Chroniques

Satyricon – Deep Calleth Upon Deep

Neuvième essai pour les Norvégiens de Satyricon qui n’avaient pas sorti d’album studio depuis l’éponyme en 2013. Et en quatre ans, il s’en est passé des choses puisqu’en 2015, en plus d’avoir sorti un remarquable live orchestral, Satyr s’est fait diagnostiquer une tumeur bénigne au cerveau. A ce titre, la mort semble habiter “Deep Calleth Upon Deep”, et ce dès la pochette, un dessin obscur d’un artiste qui ne l’est pas : Edvard Munch, ni plus ni moins le plus grand peintre norvégien.

Présentations faites, un avertissement reste de mise : fan de black metal pur, passez votre chemin. Si le disque précédent avait un peu plus installé le nouveau visage de Satyricon, avec cette nouvelle offrande, le groupe enfonce le clou un peu plus loin : le black metal n’est plus qu’une aura dissipée qui serpente l’ombre de quelques riffs comme sur l’excellent titre d’ouverture “Midnight Serpent” ou “Black Wings And Withering Gloom” sur laquelle la double pédale de Frost s’emballe pour notre plus grand plaisir. Sur “Deep Calleth Upon Deep” et son intro à la limite du stoner, on pense davantage à Paradise Lost ou à Dark Tranquility qu’à Immortal ou Mayhem ! Accrochez-vous, les surprises ne s’arrêtent pas là.

Relativement varié grâce à ses nombreux changements de rythmes et ses harmoniques riches (“Blood Cracks Open The Ground”), cet effort exigeant ne se laisse pas apprivoiser en une ou deux écoutes. La capacité infernale qu’a Satyricon de passer du très lent au très rapide tout en finissant toujours par atterrir sur ses deux pieds est souvent décontenançant ! Heureusement, la production donne du relief à l’ensemble tout en apportant un certain cachet aux mélodies qui sont très présentes, notamment sur la moitié du disque (“The Ghost Of Rome”). Les Norvégiens ne sont d’ailleurs jamais loin de se mordre la queue avec des sonorités presque maladroites (“Dissonant”) ou encore les mélodies égyptiennes du final (“Burial Rite”).

Est-ce un bon album de Satyricon ? Cela dépend évidemment de vos attentes. Dans la lourdeur et malgré des lignes vocales délibérément trop linéaires, le combo arrive à instaurer et préserver une atmosphère digne d’une messe occulte, empreinte d’une certaine spiritualité qui aurait pu marquer davantage l’opus. Mais n’est-ce pas rébarbatif ? Cette idée n’a pas le temps de s’installer qu’un élément, une mélodie, un instrument non identifiable ou une voix d’opéra qui fait parfois irruption sur quelques morceaux, retentit pour nous faire changer d’avis. Appauvri en black metal, Satyricon s’est enrichi.

Sophistiqué et très organique, “Deep Calleth Upon Deep” assoit un peu plus la maturité musicale des Norvégiens qui n’ont que faire des étiquettes. L’album manque certes de moments marquants mais – et c’est là le paradoxe – il décontenance, dérange et reste incroyablement audacieux pour une formation qui existe depuis presque trente ans ! Satyricon est tel un oiseau perché sur les hauteurs, inaccessible et inattaquable car trop agile pour les deux petites oreilles de ses auditeurs dont seuls les plus aguerris parviendront à se délecter des subtilités qui parsèment cette nouvelle offrande.

Informations

Label : Napalm Records
Date de sortie : 22/09/2017
Site web : www.satyricon.no

Notre sélection

  • Midnight Serpent
  • Black Wings And Withering Gloom
  • Deep Calleth Upon Deep

Note RUL

4/5

Ecouter l’album