Chroniques

Les Discrets – Prédateurs

Plus de cinq ans après le très salué “Ariettes Oubliées”, Les Discrets revient avec son troisième album, “Prédateurs”. Deux EP ont permis d’avoir un bel avant-goût de cette métamorphose du projet mais le voyage, lui, reste entier.

Métamorphose n’est pas une exagération, car les grosses guitares et les envolées épiques qui ont jadis fait la gloire du projet ont cédé leur place à des claviers et à de nombreuses éléments électroniques. “Prédateurs”, l’instrumentale indus qui ouvre le bal, le fait vite comprendre. La brèche maintenant ouverte, “Virée Nocturne”, premier titre dévoilé de l’album, enfonce un peu plus le clou, marquée par une trip hop qui loupe avec de beaux arpèges de guitare. La maturité artistique de ce troisième essai se fait déjà sentir.

Comme l’a indiqué Fursy Teyssier lui-même, “Prédateurs” a tout de ce disque de fin de soirée, quand l’agitation d’une nuit arrosée se mue soudainement en un silence et que l’on entend des bruits sourds au loin. C’est un opus de voyage, de transition entre deux points, qui donne le temps à la réflexion, où l’électronique et les expérimentations servent le propos (“Fleurs Des Murailles” qui reprend un poème de Victor Hugo ou “Le Reproche”). La voix éthérée de Fursy et les tempos lents accompagnent tranquillement les ambiances qui prennent le temps de se déployer. Chaque chanson se dresse devant nous comme un tableau fini, une pièce unique qui fait parti d’un voyage cohérent.

Mais c’est aussi l’effort de Les Discrets qui possède le visage le plus humain, grâce à ses repères : si “Rue Octavio Mey” poétise une rue pavée du Vieux Lyon (on entend même les cloches de la Cathédrale Saint-Jean-Baptiste sonner !) avec un texte sublime portée par la belle voix de Teyssier, “Lyon – Paris 7h34” annonce le terminus du voyage avec une instrumentale urbaine et maussade, dont le fort potentiel cinématographique est palpable.

“Prédateurs” est également intéressant car il déstabilise et surprend : “The Scent Of Spring” et son atmosphère quasiment mystique, le côté solaire et ultra aérien de “Vanishing Beauties” ou encore le spoken words sur certains morceaux dévoilent une facette insoupçonnée de Les Discrets. Au contraire, “Les Jours d’Or” pousse peut-être l’expérimentation un peu trop dans tous les sens et risque de perdre l’auditeur lors des premières écoutes.

Simple en apparence, les ambiances sont à la fois sophistiquées et minimalistes d’un titre à l’autre, l’ensemble possède ce côté profondément humain et humble qui ne peut que toucher à travers sa structure. Ce Les Discrets 2.0 a été dépouillé de toutes ses prétentions pour n’offrir que son essence même, de la beauté, de la sobriété et une sacrée dose de nouveautés et d’expérimentations.

Avec un bon casque, une place assise près de la fenêtre du train, des paysages anonymes qui défilent, voilà comment vous pourrez écouter et déceler au mieux ce mystérieux et très réussi “Prédateurs”. Bien qu’il tranche nettement avec ses deux prédécesseurs, il s’agit clairement de l’album le plus abouti et le plus mature de Les Discrets.

Informations

Label : Prophecy Productions
Date de sortie : 21/04/2017
Site web : www.lesdiscrets.com

Notre sélection

  • Rue Octavio Mey
  • Vanishing Beauties
  • Fleurs des Murailles

Note RUL

4/5