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Cover Story #26 : Scorpions – Lovedrive


Après avoir fait scandale avec les covers de In Trance en 1975, puis Virgin Killer en 1976, les Allemands de Scorpions remettent le couvert en 1979. Avec la pochette de Lovedrive, signée Hipgnosis, le groupe affirme une fois encore une esthétique volontairement provocatrice, qui continue à nourrir les débats et à fasciner les amateurs de rock plus de quarante ans plus tard.

L’album

À la fin des années 1970, Scorpions amorce sa mue. Un an après le live Tokyo Tapes, Lovedrive marque un tournant clair : fini l’esthétique psychédélique, place à un hard rock taillé pour les arènes et les radios FM. Le disque enchaîne les moments forts : de l’ouverture parfaitement calibrée avec “Loving You Sunday Morning”, à l’atmosphère presque reggae de “Is There Anybody There?”, sans oublier “Coast To Coast”, instrumental culte repris sur scène encore aujourd’hui. 

Ce virage s’accompagne du départ du guitar hero Uli Jon Roth et de l’arrivée de Matthias Jabs, dont le jeu moderne évoque Eddie Van Halen. On retrouve également Michael Schenker, frère de Rudolf, qui participe à la composition de plusieurs morceaux majeurs. Le résultat ? Un succès international, une première entrée au Billboard 200, et le point de départ du Scorpions des années 1980, plus direct et plus conquérant que jamais.

L’artiste

La pochette controversée de Lovedrive est l’œuvre du collectif britannique Hipgnosis, fondé en 1968 par Storm Thorgerson, Aubrey “Po” Powell et Peter Christopherson. Derrière ce nom discret se cache pourtant l’un des ateliers les plus influents de l’histoire du rock : ils sont notamment à l’origine des pochettes de The Dark Side Of The Moon (1973) des Pink Floyd, Houses Of The Holy (1973) de Led Zeppelin, ou encore Phenomenon (1974) de UFO.

Reconnu pour ses créations visuelles innovantes, provocatrices et souvent teintées d’absurde, Hipgnosis s’impose comme un acteur incontournable du design musical. Même après la dissolution du collectif en 1983, Storm Thorgerson poursuit une carrière indépendante, signant d’autres pochettes d’albums majeurs.

La cover

Il y a des pochettes qui marquent les esprits, et Lovedrive de Scorpions en fait partie. Couleurs saturées, personnages énigmatiques, composition étrange… tout attire l’œil. Son côté absurde et provocateur amuse autant qu’il dérange, et c’est exactement ce qui la rend inoubliable. Aux États-Unis, elle a même été censurée, remplacée par un scorpion bleu sur fond noir. Mais regardons cela de plus près ! 


Sur la banquette arrière d’une Rolls-Royce ayant appartenu à Elton John, deux inconnus s’abandonnent à des ébats coquins. Le cadre étroit qu’impose le format de la pochette crée un huis clos oppressant qui nous force à entrer dans l’intimité de ces deux personnes : impossible de détourner le regard.

En parlant de regard, celui de la femme est dirigé directement vers le spectateur, comme si elle était consciente de notre présence. Son expression assez neutre questionne : s’agit-il d’une invitation à rejoindre le couple ou au contraire est elle totalement détachée de la situation ? A l’inverse, l’homme est entièrement concentré sur elle, bras autour de ses épaules, main sur son sein, regard fixé sur sa poitrine. Le décalage entre ces deux personnages crée une tension qui intrigue automatiquement le spectateur.

Mais l’élément qui attire vraiment le regard et suscite autant la controverse que l’obsession, c’est le chewing-gum rose, la véritable star de la pochette. C’est non seulement l’un des seuls éléments coloré de la pochette avec la robe bleue de la femme, mais il est aussi étrange qu’intriguant : pourquoi est-il là ? Comment s’est-il retrouvé accroché au sein de cette femme ? S’agit-il d’une extension symbolique de sa poitrine ou d’un simple fétiche de l’homme, totalement absorbé par elle ? Ces questions sans réponse font toute la magie et le charme fascinant de cette cover.

Hipgnosis a une fois de plus réussi son pari : créer une pochette mémorable, qui au premier regard semble ordinaire, mais cache en réalité une dimension presque paranormale. La cover de Lovedrive est à la fois attirante et déstabilisante, jouant sur des contrastes puissants : réalisme versus absurde, ordinaire versus extraordinaire, qui provoquent des réactions tout aussi contrastées. L’objectif de Scorpions était clair : choquer, surprendre, faire réagir… mission accomplie. Pour couronner le tout, le groupe a de nouveau collaboré avec Hipgnosis et Storm Thorgerson pour la pochette de Animal Magnetism en 1980.

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Lucie Allet
Tombée dans la marmite du metal dès mon plus jeune âge, je l’aime sous toutes ses formes et j’essaie de transmettre sa passion, sa force et sa sincérité dans mes chroniques.