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Pourquoi Bring Me The Horizon va devenir le plus grand groupe de rock du monde

En ce mercredi 8 juillet, quelques médias sont conviés au siège social de Sony Music France afin d’écouter en avant-première ce à quoi ressemblera le tant attendu cinquième album de Bring Me The Horizon. Fait inédit dans la carrière du groupe pourtant signé chez une filiale de Sony (RCA) depuis “Sempiternal” (2013). Si ce dernier avait clairement amorcé la mutation de BMTH, le single “Drown” ainsi que la mise en place de ce dispositif d’écoute exclusive prouve que le groupe passe actuellement dans une autre dimension. Fer de lance d’une scène metalcore en quête de renouveau au milieu des années 2000, le troupe d’Oli Sykes semble avoir toujours voulu aller plus haut. C’est désormais chose faite : nous allons assister à la mise sur orbite de Bring Me The Horizon.

D’ores et déjà, le personnel de chez Sony nous prévient que le matériel que nous allons écouter n’est pas mixé ni masterisé, il ajoute également que l’évolution entreprise sur “Sempiternal” se confirme clairement avec ce nouvel album dont on apprend que la sortie se fera selon toutes vraisemblances, le 11 septembre prochain. Détail qui prendra toute son importance à la fin de cette écoute, cet album est produit uniquement par Jordan Fish, dernier arrivé du groupe lors de l’enregistrement de Sempiternal et architecte du nouveau son BMTH.

Mais avant de se projeter vers l’avant, revenons quelques années en arrière, afin de comprendre pourquoi cette apparente mise en orbite soudaine peut se révéler surprenante, mais suit surtout une logique implacable.

Groupe au potentiel remarqué dès son premier album clairement deathcore “Count Your Blessings” (2006), Bring Me The Horizon explose aux yeux du monde entier avec “Suicide Season” en 2008. Dès lors, la formation va diviser. Entre les frasques de l’hypra arrogant Oli Sykes et les prestations scéniques catastrophiques d’un groupe que l’on juge incapable de retranscrire sur scène la qualité de sa prestation en studio, BMTH se forge malgré tout une très solide fan base avec un album de metalcore très énervé et à la fois très accessible. L’explosion simultanée de la marque d’Oli Sykes, “Drop Dead”, va amplifier ce phénomène de mode en agissant tel un raz de marée sur les 15-25 ans en quête de sensations pas trop fortes.

Si le combo passe encore un cap avec “There Is A Hell Believe Me I’ve Seen It, There Is A Heaven Let’s Keep It A Secret” (2010), les prestations scéniques sont toujours plus scandaleuses tandis que l’on sent un groupe de plus en plus ravagé par les excès en tous genre. Cela n’entame pas pour autant sa marche conquérante du monde de la musique. En s’attachant les services du très crédible Josh Scogin ou de la très pop Lights sur cet opus, BMTH agrandit ses frontières et se pose déjà comme un poisson trop gros pour cette scène metalcore friande de redondances et clichés. Mais il manque encore quelque chose pour que le quintette explose à la hauteur de son potentiel. Ce quelque chose il se passera en coulisse, et ne sera révélé que plus tard : Oli Sykes part en cure de désintoxication à la fin du cycle “There Is A Hell…” pour guérir son addiction à la kétamine. A son retour, c’est un homme sobre et bien décidé à enfin mener sa bande dans les hautes sphères du monde de la musique. Exit Jona Weinhofen, trop connoté metalcore, bienvenu à l’inconnu Jordan Fish qui se révèlera pourtant déterminant.

“Sempiternal” leake trois mois avant sa sortie officielle et, pourtant, le disque se retrouve numéro un des charts en Angleterre et en Australie, alors qu’il atteint le top 15 des charts aux Etats-Unis. La signature chez RCA, filiale de Columbia (donc de Sony Music) y est sûrement pour quelque chose alors que le groupe bénéficie d’une promo bien plus conséquente, mais c’est surtout le son qui influe sur ces résultats. “Sempiternal” est cet effort à la fois hors du temps mais pertinemment ancré dans son époque aussi. Bring Me The Horizon s’assagit parfois, mais garde sa hargne et offre enfin des prestations scéniques de qualité. Progression constante, la formation s’offre pour la fin de l’année 2014 la tête d’affiche du Download Festival et surtout, une Wembley Arena complète. Le groupe est définitivement passé dans une autre dimension avec “Sempiternal” et il s’agit désormais de transformer l’essai. De passer de trop gros poisson pour la jeune scène metal à challenger sérieux dans les hautes sphères du rock.

“That’s The Spirit” verra le jour le 11 septembre prochain. Sony Music gère désormais l’intégralité de la diffusion du groupe, puisque BMTH vient de quitter l’écurie Epitaph aux Etats-Unis pour rejoindre celle de Columbia. Le personnel de chez Sony nous le confirme d’ailleurs, 2015-2016 sera l’année de deux groupes chez Sony : One Direction et Bring Me The Horizon. Aucun lien artistique à faire entre les deux formations, mais une volonté affichée de faire en sorte que le monde entier connaisse le crew de Sheffield.

A l’écoute des huit titres pour le moment proposés, on ne voit pas comment le succès pourrait lui échapper. La déjà connue “Happy Song” perpétue l’évolution du quintette alors que “Throne” se rapproche clairement d’un Linkin Park du début des années 2000. Sur ces chansons, Oli chante. Sa voix est très produite et les effets sont nombreux. Les cris ont quasiment disparus et ne reviennent que lors de succincts moments afin de nous rappeler que le combo en a toujours sous le pied. C’est d’ailleurs “True Friends” qui nous le rappelle à merveille. Entre rythmique rentre dedans et refrain plus que tubesque, définitivement un grand moment de l’essai.

A moins que le tube se trouve dans les autres chansons. Celles qui donneront aux fans de “Suicide Season” des frissons. De dégoût ou de plaisir, on ne le sait pas encore, mais il va falloir tuer l’image qu’avait BMTH dix ans auparavant pour aborder sereinement la suite de cet album. Exit les paroles sombres et borderline, Bring Me The Horizon dépense son énergie à devenir positif.

Que penser de ce tube dancefloor ou des deux pop songs qui clôturent cette écoute ? Une seule écoute ne permet pas de juger. Cependant, nous pouvons déjà annoncer que cette réalisation fera parler d’elle. Que le groupe perdra de nombreux fans car l’évolution et la maturité ne sont jamais prises en compte lorsqu’il s’agit d’un groupe au background metal. Mais combien en gagnera t-il en échange ?

Car oui, aujourd’hui Bring Me The Horizon n’est plus un groupe de metal. Et ce n’est pas plus mal. Après avoir ouvert le monde des musiques extrêmes à un nouveau public, le renouveau du rock passera sûrement par ce “That’s The Spirit”. “Sempiternal” était un tour de force pour le public déjà acquis du groupe. Le nouvel opus sera la clé qui le propulsera aux oreilles du reste du monde.

Concernant le fait important qu’est la production signée Jordan Fish : le groupe, par ce biais, envoie un message très fort. Non seulement les musiciens prouvent une autonomie suffisamment efficace pour que ce qu’ils produisent ne soit pas juste accepté, mais donne envie à Sony de les propulser en haut de l’affiche. Mais aussi, ils assument la direction artistique prise. Le public aimera ou détestera, mais ne pourra pas accuser la formation de vendre son âme au Diable. C’est un groupe enfin mûr qui se présente à nous. Et si l’horizon sera un premier objectif, nul doute que les Anglais ne s’arrêteront pas là.

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN