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COUNTING CROWS (09/10/14)

English version

Quelques semaines avant le concert du 13 novembre au Bataclan, le frontman Adam Duritz a accepté de répondre à nos questions autour du nouvel album “Somewhere Under Wonderland” paru le 15 septembre.
 

Salut Adam, comment vas-tu ?

Adam Duritz (chant) : Aujourd’hui j’ai la gueule de bois et je suis un peu fatigué. A part ça, je vais bien et, de toute façon, je me suis beaucoup amusé hier soir donc je mérite ce que je ressens actuellement.

Vous êtes de retour avec un nouvel album, le premier depuis 2008, “Saturday Nights & Saturday Mornings”. Quels sont les retours depuis sa sortie ?

A : Ce n’est pas le premier album depuis 2008. Nous avons sorti “Underwater Sunshine” il y a quelques années et c’était un disque vraiment important pour nous. Je pense que deux choses ont énormément influencé “Somewhere Under Wonderland”, à la fois pour moi et pour le groupe. Et l’une d’entre elles a été “Underwater Sunshine”. Travailler sur un album entier, composé de chansons d’autres personnes était comme collaborer avec 10-15 personnes qui n’étaient pas vraiment présentes. Ils ont tous des perceptions différentes du monde, en faisant cela, ils trouvent différentes manières de traduire ce qu’ils voient dans des chansons. Cela parait une chose évidente mais c’est plus profond que cela parait, après avoir passé tout ce temps à prendre leur travail et se l’approprier. Travailler sur un disque de morceaux d’autres personnes m’a fait réaliser que c’était une perte de temps de passer toute une carrière en se concentrant uniquement sur les compositions d’une seule personne – même si dans mon cas, cette personne, c’est MOI.

L’autre chose était pour moi de travailler sur la pièce de théâtre “Black Sun”. C’était la première fois de ma vie que j’ai écrit pour des gens, autre que moi-même. C’était la première fois que j’ai composé pour d’autres voix. C’était la première fois que j’ai écrit pour des voix féminines. Mais surtout, c’était la première fois que j’ai réalisé que je pouvais mettre autant mes propres sentiments et émotions au sein d’un morceau qui n’était pas basé sur une histoire issue de ma propre vie.

Je pense juste que “Somewhere Under Wonderland” est vraiment l’enfant de “Black Sun” et de “Underwater Sunshine”. Il n’existerait pas sans eux.

Les retours pour cet album sont très bons. Mais je ne sais pas si les gens accordent beaucoup d’importance à cela. Je pense juste que, parfois, la culture est d’humeur à vous aimer et parfois, ce n’est pas le cas. Ils chroniquent vos albums en fonction.

J’ai remarqué que mes amis et particulièrement mes amis musiciens semblent cependant vraiment aimer CE disque et cela signifie beaucoup pour MOI.

 

Le nom de l’album “Somewhere Under Wonderland” semble faire référence à “Alice Aux Pays Des Merveilles” de Lewis Caroll. Quelle est son histoire ?

A : Non, il ne se réfère pas à “Alice Aux Pays Des Merveilles”. Je parlais de Wonderland Avenue à Hollywood. J’ai vécu dans un châlet à Laurel Canyon lorsque j’ai emménagé pour la première fois à Hollywood – sur Lookout Mountain, juste au-dessous de l’intersection de Lookout et Wonderland Ave.

Et concernant l’artwork ?

A : Je suis fan de Felipe Molina depuis près de vingt ans maintenant. Lorsque j’ai gagné un peu d’argent pour la première fois de ma vie, les seules choses dans lesquelles j’ai dépensé, étaient des livres, des films, de la musique et de l’art. Je me promenais vers Soho durant la tournée pour le premier album et je suis tombé sur une galerie qui exposait les peintures de Felipe. J”ai été époustouflé. Je n’avais jamais acheté une oeuvre d’art de ma vie jusqu’à ce jour mais, lorsque je regardais ces incroyables toiles, j’ai décidé que j’allais le faire.

Nous avons utilisé l’une de ses peintures “Eject II” pour la pochette d’un album live il y a quelques années, mais j’ai toujours voulu utiliser “Nino Talentoso”. Il est accroché dans ma pièce où il y a mon piano, donc cela a probablement eu un énorme effet sur moi au fil des années. Lorsque nous avons terminé cet album, j’ai pensé que c’était finalement le moment parfait d’utiliser cette peinture. L’idée de Felipe de créer ou attacher une peinture différente pour chaque chanson sur l’album est venue très naturellement après cela et j’ai vraiment adoré le résultat final. C’est un génie.

 

C’est votre septième album, plus de vingt ans après votre premier, vous n’avez vraiment plus rien à prouver. Après toutes ces années, où trouvez-vous votre inspiration et votre énergie pour composer de nouveaux morceaux, particulièrement pour ce nouvel opus ?

A : Je ne suis pas certain que nous ayons déjà ressenti le besoin de prouver quoi que ce soit. Nous avons toujours voulu juste faire des albums qui nous inspirent, les faire sans aucune interférence extérieure venant diluer ce processus. La bonne chose, c’est que nous avons été capables de le faire depuis plus de vingt ans maintenant. Le fait d’être têtu s’est avéré être l’une des qualités les plus importantes pour survivre dans l’industrie musicale et nous n’en manquions pas.

Je pense que l’inspiration pour cet album est venu de la même façon que pour les inspirations de chacun des autres disques : tout est passé et présent. Vous vivez votre vie et vous faîtes de la musique sur ce que vous ressentez. Nous changeons TOUS toujours – comme n’importe qui – donc il y a toujours plus d’hier et d’aujourd’hui pour nous inspirer pour demain.

 

 

Comment s’est passé le processus d’écriture et d’enregistrement cette fois-ci, comparé aux précédents albums ?

A : La composition pour “Somewhere Under Wonderland” a été quasiment faite à l’automne dernier. Immy, Dan, et Millard sont venus chez moi à Greenwich Village une semaine par mois et nous avons juste rassemblé des idées qui se sont transformées en chansons. De cette façon, c’était une manière de travailler incroyablement productive.

L’enregistrement s’est déroulée sur quelques semaines en décembre et quelques semaines de plus en février et c’était pareil que pour chacun des autres disques. La seule différence, c’était que nous travaillons beaucoup plus rapidement cette fois-ci, mais cela était probablement lié avec le fait qu’en composant les chansons ensemble, quatre d’entre nous ont assisté aux sessions avec une compréhension beaucoup plus profonde des chansons que d’habitude. Cela a rendu plus facile de les apprendre à tout le monde.

L’album débute avec “Palissades Park”, un titre de huit minutes. En général, nous sautons la première chanson car on sait qu’on va la réécouter mais avec “Palisades Park”, on ne peut pas. Considérez-vous cette chanson comme un challenge pour entamer ce disque, ou une façon de casser les codes ?

A (haussant les épaules) : Je ne sais pas. Pas vraiment. Pour être honnête, je n’ai aucune idée si les gens sautent, en général, la première piste sur un album. Le font-ils vraiment ? Cela voudrait dire qu’ils louperont “Thunder Road” (ndlr : Bruce Springsteen), “Sonic Reducer” (ndlr : The Dead Boys), “Tangled Up In Blue” (ndlr : Bob Dylan) ET “Sunday Bloody Sunday” (ndlr : U2) sur leurs albums respectifs. Cela a l’air dingue.

Je voulais juste que “Palisades Park” soit la première chanson de “Somewhere Under Wonderland” que tout le monde écoute, donc c’est la première chose SUR le disque ET le premier titre que nous avons sorti DE cet album.

 

Si vous deviez choisir trois morceaux pour définir ce nouvel essai, quels seraient-ils ?

A : Je ne pourrais pas le faire. Nous avons seulement écrit neuf titres pour ce disque, nous avons enregistrés ces mêmes neuf chansons et nous avons mis ces neufs titres sur l’album final lorsqu’il était fini. Ils sont tous aussi importants.

En trois mots, comment définiriez-vous “Somewhere Under Wonderland” ?

A : Essaye. Même. Pas.

Vous avez le talent de produire un langage universel. Comment percevez-vous l’impact de votre musique sur les gens qui l’écoutent ? Avec “Somewhere Under Wonderland”, lorsqu’on écoute les chansons, il y a beaucoup d’images, de souvenirs, de la nostalgie qui les accompagnent.

A : Je l’ignore. Honnêtement, je ne pense pas du tout à cela. Je suis très concerné de l’impact de notre musique sur moi et le groupe, mais je ne pense pas tellement à la façon dont les autres personnes la perçoivent. Je suis juste content qu’ils le font.

 

Surtout pour vous, cela doit être spécial, étant donné que vous percevez les choses différemment avec votre maladie dissociative. Une récente étude prouve que plus vous avancez dans la vie, plus la musique que vous écoutiez durant votre adolescence vous touche. A l’inverse, plus les années passent, plus les chansons que nous écoutons à la radio sonnent comme du vide cacophonique. Qu’en pensez-vous ?

A : Ce n’est pas vraiment vrai pour moi. Je trouve toujours de la nouvelle musique que j’aime tout le temps. Cela dit, je peux comprendre que cela ne doit pas être le cas pour tout le monde.

Ce nouvel album est votre premier chez Capitol Records. Quelle relation entretenez-vous avec cette nouvelle maison de disques et qu’est-ce qui a changé depuis ?

A : Et bien, il est important de se souvenir que ce disque était complètement achevé avant que nous signions chez Capitol et c’est seulement pour un seul album. Je suis très satisfait avec le travail de promotion du label, mais ils n’ont rien à voir avec sa réalisation. Cela dit, je n’ai jamais vu auparavant une équipe d’un label, avec autant d’intelligence et d’énergie. De haut en bas, j’adore leur imagination et leur sens du détail. Si toutes les maisons de disques étaient comme Capitol, je pense que l’industrie musicale se porterait mieux qu’actuellement.

 

 

Site web : countingcrows.com

Anthony Bé
Fondateur - Rédacteur en chef du webzine RockUrLife