Chroniques

A Perfect Circle – Eat The Elephant

Personne n’a imaginé établir une sorte d’algorithme permettant d’identifier le lien entre le nombre d’années séparant deux albums d’une formation renommée et les attentes de ses fans. Il serait alors facile, pour le cas d’A Perfect Circle, d’établir un lien avec un autre groupe dont le nom revient souvent au cœur des rumeurs (on vous aide, ça commence par “T” et ça se termine par “ool”). Quatorze ans depuis “eMOTIVe”, dernier album studio en date pour A Perfect Circle, “Eat The Elephant” vient combler une certaine attente et ce qui nous saute aux oreilles, c’est qu’il faudra quelques temps pour se familiariser avec cette nouvelle livraison de la formation californienne.

A Perfect Circle a vu bon nombre de musiciens de talents grossir les rangs depuis sa création au milieu des années 90. Pourtant, le groupe s’articule surtout autour de la collaboration entre Billy Howerdel et Maynard James Keenan, chanteur de Tool et de Puscifer notamment. Guitariste d’origine, Howerdel troque souvent sa six cordes pour de longues pistes de piano et de claviers en tous genres sur ce disque. C’est le changement principal à noter. L’ambiance n’est plus aux envolées de rock progressif, guitares devant et batterie qui explose le tout. La direction se veut plus pop mais très profonde également. Les textures prennent du temps à être digérées et il vous faudra plusieurs écoutes pour entrer dans l’atmosphère très intimiste de cet effort studio.

Car les fans des premiers essais pourront se retrouver déstabilisés face au peu d’envolées épiques que propose “Eat The Elephant”. Mais il serait idiot de ne pas reconsidérer son approche d’une telle œuvre, d’un tel groupe pour de si maigres paramètres. Dès l’ouverture “Eat The Elephant”, on sent une mélancolie certaine. Un sentiment qui ne quittera aucune des chansons composant ce nouvel album. Le rock massif laisse place des chansons plus expérimentales, tantôt pop, tantôt électro. On a même parfois le sentiment que les voix féminines présentes dans Puscifer vont débarquer (“TalkTalk”, “Hourglass”).

Mais le véritable atout de ce disque reste la voix de Maynard. Modulable à souhait, emplie d’émotions diverses et variées, elle est le véritable guide auquel se raccrocher en toutes circonstances si parfois le propos de l’ensemble semble nous échapper. Bien que nous n’aurons jamais aucune explication les concernant, les paroles de Maynard semblent tout de même bien plus politisées sur ce nouvel opus qu’elles n’ont pu l’être auparavant. En témoigne une chanson telle que “So Long, And Thanks For All The Fish” et son refrain fustigeant la société actuelle.

Vous l’aurez compris, perturbant que ce nouvel album d’A Perfect Circle. L’analyser aussi rapidement implique une analyse qui sera amenée à bouger dans les mois à venir en fonction du nombre d’écoutes. Car il est évident qu’il s’agit d’un disque dont notre perception sera radicalement différente dans six mois, dans un an ou plus encore. Et s’il est encore trop tôt pour distinguer si, oui ou non, il s’agit d’un grand disque, le simple fait que la question reste ouverte sur la durée est déjà la preuve d’un talent certain et d’une profondeur artistique rare.

Informations

Label : BMG
Date de sortie : 20/04/2018
Site web : www.aperfectcircle.com

Notre sélection

  • Feathers
  • Eat The Elephant
  • The Doomed

Note RUL

4/5

Ecouter l’album

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN