades et de salles interlopes ? Ici, la nostalgie cesse d’être juste une posture pour devenir matière sonore. En effet, le riff de guitare d’un disparu fait vibrer le présent.
Le disque est une recréation fidèle et vivante de l’esthétique 70’s du groupe. Il n’y a pas de prétention à réinventer le “shock rock“, mais une volonté de rassembler une famille pour signer ensemble un dernier chapitre.
Informations
Label : earMusic
Date de sortie : 25/07/2025
Site web : www.rockurlife.net
Notre sélection
- What Happened To You
- Black Mamba
- What A Syd
Note RUL
3,5/5