
Il y a vingt-cinq ans, Refused clamait haut et fort Refused Are Fucking Dead. Pourtant, le groupe suédois est revenu, a marqué l’histoire avec The Shape Of Punk To Come, et n’a cessé depuis de bousculer les codes du hardcore, mêlant politique, énergie brute et expérimentations sonores. Aujourd’hui, c’est bel et bien la fin : Dennis Lyxzén et ses compagnons ont annoncé leur ultime tournée d’adieu. Une dernière occasion pour célébrer une carrière hors normes, entre engagement, chaos et créativité sans compromis.
À quelques semaines de leur passage en France – le 8 octobre à Paris et le 9 octobre à Lille – nous avons échangé avec Dennis. L’occasion de revenir sur la décision de tirer définitivement le rideau, sur le poids de l’héritage laissé par Refused, mais aussi sur la nécessité de continuer à parler de politique à travers la musique. Un entretien sans nostalgie, mais avec une lucidité et une passion intactes.
Retour en 1998, Refused Are Fucking Dead était presque un cri de frustration. Maintenant vous tournez la page selon vos propres termes. Quelle différence ça fait de mettre fin au groupe de cette manière ?
Dennis Lyxzén (chant) : En 1998, on n’était pas amis, on ne passait pas un bon moment et, honnêtement, le monde se fichait un peu de notre groupe. Donc ça fait vraiment du bien de pouvoir mettre fin à l’aventure cette fois en contrôlant la séparation, tout en s’entendant bien et en s’amusant énormément en tournée. Ça ressemble beaucoup plus à une célébration qu’à des funérailles. C’est vraiment, vraiment différent.
Tu as dit que le groupe est aujourd’hui exactement ce que vous vouliez qu’il soit depuis le début. Donc au fond, se séparer maintenant, c’est le moment parfait ?
Dennis : Je l’ai déjà dit, mais la vie, ce sont des circonstances. Les choses arrivent et on se retrouve là où on est. Mais oui, tu as raison. Je pense qu’aujourd’hui, notre son, notre manière d’interagir et le fait qu’on s’apprécie autant, ça n’a jamais été aussi fort. Ce qui rend le timing étrange pour s’arrêter. Mais en même temps, c’est peut-être justement parce qu’on sait qu’on se sépare. Ça enlève une énorme pression : on n’a plus à se soucier de l’avenir, du prochain cycle d’enregistrement, de ce qui vient après. On peut juste profiter d’être ensemble, jouer de la musique et s’amuser.
C’est une bonne raison pour venir vous voir sur cette tournée d’adieu !
Dennis : Je pense qu’on n’a jamais été meilleurs sur scène. Musicalement, notre jeu est vraiment solide. Bien sûr, dans les années 90 il y avait plus de chaos, mais c’était autre chose. Aujourd’hui, la manière dont on joue ensemble est fantastique, et on s’éclate vraiment. Parce que jouer dans un groupe, c’est un privilège, c’est incroyablement cool — mais ce n’est pas toujours fun. Cette dernière année, en revanche, ça n’a été que du plaisir, de l’excitation. C’est étrange, parce qu’on est un groupe politique qui joue une musique violente et agressive, et pourtant en ce moment, on s’amuse comme des fous. C’est un peu paradoxal, mais c’est la réalité.

Est-ce que ta crise cardiaque a changé ta façon d’aborder cette tournée d’adieu, ou même la vie en général ?
Dennis : Oui, bien sûr. Quand tu frôles la mort, ça change forcément ton regard sur la vie. Au début, je ne voulais pas que ça ait un impact. Je me disais : “Ce n’est rien, ça va, c’est juste un autre chapitre de la biographie“. Mais quand tu réalises à quel point ça a été proche, ça change tout. J’ai toujours été quelqu’un d’incroyablement agité, toujours tourné vers l’avant. Mais cette dernière année, j’ai appris à savourer les concerts d’une manière nouvelle. Prendre le temps de profiter de l’instant, de regarder la foule et de me dire : “Ça se passe ici et maintenant“. Ça m’a fait évoluer, et je crois que j’aborde la vie différemment aujourd’hui – dans le bon sens. C’est presque comme une seconde chance. Alors je me dis : “Tu es toujours là, fais-en le meilleur usage“. Et c’est vraiment positif.
En Suède, il existe le mot “lagom“, qui décrit un état d’équilibre idéal. Est-ce que tu as atteint ce stade ?
Dennis : Honnêtement, je ne pense pas que je serai jamais quelqu’un de “lagom” dans ma manière d’aborder la vie. J’ai toujours été à fond, toujours dans le “full steam ahead“. Mais après ma crise cardiaque, pour la première fois de ma vie d’adulte, je n’ai rien fait pendant quatre ou cinq mois. Rien du tout. Et c’était très étrange, parce que je déteste ça, pour moi c’est l’horreur. Mais ce genre d’événement change ta perspective, et peut-être aussi ta façon de gérer les choses. Aujourd’hui, je cherche davantage un équilibre. J’ai encore envie de faire mille projets, mais je n’ai plus envie de m’épuiser ou de me tuer à la tâche pour les réaliser.
Le plus bel objectif dans la vie, c’est d’être capable de vivre dans le présent, de profiter du moment. Parce qu’on est toujours en train de regarder en arrière ou vers l’avenir, mais c’est très difficile d’être vraiment dans l’instant.
Dennis : Oui, et je pense que c’est vrai pour tout le monde. Mais maintenant j’essaie vraiment, surtout sur scène, parce que je sais qu’il nous reste 20, peut-être 25 concerts, et après ce sera terminé. Donc je veux profiter de chacun d’entre eux. On vient d’annoncer le dernier concert dans notre ville natale et tout le monde en parle, et moi je suis super excité bien sûr, mais avant ça il reste encore 22 concerts à jouer. Je veux profiter de chacun, jusqu’au dernier.
Vous avez aussi fait une déclaration en tant que groupe sur les réseaux sociaux, en disant clairement que ce n’était pas une blague, que vous n’alliez pas vous reformer dans 10 ans. En gros : il faut venir vous voir maintenant, parce que c’est maintenant ou jamais. Est-ce que tu penses que les gens s’attendent toujours à ce qu’un groupe se sépare puis finisse par se réconcilier et revenir, au moins pour l’argent ?
Dennis : Oui. En fait, deux choses. Beaucoup de gens, quand on a fait notre année de reformation en 2012, pensaient qu’on s’était séparés à la fin de 2012 puis qu’on s’était reformés en 2015. Mais ce n’est pas ce qui s’est passé. On ne s’est jamais séparés : on a continué. Quand on a joué notre dernier concert en 2012 à Umeå, on savait déjà qu’un mois plus tard on serait en salle de répétition avec du nouveau matériel. Mais on a presque voulu faire croire qu’on s’arrêtait, justement pour que les gens ne sachent pas qu’on bossait sur de la nouvelle musique. Donc on voulait clarifier les choses : on ne s’est séparés qu’une seule fois, en 1999. Et c’était horrible. Et maintenant, oui, on se sépare à nouveau.
La deuxième chose, c’est que beaucoup de groupes se séparent, puis reviennent un peu pour l’argent. Tu fais quelques concerts, tu gagnes de l’argent, puis quelques années après tu repars en tournée. Je trouve ça un peu cynique, mais je comprends aussi. Les gens changent d’avis, se réconcilient, se disent : “Tiens, si on rejouait ?“. Et je pense que chacun a le droit de changer d’avis. Les dynamiques internes d’un groupe ne sont jamais noir ou blanc comme sur les réseaux sociaux. Donc je comprends que certains groupes se reforment, je comprends cet élan. Mais pour Refused, franchement, je n’imagine pas que ça arrive un jour.
Et quand tu regardes l’état du monde aujourd’hui, tu ne penses pas que Refused est plus que jamais un groupe nécessaire, peut-être même le plus pertinent qu’il puisse y avoir ? Parce qu’on a besoin de vous.
Dennis : Oui, bien sûr. Mais en même temps, on parle de politique depuis le milieu des années 90. Il faut aussi que d’autres prennent le relais, ça ne devrait pas toujours reposer sur nous. Mais je reconnais que c’est assez particulier de faire une tournée d’adieu qui se veut une célébration alors que l’état du monde la rend incroyablement politique. On a toujours été un groupe très politique, mais cette année a peut-être été l’année la plus politique qu’on ait connue en tournée, justement à cause de ce qui se passe autour de nous.
Et ce que je voudrais plus que tout, c’est ne pas avoir à parler de politique. Mon rêve, ce serait de vivre dans un monde où je n’aurais pas à être cette personne. Mais le monde va mal, et il faut en parler. Je pense sincèrement que si tu es une personne – pas seulement un musicien – et que tu vois ce qui se passe sans rien dire, alors tu fais largement partie du problème. Nous, on n’a jamais eu peur de prendre la parole, et je vais continuer à le faire tant qu’il le faudra. Mais idéalement, oui, on devrait juste jouer de la musique et parler d’autre chose, mais quelqu’un doit bien assumer ce rôle.
Et si tu ne parlais pas de politique, de quoi aimerais-tu parler ?
Dennis : Toujours de musique et d’art. C’est ça qui m’anime, c’est ça qui compte vraiment pour moi. J’aimerais tellement pouvoir parler de ça beaucoup plus que de politique. Mais bon… ce qui se passe aux États-Unis, en Palestine, ou dans toute l’Europe avec la montée du fascisme, c’est trop important pour qu’on fasse semblant. On est obligés d’en parler. Je n’en ai pas envie, mais il le faut. Alors oui, je préférerais discuter d’art, de culture, de musique, ou d’un super livre que je viens de lire. Mais le monde étant ce qu’il est, ça reste frustrant.
Est-ce que tu aimerais écrire un livre, raconter ton histoire, ton lien personnel à l’art et à la musique ?
Dennis : Peut-être, oui. J’aimerais bien. David et moi avons même déjà parlé de faire un livre sur Refused, pour raconter notre histoire. Et puis, j’ai vécu pas mal de choses. Je ne prétends pas que ma vie soit plus intéressante que celle des autres, mais j’ai eu une existence riche, j’ai fait plein de choses incroyables que j’aimerais partager. Donc peut-être qu’un jour ça arrivera. Il faudrait que je sois capable de m’asseoir et de me poser, ce qui n’est pas vraiment mon point fort. Mais oui, j’aimerais vraiment écrire quelque chose. On verra, j’espère que ça se fera dans le futur.
Ce serait un exercice incroyable, surtout en le faisant avec quelqu’un avec qui tu partages 30 ans d’histoire.
Dennis : Oui, je travaille de façon très chaotique. Je fais cinq minutes sur un truc, puis cinq minutes sur autre chose, je pars un peu dans tous les sens. Et quand tu écris un livre, il faut de la concentration. Donc on verra. J’ai vraiment envie de le faire, et j’espère qu’un jour j’aurai une idée qui me donnera envie de m’asseoir et d’écrire. Comme je l’ai dit, David et moi avons parlé de faire un livre sur Refused, raconter notre histoire. Mais là aussi, il faut trouver le temps et l’énergie pour le faire vraiment.
Heureusement, certaines choses ont quand même changé. Par exemple, la dernière fois que tu es venu au Hellfest, tu avais pris position en disant qu’il fallait plus de femmes sur scène. Dans une interview précédente, tu avais même confié que tu comptais littéralement les groupes avec des femmes au moment de jouer au festival. Cette année, quand tu es revenu, il y avait environ 25 % de groupes avec des femmes au Hellfest, ce qui est déjà pas mal.
Dennis : Oui, je pense que ce genre de changements prend du temps, parce que c’est un changement culturel qui doit se produire. Plus il y aura de femmes et de personnes non-binaires sur scène, plus d’autres se diront : “Moi aussi, je peux y aller“. Et nous, on a le privilège d’être sur scène et de pouvoir le dire. Je continue à le faire, je continue à compter. Mais comme tu le dis, si tu joues au Hellfest et que tu comptes et que tu vois que ça va plutôt bien, tu te dis que tu n’as pas besoin d’en parler autant. Cet été, sur les festivals où on a joué, je continue à compter : “OK, combien de femmes aujourd’hui ?“. Mais le monde du metal et du hardcore évolue lentement. La pop, de manière générale, compte beaucoup de femmes qui réussissent, mais dans le metal et le hardcore, ça avance plus doucement. Cela dit, ça avance dans la bonne direction. Et je crois aussi que le fait que des groupes comme nous en parlent pousse les promoteurs et les programmateurs à travailler un peu plus là-dessus, et c’est une bonne chose.

Peut-être que vous avez eu un vrai impact sur ce point. Revenons un peu en arrière : au début du groupe, tu disais que tes paroles paraissaient exagérées, dystopiques même. Mais aujourd’hui, le monde semble avoir rattrapé ces “exagérations“. Comment tu le vis ? Est-ce une frustration ou une fierté d’avoir été aussi réaliste ?
Dennis : Je n’étais pas Nostradamus quand j’ai écrit ces textes, mais oui, c’est un peu triste. On joue pas mal de morceaux très anciens, de notre première démo, de notre premier EP. Quand je relis les paroles, elles paraissent un peu naïves, écrites par un jeune. Mais en même temps, elles font toujours sens. Ce qui, à l’époque, me semblait être le pire scénario possible, c’est devenu la réalité du monde d’aujourd’hui. C’est triste, mais aussi intéressant de voir que certaines paroles, quand tu les relis, tu te dis :”Ça ne veut plus rien dire“. Pourtant, beaucoup de nos textes des débuts résonnent encore aujourd’hui – et ça, c’est surtout triste.
En regardant en arrière, The Shape Of Punk To Come a d’abord été rejeté. Tu comprends maintenant pourquoi il l’a été, et pourquoi il est devenu un album culte des années plus tard ?
Dennis : Oui. Il a été rejeté parce qu’on faisait pleinement partie de la scène hardcore, on était vraiment un groupe hardcore. Et quand on a sorti ce disque… J’adore le hardcore, j’aime vraiment cette musique, mais ce n’est pas le milieu le plus ouvert d’esprit. Et dans les années 90, encore moins. Beaucoup de gens autour de nous nous trouvaient super prétentieux et bizarres. Et ils avaient raison, on l’était ! Mais comme tu le dis, le monde a fini par nous rattraper, et des gens en dehors du hardcore ont découvert notre musique. Puis ça a redescendu jusque dans la scène hardcore. Ça a été un parcours étrange. Je me souviens qu’en 1998, en tournée pour Shape, des kids hardcore venaient nous voir en nous disant : “Mais c’est de la merde ce que vous faites“. Donc oui, je comprends. Avec du recul, je me dis : “Mais à quoi on pensait ?“. Mais bon, c’est ce qu’on était, et on est restés fidèles à nous-mêmes.
Vous êtes restés fidèles à vous-mêmes, c’est sûr.
Dennis : Oui, oui.
Mais est-ce que le fait que cet album ait fini par être reconnu, canonisé même, a rendu plus difficile le fait d’avancer avec votre musique ensuite ?
Dennis : Oui et non. Je dirais que le fait de lancer d’autres groupes permettait d’éviter de toujours se mesurer à The Shape Of Punk To Come. C’était facile de dire : “Ce n’est pas Refused, c’est autre chose“. Mais en 2012, quand on a décidé d’écrire de la nouvelle musique, là, c’était difficile. Quand tu as un disque avec lequel les gens ont vécu aussi longtemps, qu’ils ont autant aimé, c’est compliqué de se dire : “Comment on fait pour lui donner une suite ?“. Mais comme tu l’as dit, on devait rester fidèles à nous-mêmes et aux idées qu’on voulait défendre. Et je pense qu’on s’en est plutôt bien sortis.
Je dis toujours que quand on a sorti Freedom, on aurait pu offrir une barre d’or à tous ceux qui aimaient Refused, et ils auraient quand même dit : “Non, pas assez bien“. Parce que c’était ça : si on avait fait un disque trop proche de Shape, les gens auraient été déçus que ce soit “trop pareil“. Et comme on a fait un disque différent, ils ont été déçus que ça ne ressemble pas à Shape. C’était dur. Mais on s’est dit : “Faisons la musique qu’on a envie de faire“, et c’est ce qu’on a fait.
Et je crois – ce n’est que mon avis – que Freedom et War Music sont des disques que les gens redécouvriront avec le temps, et diront : “En fait, c’est plutôt bon“. Je le sais aussi parce qu’on a fait l’édition 25 ans de Shape avec plein de démos, et il y a tellement de démos de Freedom et War Music qui ne sont pas sorties. J’ai vraiment hâte qu’on fasse une édition anniversaire de War Music dans 15 ans. Il y a tellement de choses cool qui n’ont pas été publiées. Je pense que beaucoup de gens se diront alors “putain, c’était ça aussi“. Parce qu’au final, tout est dans le processus.
Pas toujours facile d’être un visionnaire !
Dennis : (rires) Si tu veux quelqu’un qui a trouvé la formule de ce qu’il voulait faire, tu prends un AC/DC, un Slayer ou un Bad Religion. Leur identité est claire : “Voilà qui nous sommes” et chaque disque sera dans cette continuité, avec quelques petites variations. Et c’est génial. Mais nous, nous n’avons jamais été comme ça. On est des artistes, on a toujours voulu essayer de nouvelles choses. Parfois, ça marche, parfois non, mais ça fait partie du jeu. C’est comme ça que tu finis par aimer Neil Young : il a sorti des albums que tu ne peux même pas écouter tellement ils sont étranges, et pourtant je trouve ça génial. Pour moi, c’est ça, un véritable artiste : tenter autre chose, surprendre, quitte à dérouter. Et nous, on a toujours fonctionné comme ça : essayer, voir jusqu’où on peut se pousser.
Alors quand tu penses à l’héritage du groupe, dans 20 ans, quand tous vos albums seront reconnus, tu aimerais qu’on retienne quoi de Refused ?
Dennis : Je ne sais pas. Mais ce que j’aimerais, c’est que les gens se disent qu’on a toujours fait les choses à notre façon, qu’aucun autre groupe hardcore n’a fait ce qu’on a fait, ni de la manière dont on l’a fait. J’aimerais qu’on retienne de Refused qu’on était ouverts d’esprit, qu’on n’avait pas peur de prendre des risques. Parfois ça a marché, parfois non, mais au moins on a essayé. Parce que si tu n’essaies pas, tu ne fais rien dans ta carrière. Et quand tu essaies, il arrive que tu échoues, et ça aussi, ça fait partie du processus. Les échecs sont intéressants : ils t’apprennent beaucoup, ils te guident sur la suite. Quand tu échoues, la vraie question, c’est qu’est-ce que tu fais après ?
C’est passionnant, et ça ferait un super sujet pour un livre.
Dennis : Exactement, “Le livre des échecs“, qui serait en réalité “Le livre des apprentissages“. Parce qu’on apprend bien plus en échouant qu’en réussissant. Quand tu réussis, tu ne sais jamais vraiment pourquoi. Mais quand tu échoues, tu comprends.
Comme tu l’as dit, tu n’as pas que Refused dans ta vie. À quoi va ressembler ta vie sans le groupe ?
Dennis : J’espère qu’elle sera toujours aussi belle. Comme tu dis, j’ai plein d’autres projets, plein d’autres groupes. Ce que je vais regretter avec Refused, c’est cette certitude qu’on avait : quand on venait jouer à Paris ou à Lille, on savait que ce serait un concert incroyable. Avec mes autres groupes, je dois souvent me battre pour que les gens les découvrent, et c’est très bien aussi, mais je vais manquer cette sécurité.
Côté créativité, je ne m’inquiète pas. J’ai au moins deux albums qui sortent l’an prochain, peut-être trois. Je travaille sur de la nouvelle musique avec mes groupes Invasion et Venice Casino. Et puis avec les gars de Refused, on continuera à jouer ensemble, donc il y aura aussi quelque chose de nouveau qui en sortira. L’avenir me paraît très intéressant, excitant même. Peut-être pas spectaculaire financièrement, mais ce n’est pas ce qui compte.
Tu pourras toujours sortir des éditions anniversaires de vos albums, ça rapportera un peu d’argent.
Dennis : (rires) Si mon objectif dans la vie avait été de faire de l’argent, j’aurais arrêté le punk il y a 30 ans. J’ai la chance que Refused soit devenu un grand groupe, donc de temps en temps ça nous rapporte un peu, mais ça n’a jamais été la motivation. Ça n’a jamais été une question d’argent. Ça a toujours été une question de création, de voir ce qu’on pouvait inventer avec ce qu’on avait. Et j’ai vécu comme ça pendant 53 ans, je peux continuer encore 30 ou 40 ans de plus.
Alors, quel serait ton prochain grand défi, ton prochain rêve ?
Dennis : Je ne sais pas. Comme je le disais, j’aimerais écrire un livre, explorer d’autres choses que la musique. Même si la musique restera toujours ce que j’aime le plus. Mais je suis sûr qu’il existe d’autres projets qui pourraient être stimulants et excitants. Pour l’instant, mon objectif c’est de finir cette année avec Refused, puis peut-être de prendre une pause, ne rien faire un petit moment. Enfin… ça n’arrivera sans doute pas, mais dans ma tête j’aimerais bien. Ensuite, ce sera continuer à jouer, à créer, à écrire de la musique. C’est ça que je fais, et c’est ce que je continuerai à faire.

C’est tout ce qu’on peut espérer. Vous serez à Paris le 8 octobre et tu as dit que vous veniez avec de super groupes. Tu peux nous en dire un mot ?
Dennis : À Paris, on joue avec Quicksand. Je les ai vus pour la première fois en 1992 et je les aime depuis ce jour. C’est un groupe incroyable, des gens formidables. Et je crois aussi qu’à Paris on joue avec Bleakness, un super groupe français. Je les ai découverts dans une cave à Umeå devant 40 personnes, et j’ai trouvé ça génial. J’ai acheté leur disque, et le gars m’a écrit en me disant : “Tu étais là, tu as acheté le disque, c’est fou“. Je lui ai alors proposé de jouer quelques concerts avec nous en France. Voilà, c’est l’esprit punk DIY, ça marche comme ça. Je pense que ce sera fantastique.
À Lille, on jouera avec Speedway, un groupe suédois de hardcore, nouvelle génération. Ils ont signé sur Revelation Records, ils ont tourné avec Shelter et Youth of Today. C’est un hardcore très marqué années 90, mais super bien exécuté. Ça va être très excitant, je suis vraiment impatient de ces concerts.
Notre média s’appelle RockUrLife. Alors dernière question : qu’est-ce qui rock ta life ?
Dennis : Eh bien, je viens d’avoir une nouvelle basse. Je vais faire un peu de pub pour Fender : je l’ai reçue la semaine dernière, et je suis super excité à l’idée d’écrire des morceaux avec. Et puis, évidemment, la musique. La musique a toujours été ce qui fait vibrer ma vie. Il y a tellement de bonne musique dans le monde, et tellement qui sort en ce moment, que c’est vraiment enthousiasmant. Donc oui, aujourd’hui, ce qui fait vibrer ma vie, c’est la musique.

Billetterie pour les concert de Paris et Lille ici.
Site web : officialrefused.com