Thrice – Horizons/West

Quatre ans après Horizons/East, Thrice poursuit sa duologie introspective avec le bien nommé Horizons/West. Si l’Est évoquait l’aube, la reconstruction, et une certaine lumière intérieure, l’Ouest s’ouvre sur la nuit, le doute, et l’effondrement. Le quatuor californien livre un album aussi viscéral que cérébral, condensant vingt-cinq ans d’évolution musicale dans un disque tendu, organique et profondément actuel.

Entre violence maîtrisée et nuances sonores

Horizons/West frappe fort dès les premières secondes de “Blackout”, morceau tendu et électronique où la tension monte sans jamais exploser totalement. Avec “Gnash”, Thrice renoue avec la brutalité de ses anciens disques, livrant un des breakdowns les plus violents de sa discographie. “Holding On”, plus direct, rappelle l’urgence punk, tandis que des titres comme “The Dark Glow” ou “Vesper Light” explorent des territoires à l’ambiance très particulière à la manière de The Alchemy Index. L’équilibre est constant : chaque rugissement est contrebalancé par un moment suspendu et une émotion forte.

Une production brute pour une émotion à fleur de peau

Mais là où Horizons/West impressionne, c’est dans sa capacité à faire coexister violence et lumière. La production maison donne au disque un grain rugueux, amplifié par le mix de Scott Evans, qui capture l’âme live du groupe sans l’assécher. Par ces temps qui courent où les productions sont parfois trop léchées, cela fait du bien d’entendre un grain brut. Kensrue, au sommet de ses capacités vocales, varie les registres avec aisance : du cri près torturé sur “Gnash” à la douceur brumeuse de “Undertow”. Thrice n’a jamais autant assumé sa maturité émotionnelle, ni aussi bien fusionné ses multiples visages et influences.

La catharsis finale

L’écriture, toujours aussi engagée, aborde l’angoisse contemporaine avec une justesse rare. Le groupe questionne la réalité filtrée par les algorithmes, les réseaux sociaux, la peur collective, l’identité fragmentée. Plutôt que d’imposer un discours, Horizons/West invite à réfléchir. Ici, le calme n’est pas apaisement (ou soulagement), mais acceptation (ou résignation). Et une chose est claire : Thrice continue de ne jamais se répéter.