Chroniques

Circa Survive – Descensus

Circa Survive est un peu un l’oiseau rare du paysage rock actuel. Formation insaisissable et en même temps pas si mystérieuse, menée par l’ange Anthony Green et sa voix si caractéristique. Entre sa réintégration au sein de Saosin et sa nouvelle sobriété (Green était en proie à des soucis d’alcool et de drogues depuis de nombreuses années), le nouveau papa modèle de la musique alternative est retourné enregistrer “l’album le plus agressif que nous ayons pu composer avec Circa Survive”.

Et ce n’est pas “Schema”, titre d’ouverture et premier single qui contredira cette déclaration. Guitares criantes, batterie saccadée et riffs rock’n’roll à souhait, ce cru 2014 de Circa Survive entre dans le lard dès les premières notes. Ce morceau est la clé pour appréhender au mieux ce nouvel opus. Si l’on sent une certaine noirceur, les mélodies et ce qu’on appellera “la beauté” si chère à Circa Survive reviennent petit à petit dans le morceau. Cependant, on trouve déjà un ingrédient qui sera récurrent à ce disque et qui est inédit au style Circa : le section rythmique, pilier central de l’évolution des morceaux. Sur les albums précédents, le groupe formait une sorte d’osmose très riche sur laquelle venait se greffer les lignes de Green. Et c’est surement cet élément qui rendait le style Circa Survie si insaisissable, cette capacité permanente à se placer là où on ne l’attend pas. Un renouvellement constant sur chaque chanson sans pour autant qu’il y ait de véritable fil conducteur, au-delà de la production, au sein des albums. Sur “Descensus”, la formation se repose clairement sur cette section rythmique comme en attestent les passages saccadés récurrents de “Schema” et de “Descensus” ou encore, le même rythme martelé sans relâche sur “Child Of The Desert”. Cette cohérence permet à l’auditeur de s’accrocher à un élément pour traverser l’ensemble par le bon chemin. Si l’agressivité était surtout présente sur “Schema”, la noirceur, elle, perdure surtout au sein des paroles qui traitent de manière plus ou moins imagée des soucis d’addictions dans lesquels était enfermé Anthony Green. On le sent également s’adresser à ses enfants et à sa femme, ses boucliers contre le vice dans le chemin de la rédemption. Notamment sur la magnifique et sublime “Nesting Dolls”. Véritable chef d’œuvre, le combo distille une ambiance délicieusement psychédélique sans jamais être angoissante. Comme si Green avait enfin trouvé sa paix intérieure. Sa perception ne sera plus jamais la même suite à ses déboires mais il nous l’assure maintenant : “I don’ t want to feel like this, ever again”. Pour en terminer avec la violence qui habite cet essai, ceux qui s’attendent à un déluge de décibels, des cris and co, seront déçus, forcément. Circa Survive énervé reste Circa Survive. Si la première moitié de l’album est somme toute très énergique, la seconde partie offre de nouveau ce que l’on attend véritablement de ce groupe : de la pureté. Dans les phases musicales plus rock, on retrouve cette aura qui donne l’impression que ce que l’on écoute est en réalité un tableau de maître. Les couleurs s’entremêlent sans jamais se heurter, les nuances conduisent à d’autres passages qui donnent de nouvelles impressions, de nouveaux ressentis sans véritablement que l’on s’y attende (“Sovereign Circles”).

En bref, vous l’aurez compris, ce “Descensus” frôle le chef d’œuvre. Certains perdent l’inspiration en gagnant une hygiène de vie, là on se trouve face à un groupe qui a su apporter le petit élément qui pouvait lui manquer avant : un soupçon de cohérence dans ses délires. Merci pour cet album et, à bientôt en France. Vite.

Informations

Label : Sumerian Records
Date de sortie : 24/11/2014
Site web : www.circasurvive.com

Notre sélection

  • Nesting Dolls
  • Schema
  • Phantom

Note RUL

4.5/5

Ecouter l’album

Nathan Le Solliec
LE MONDE OU RIEN