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AS THEY BURN @ Divan Du Monde (15/05/15)

Dix ans. dix ans de carrière, deux albums, un EP, des tournées à foison et d’inoubliables moments sur les routes. Résumer la carrière d’As They Burn n’est pas chose aisée lorsque l’on tente de mesurer son impact sur la scène metal française de cette dernière décennie. Des studios de répète du 9.4, à la signature chez Victory Records, en passant par un Hellfest triomphal, les bonnes choses ont une fin et les cinq lascars du Val de Marne décidaient de partir la tête haute. Un Divan Du Monde à entrée libre pour faire ses adieux à son public, une affiche metal de prestige, des surprises à gogo et une émotion palpable de la première à la dernière minute. As They Burn est mort, vive As They Burn !

Pour ouvrir cette soirée (malheureusement nous n’avons pas pu assister au set de JESUISTHEO car toujours pas entré dans la salle : la rançon de la gloire), les Parisiens de CHECKMATE étaient réquisitionnés. Un peu plus d’un an après la sortie de son premier album qui a reçu une bonne presse, le groupe venait rendre un dernier hommage à leurs papas dans le genre. Checkmate sur scène c’est carré comme pas possible, puissant et incroyablement maîtrisé. Comme si Architects avait penché plus du coté metal que du coté -core. Chaque chanson agit comme un rouleau compresseur devant un public déjà nombreux et très motivé. Entre deux nouvelles chansons et des titres issus de “Immanence”, Checkmate déroule un set court et concis mais faisant une très forte impression. Si l’on aurait pu penser que les musiciens allaient être en roue libre ce soir vu la teneur émotionnelle de la soirée, il n’en est rien. Les Checkmate ont choisi que le meilleur hommage à rendre à As They Burn serait de prouver une fois de plus que la relève est déjà bien présente et qu’As They Burn n’aura pas ouvert toutes ces portes pour rien.

Dans la salle, tous les kids présents arborent pour la plupart des T-shirts à l’effigie d’As They Burn, pour le simple fait que la formation avait mis l’ensemble de son merch à prix libre. Une fois encore, le quintette a fait preuve d’altruisme pour que la soirée et l’hommage soit le plus chaleureux possible. Sur scène, on prépare l’arrivée de BETRAYING THE MARTYRS. Réunir les deux formations françaises metal s’étant le plus exporté à l’étranger ces dernières années est un joli tour de force pour cette soirée d’adieu. Bien que l’approche idéologique semble radicalement différente entre ATB et BTM, les retrouver sur la même affiche permet de jauger à quel point la réussite de ces deux groupes fut grande sur les routes internationales. Les kids ne s’y trompent pas d’ailleurs et les BTM sont accueillis comme des stars par une foule déchainée. Que l’on aime ou pas, il est indéniable qu’il se passe quelque chose lorsque Bertraying The Martyrs est sur scène. Le son est puissant, visuellement c’est imposant et suffisamment bien huilé pour que la sauce prenne très rapidement. Bien sûr, il ne faut pas prendre en compte certain gimmicks légèrement too much mais après tout, c’est l’jeu ma pauvre Lucette ! Le groupe se paie même le luxe de jouer leur reprise assez controversée de “Let It Go” (“La Reine Des Neiges”) dont le refrain sera repris par toute la salle de manière assez impressionnante. On aime ou pas, mais Betraying The Martyrs a le mérite de mettre le feu au Divan Du Monde et c’est exactement ce dont on avait besoin avant l’arrivée des stars de la soirée : As They Burn.

Le Divan du Monde affiche complet de chez complet. Si bien que la sécu de la salle s’est vue obligée de refuser des gens à l’extérieur de la salle tant la demande fut grande. Bien que conséquence néfaste, ce phénomène témoigne parfaitement du succès qu’est cette soirée.

Un rideau est tiré devant la scène du Divan Du Monde pendant que les musiciens s’affairent à effectuer un dernier soundcheck. Kevin ne résistera pas à l’envie de trahir sa présence en chauffant le Divan alors que le rideau est encore fermé. On sent une tension dans la salle purement jouissive. Une envie d’en découdre une dernière fois. Une envie pressante de quelque chose qu’on ne veut pas voir se terminer.

Les lumières s’éteignent, l’intro retentit et c’est une demi-surprise d’entendre des bruits de guns, de fusillade, de voitures et de voir le rideau s’ouvrir sur trois mecs cagoulés qui haranguent la foule avec des lampes torches. Un “94” éclairé trop de chaque coté de la scène et les cinq vrais lascars d’AS THEY BURN entrent en scène sous les acclamations d’un public déjà fou à la vue de cette intro complètement mégalo mais tordante. Les musiciens balancent d’entrée un “Philosophical Research Society”, soit l’un de leur meilleur morceau pour immoler une audience déjà très chaude. On sent un groupe très heureux d’être là, les sourires sont sur tous les visages et on voit chaque musicien s’appliquer à donner le meilleur de soi-même. Malgré tout, on sent les cinq un peu crispés par l’enjeu. Cette recherche absolue de la meilleure et de la dernière performance rend les premières chansons un peu trop propres pour un concert d’adieu. La puissance du combo compense largement cette légère crispation, d’autant que les membres prendront la pleine mesure de l’événement seulement au bout de trois, quatre chansons. Lorsque débarque “Medecine 2.0”, la bande se lâche vraiment et offre une prestation tout ce qu’il y a de plus réjouissante. C’est alors que, contre toute attente, et même si l’on connait l’amour que porte As They Burn à KoRn, retentit l’intro mondialement connue de “Blind” que Milton entame sur sa cymbale ride. Le Divan Du Monde n’en croit pas ses oreilles et jumpe même avant que l’ordre lui soit donné. La joie est de courte durée puisque le morceau s’arrête avant le premier couplet pour laisser place au non-moins tubesque, mais made in As They Burn, “F.R.E.A.K.S”, initialement en featuring avec Aaron Matts de Betraying The Martys et Frankie Palmieri de Emmure. Kevin assure les vocalises de toute la chanson avec brio, avec le soutien du public connaissant les paroles de ce tube issu de “Will, Love, Life”, le dernier album de ATB. Aaron Matts viendra faire son apparition syndicale sur le dernier couplet. Bien qu’amusante, cette surprise se révèle anecdotique tant l’investissement mit par le frontman de BTM dans sa prestation n’est pas franchement à la hauteur de l’événement. Mais passons, ATB se débrouille à merveille seul et l’enchaînement magnifique des deux parties de “Frozen Visions” vient rappeler que la formation sait parfaitement se calmer un peu offrir des parties musicales et des ambiances d’une pureté rarement atteinte en live. La fin du set approche et As they Burn s’offre le plaisir d’accueillir Steph, frontman d’Upheaval, sur l’incroyable “Sons Of Shiva” : surement le meilleur morceau du combo et une participation incroyable de Steph sur scène. Le groupe ne perd pas de temps et demande à Luigi d’Upheaval et Ilker de The Bridal Procession de prendre les guitares pour l’hyper violente “Beg For Death”. La présence de ces deux formidables musiciens n’est pas qu’anecdotiques puisqu’ils ont, chacun à leur tour, officié ponctuellement dans As They Burn en remplacement de Fabio ou d’Hoby. Ainsi, ils font parti de l’histoire d’ATB et c’est un émouvant hommage qui est mutuellement rendu avec la présence des deux musiciens pour un morceau. La fin du set se passe en roue libre avec les géniales “Aeon’s War” et “Words Of Betrayers” qui s’enchaînent avant que l’ensemble des musiciens ayant joué ce soir (excepté Aaron Matts) ne viennent sur scène pour péter le champagne et supporter le groupe pour cet ultime “A New Area For Our Plagues” de son histoire. Si les sourires sont omniprésents, l’émotion se fait ressentir dans toute la salle. Sublime morceau et sublime final pour un groupe sublime. La présence de figures phares du metal français ce soir témoigne du vide que laissera As They Burn dans le paysage des musiques extrêmes français.

Vous l’aurez compris, soirée à haute teneur émotionnelle. Bien que le concert fut d’une grande qualité, servi par trois sets ayant contribué à enflammé le Divan Du Monde, l’essentiel n’était là. Non, ce soir l’Adieu d’As They Burn primait sur le reste et chaque personne présente dans cette salle du XVIIIème arrondissement de Paris était là pour célébrer ce qui reste l’un des groupes les plus talentueux de sa génération. Merci pour tout les gars.

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN