Chroniques

Neil Young + Promise Of The Real – The Visitor

C’est à se demander si le but de Neil Young n’est pas comparable à celui d’une souris de dessin animé, tenter de conquérir le monde. Avec la confection d’une voiture au moteur hybride expérimental, une plate forme de téléchargement, et une passion sauvage pour les petits trains électriques, il dévoile un travail d’archives de 1963 à nos jours consultable sur internet. Toute une carrière musicale avec inédits à la clef en tapant une seule adresse html. Cela coïncide avec la sortie de son deuxième album de l’année, “The Visitor”, en compagnie de Promise Of The Real, groupe aux allures de Crazy Horse qui l’accompagne depuis maintenant deux ans.

Le Loner met en avant une autre de ces passions sur la pochette, celle des anciennes belles mécaniques qui symbolisent le pays dont il est tombé amoureux en tant que jeune canadien. L’Amérique qu’il continue de défendre, avec le premier titre “Already Great” qui est un doigt levé au slogan de Donald Trump qui représente l’opposé des idéaux du guitariste chanteur, toujours furieusement engagé. “No Wall No Ban No Fascist USA”, le message clair et scandé, porté par un blues groovy dont il a le secret.

Pour conserver une identité musicale proche de celle de “Harvest” (1972), Neil fait appel au grand mage de la production, Rick Rubin. Ce dernier réussit cet exploit à la perfection, l’illusion se transformant en quelque chose de palpable. Certaines choses n’ont malheureusement pas changé depuis la composition de “Alabama”. Aujourd’hui, l’un des bouseux sans moral ni tolérance décrit dans cette chanson trône à la Maison Blanche. Rubin ressent les sentiments de Young, ce regard vers l’avenir trempé dans la nostalgie et la colère. Toute ces émotions sont alors plaqué dans le plus simple des appareils sur ce disque de dix morceaux qui comporte de douces ballades (“Almost Always”) comme quelques morceaux de curiosité (“Carnival”, qui ne déplairait pas à Tom Waits).

“Children Of Destiny” fait beaucoup parler de lui, avec ses paroles manichéenne et ses cuivres doublées de quelques instruments à vent. La chanson est même comparée à une hymne Disney, semant la confusion sur les intentions sérieuses ou ironiques d’une telle parade. Hormis les chœurs et l’instrumentation, les notes ainsi que le ton sont très familières de l’esprit d’un autre groupe qui n’avait jamais la langue dans sa poche. C’est le spectre de Joe Strummer qui veille, et non celui de Walt. Le “Write Truths, Not Slogans” du Britannique né en Turquie est loin d’être étranger à Neil Young. Dos tourné face à une voiture des forces de l’ordre, il pense déjà au nouveau message qu’il va faire passer dans un futur album. La force qui caractérise ce jeune homme de soixante douze ans, ce n’est pas le rythme avec lequel il délivre au moins un effort studio par an, c’est le fait qu’aucun ne sonne comme le dernier.

Infatigable, Le Loner prouve encore une fois qu’il ne fléchit pas devant les injustices qu’il pointe du bout de sa six cordes. “The Visitor” est un disque électrisant, manquant certes d’une certaine ligne de conduite, mais nous avons bien mieux à nous soucier une fois que nous sommes emportés par l’ouragan.

Informations

Label : Warner Music
Date de sortie : 01/12/2017
Site web : www.neilyoung.com

Notre sélection

  • Already Great
  • Almost Always
  • Children Of Destiny

Note RUL

4/5