
Il y a presque 50 ans, les New-Yorkais de KISS dévoilaient Destroyer, un album qui a littéralement dynamité les codes du rock et propulsé le groupe au rang d’icônes internationales. Depuis, on les appelle les “superheroes of rock” ou les “comic book rockers”. Mais vous êtes-vous déjà demandé d’où venaient ces surnoms ? L’explication se trouve peut-être dans l’artwork magistral imaginé par Ken Kelly. RockUrLife vous plonge dans les détails heroic fantasy de cette pochette hors du temps.
L’album
Destroyer, quatrième album studio de KISS, paraît le 15 mars 1976 et décroche un disque d’or seulement quelques semaines après sa sortie. Aujourd’hui encore, sa force ne s’essouffle pas : l’album est certifié neuf fois disque de platine aux États-Unis. Son succès tient en partie à la production de Bob Ezrin, figure incontournable qui collaborait alors avec Alice Cooper, et qui a élevé Destroyer au rang d’album culte. Aucun titre n’est à jeter : de l’ouverture explosive “Detroit Rock City” aux plus discrets “Flaming Youth”, en passant par le fédérateur “Shout It Out Loud”, le disque est fréquemment cité comme l’une des productions les plus abouties de la période 1970 de KISS. Et si Destroyer reste aussi mythique, c’est autant pour ses morceaux devenus classiques que pour sa pochette spectaculaire, qui transforme les quatre musiciens en véritables super-héros.
L’artiste
Kenneth William Kelly de son nom complet est né en 1946 dans la ville de New London dans le Connecticut. Il découvre très tôt sa passion pour le dessin mais contre toute attente, il ne poursuit pas d’études artistiques et rejoint les Marines de 1965 à 1968. À son retour, il entre chez Warner Publishing où il collabore avec son oncle, Frank Frazetta, immense figure de l’heroic fantasy.

Kelly débute sa carrière au début des années 1970 en illustrant des couvertures pour les magazines horrifiques Vampirella, Eerie et Creepy. Cinq ans plus tard, sa carrière prend un tournant majeur lorsqu’il est approché par KISS pour réaliser la pochette de Destroyer. Le groupe, grand lecteur de comics, souhaitait initialement engager Frank Frazetta mais, faute de moyens, se tourne vers Kelly dont le style puissant et fantastique s’en rapproche.
La cover de Destroyer devient un véritable tremplin : il enchaîne avec Love Gun, puis signe également des pochettes majeures pour Rainbow (Rising) et plus tard pour Manowar. Tous ces visuels partagent la même force : un imaginaire héroïque, épique et surdimensionné. Parallèlement à ces collaborations musicales, Kelly s’impose aussi grâce à ses illustrations de Conan le Barbare et de Tarzan, aujourd’hui pleinement inscrites dans les canons de la pop culture.


La cover

Pour la pochette de Destroyer, Ken Kelly avait reçu des directives précises de la part du directeur artistique de KISS, Dennis Wallock. L’objectif était de représenter les quatre membres du groupe au premier plan, bondissant vers le spectateur, avec des flammes en arrière-plan. Mais un détail ne vous échappera pas : ces flammes ont disparu. La version que nous connaissons est en réalité la seconde version de la cover. La première, où l’on pouvait apercevoir une ville enflammée en arrière-plan, a été jugée trop choquante par la maison de disque et a été modifiée.
À la place, l’arrière-plan présente un décor fondu dans un nuage de fumée aux tons orangés et bleutés, créant une atmosphère surréaliste caractéristique de l’heroic fantasy. Ce fond, immédiatement reconnaissable, est souvent décrit comme un ciel dramatique. Pourtant, en y regardant de plus près, on distingue une ville en ruines et des bâtiments éventrés, comme ravagés par une tornade… et peut-être que les quatre membres du groupe y sont pour quelque chose : de véritables Destroyers.
On devine encore les traces de la première version de la pochette : les teintes éclatantes du fond évoquent des flammes dans un ciel nocturne. L’une des marques les plus frappantes de cette retouche se situe sur la jambe droite de Paul Stanley, qui s’efface au niveau de la cheville, vestige du travail effectué sur cette peinture à l’huile. Un détail discret, mais qui ajoute une profondeur supplémentaire à l’artwork.
Passons maintenant au premier plan, où se déroule l’action principale. Face au spectateur, les quatre musiciens s’imposent par leur taille monumentale, renforcée par les bâtiments en arrière-plan qui paraissent presque insignifiants à côté d’eux. Ils se tiennent sur un tas de débris et semblent légèrement léviter, ce qui leur confère un aspect surhumain et renforce l’aura héroïque de la scène.
Cette cover magnifie véritablement le quatuor et matérialise leurs surnoms : Starchild, Catman, Spaceman et Demon deviennent de véritables héros du rock. Le maquillage iconique, les costumes reconnaissables et la musculature sculpturale des membres leur donnent un relief digne des figures mythologiques et fantastiques. D’ailleurs, les griffes intégrées au costume de Gene Simmons évoquent immédiatement le personnage de Wolverine, apparu un an plus tôt, en 1974, clin d’œil subtil à l’univers des comics qui fascinait le groupe à cette époque.
Au-delà de l’image du groupe, cette pochette marque un tournant décisif dans la carrière de Ken Kelly, aujourd’hui reconnu comme l’un des pionniers de l’heroic fantasy. Bien que les musiciens soient identifiables, certains traits accentués leur donnent un caractère fictif, comme s’ils sortaient tout droit d’un comic. Une chose est sûre : cette cover a transformé KISS en héros visuels, symboles de puissance, de grandeur et d’admiration.






