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KATATONIA @ Le Trabendo (10/12/25)

Alors que Louane remplissait le Zénith de Paris, la salle voisine, le Trabendo, accueillait une soirée aux antipodes. Comme un voyage dans le Grand Nord, le public a assisté à une représentation de grands maîtres : les mélancoliques Katatonia, soutenus par les nostalgiques Evergrey et les éco-sensibles de Klogr. Ensemble, ils ont enveloppé le Trabendo d’une atmosphère onirique et immersive, offrant un instant suspendu, hors du temps. RockUrLife vous fait revivre cette parenthèse singulière.

Klogr

Pour cette soirée en trois temps, ce sont les Italiens de KLOGR qui ouvrent le bal. Le groupe de metal alternatif avait déjà assuré la première partie d’Evergrey au Petit Bain en novembre 2024. Et pour ce retour parisien, ils semblent avoir déjà fait quelque adeptes. Devant un Trabendo qui se remplit progressivement, le groupe délivre un set court mais efficace.

La voix de leur chanteur Rusty, est râpeuse, métallique, presque rocailleuse. Mais la force motrice du groupe réside dans ses lignes de basse massives et écrasantes, soutenues par une batterie martiale. Côté esthétique, Klogr utilise le live comme un vecteur de sensibilisation aux enjeux environnementaux. Ce soir, la guitare de Crivez, floquée à l’effigie de Sea Shepherd, en est un rappel visuel fort. Cette profusion de riffs alternatifs, catchy et lourds, prépare idéalement le public pour ce concert qui s’annonce chargé en émotions. 


Evergrey : intense et voluptueux

La suite de la soirée met à l’honneur des groupes suédois bien connus du public français. Pour cette deuxième partie, c’est EVERGREY qui prend le relais. Habitué des scènes parisiennes, le groupe est accueilli comme un véritable co-headliner pour cette date. L’ouverture sur “Silent Arc”, portée par un riff massif, met immédiatement toutes les têtes en mouvement. Le chant de Tom S. Englund résonne comme un cri de ralliement, repris en chœur par un auditoire conquis, à qui il n’est plus nécessaire de présenter le groupe. 

Sur scène, un nouveau visage attire l’attention : le guitariste Stephen Platt, qui remplace Henrik Danhage pour cette tournée. Connu notamment pour ses collaborations live avec Devin Townsend et pour son travail avec le groupe de death metal mélodique Star Symmetry, Platt impressionne par sa maîtrise guitaristique. Il restitue les solos de Danhage avec une précision bluffante, tout en conservant l’émotion et la sensibilité qui font la signature du groupe.

Pour cette tournée où Evergrey partage l’affiche avec Katatonia, on pouvait légitimement espérer entendre “Cold Dreams”, morceau sur lequel Jonas Renkse apparaît en featuring. Bingo ! Le titre est bien au rendez-vous … mais l’exécution laisse un goût mitigé. Les parties chantées par Renkse sont diffusées sur bande, accompagnées d’une projection vidéo, alors même que le chanteur se trouve dans les coulisses. Une occasion manquée et légèrement frustrante. Reste que le morceau s’impose comme une vraie réussite en live, continuant de résonner longtemps après la fin du show.

Ce concert est aussi l’occasion pour le groupe de teaser son prochain album, avec le single “Oxygen”, qui clôt le set. Le morceau est déjà bien intégré par les fans, qui reprennent en chœur son refrain mélodique et éthéré. En fin de concert, les musiciens prennent même le temps de s’installer près du stand de merchandising pour un moment d’échange avec des fans nombreux et fidèles au rendez-vous. 

Katatonia : prog et mélancolie

Après ce set intense, c’est enfin au tour des patrons de la soirée. Pour la suite de ce road trip musical en Suède, cap sur Stockholm afin d’accueillir KATATONIA, qui délivre un set plus progressif que jamais. Cette date met à l’honneur le dernier album, Nightmares As Extensions Of The Waking State, colonne vertébrale de la setlist.

Le concert s’ouvre sur “Thrice”, premier titre du disque : une entrée en matière très prog, aux structures complexes, mais portée par un refrain mémorable, sublimé par la voix de velours de Jonas Renkse. Un démarrage volontairement anti-spectaculaire, presque retenu, qui pose d’emblée les fondations mélancoliques de la suite du set. Mais ce concert célèbre aussi (de manière non officielle) les presque vingt ans de The Great Cold Distance. Des titres emblématiques comme “Leaders”, “Soil’s Song” ou “July” fédèrent la salle en un chœur uni. 


Concert de prog oblige, on se surprend à battre la mesure sur des rythmiques asymétriques et changeantes. La section rythmique impressionne particulièrement ce soir : la batterie de Daniel Moilanen s’impose comme la véritable force motrice du show, soutenue par la basse enveloppante et presque hypnotique de Niklas Sandin, notamment sur “Old Heart Falls”. Côté guitares, le line up est entièrement renouvelé avec Nico Elgstrand et Sebastian Svalland. Ils relèvent le défi avec brio, rendant hommage aux solo iconiques d’Anders Nyström sans jamais en trahir l’esprit.

Le set bascule ensuite dans une dimension plus doom, avec des morceaux comme “Nephilim”, qui plongent la foule dans les profondeurs torturées de l’âme humaine. Les concerts de Katatonia ne sont pas des expériences que l’on vit dans la bousculade : c’est une expérience émotionnelle, presque introspective, qui explore des territoires intimes rarement mis à nu sur scène.

Cette plongée intérieure est renforcée par un travail visuel abstrait. Un jeu d’ombres et de lumières enveloppe la scène d’un contre-jour permanent, noyé dans une fumée bleutée, à la fois envoûtante et mélancolique. Les musiciens apparaissent davantage comme des silhouettes mouvantes que comme des figures frontales. Cette scénographie nébuleuse et parfois frustrante participe pleinement à l’esthétique et à l’atmosphère du concert.

Puis, sans prévenir, le set touche déjà à sa fin. Dans une logique cyclique cohérente, Katatonia conclut sa setlist avec “In the Event Of”, titre de clôture du dernier album, porté par un solo majestueux qui prolonge la magie quelques instants encore. Mais le public parisien refuse de s’arrêter là. Après plusieurs minutes d’ovation, le groupe revient sur scène pour un ultime coup de grâce : “Forsaker”, lourd, lancinant, viscéral. La foule headbang à l’unisson, comme une seule entité, sous l’emprise de ce riff implacable.

À chaque passage, la tempête Katatonia ne laisse jamais son audience indemne. Ce concert s’impose comme une expérience émotionnellement dense et musicalement maîtrisée de bout en bout. Si le titre de l’album annonce que les cauchemars sont une extension de l’état d’éveil, Katatonia nous a offert une véritable promenade onirique à l’état de veille, où mélancolie et beauté se rencontrent et s’entrelacent durablement.

Katatonia Setlist Le Trabendo, Paris, France, Waking State of Europe 2025

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Lucie Allet
Tombée dans la marmite du metal dès mon plus jeune âge, je l’aime sous toutes ses formes et j’essaie de transmettre sa passion, sa force et sa sincérité dans mes chroniques.